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Citations sur Les Crèvecoeur, tome 1 : Edith et Romain (27)

Il entonna ses grandes phrases, remplies de bons sentiments, sur le mariage et l’amour et l’amour éternel, ajouta quelques allégories bibliques dont il oublia la signification et acheva l’ensemble par une déclaration d’union surréaliste des époux. Avant même qu’Edith et Romain puissent s’embrasser, il les avait poliment dirigés sur le côté et, par de grands gestes hospitaliers, s’affairait à inviter l’auditoire à boire le vin divin. Les nouveaux mariés observèrent la foule avide se précipiter vers l’autel sans se dire un mot, jusqu’à ce que Romain glisse sa main dans sa poche pour en sortir une fine alliance.
« Tenez, je crois que c’est à vous », dit-il en lui tendant l’objet.
Intriguée et émue, Edith enfila cette alliance qui lui allait étrangement bien et s’aperçut alors que c’était le père Violette qui avait conservé celle qu’elle devait donner à son époux. Il avait non seulement oublié de la tendre à Edith, mais il avait également omis de bénir les alliances. Et il était déjà trop tard : Romain l’entrainait vers la sortie de l’église, ou des enfants leur jetèrent du riz et des fleurs séchées.
Et c’est ainsi que commença le mariage d’Edith et Romain Crèvecœur, sur un petit oubli et un grand malentendu.
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Sur le bord du lit, Édith regardait ses chaussures. Elle balançait ses pieds dans le vide et repensait aux histoires de princesses qu’elle lisait toute petite. Ils se marièrent, furent heureux et eurent beaucoup d’enfants. Mais personne ne lui avait raconté ce qui se passe après le mot «fin», lorsque tout commence vraiment et que le monde des adultes souille celui des princesses. Elle se demanda soudain d’où venaient les méchantes sorcières qui en voulaient tant aux jeunes filles parfaites et innocentes des contes de fées. Et elle comprit avec horreur qu’il s’agissait surement de princesses déçues, celles que les princes avaient trompées et bafouées en leur faisant miroiter une vie de rêve, tout en leur offrant la laideur d’un mariage trop humain, ou l’ennui finit par laisser place à une terrible solitude.
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Je voyais bien que le vieil homme attendait sa pénitence avec douleur. Ninon nous quitta, je m'assis près du vieillard et me contentait de le remercier. Il marmonna quelque chose et prit une semelle entre ses mains. Il m'en expliqua la fabrication, les matières premières et le statut que conférait sa hauteur. Plus la terre était proche du pied, plus cela annonçait la pauvreté du sujet. Les rois et les reines ne devaient jamais toucher le sol, mais plutôt se rapprocher du ciel. Puis il m'apprit à tisser les filaments de paille, les tresses, les sangles de cuir et même de bois, afin de recouvrir le pied et de le décorer comme s'il s'agissait de la plus noble chose du monde. Il me raconta les bijoux légendaires que l'on plaçait entre les orteils, les pigments que l'on collectait des animaux pour teinter la sandale et comment le soleil s’immisce entre les fibres et sèche les lanières pour les rendre plus serrées. Je sentais monter les parfums de l'Afrique et, sous ces sandales d'apparence si ordinaire et dénudée, je voyais se dessiner les secrets d'un monde qui savait communier avec la nature. C’était palpitant, et je tirais grande satisfaction de cet échange qui me ramenait encore une fois à l'essence des choses et de mon savoir. J'appris à redéfinir les bases de la chaussures et à ne plus voir le pied comme un objet de honte, mais comme un complément qui pourrait orner la chaussure. Au bout de deux journées de travail, nous tendîmes plusieurs chaussures à des visiteurs, qui hochèrent la tête avec dépit. Nous ne laissions personne indifférent, et cela me rendait heureux. Je remerciai encore le vieil homme et lui expliquait à plusieurs reprises que je n’étais pas le fils d'un sorcier maléfique. Il eut l'air rassuré, fit une pause de plusieurs minutes puis ajouta : « Je vais te dire un secret. Si tu as peur de ton ennemi et que tu veux le vaincre à tout prix, alors dessine son visage sur la semelle. Comme ça, tu lui marcheras dessus à longueur de journée, et il t'apparaitra soudain bien plus facile à vaincre.»
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Un jour que je rentrais manger un morceau, avant de commencer mon travail du soir, j'entendis Louana crier dans la rue des Rosiers. Comme tous les jours, à la même heure, elle laissait tomber ses seins lourds dans les fleurs de ses jardinières, du haut du troisième étage, et tentait, tout en touillant sa marmite, de réunir ses enfants pour le souper. Son chemisier était toujours un peu déboutonné, tant elle avait chaud derrière ses fourneaux, et ses cheveux bouclés, qu'elle grattait quand elle se faisait du soucis, étaient remontes autour d'un bandeau. Elle rassemblait ses troupes en appelant chacun des enfants par son nom et elle s’égosillait tellement que la rue entière savait que les Majewski s'apprêtaient à dîner.
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Evidemment, à l’annonce que je suis Germain Crèvecœur, on se tait. On écoute, on réfléchit, on fronce les sourcils, mais on ne dit rien. Crèvecoeur, c’est tout sauf invitant, sympathique ou chaleureux. Crèvecœur, Crèvecœur. Et voilà le malaise qui s’installe. Et moi, je vois bien que derrière ce non-dit, derrière leur regard, il y a une image qui se dessine ; celle d’un cœur que l’on perce avec une violence inouïe. Et cette violence, bien sûr, ne peut se solder que par une chose : la mort ou la lente agonie.
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J'aimais l'univers des souliers, c'étaient des objets qui me parlaient, un véhicule naturel, pratique et beau, avec lequel je me sentais bien.
Je ne voulais pas réparer ni collectionner ce qui avait autrefois été beau.
Non, moi je voulais fabriquer le beau et le rendre exceptionnel.
Je ne voulais pas regarder l'usure des choses, mais créer du neuf, du parfait, et peut-être aussi oublier qu'un jour tout cela s'effrite.
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A l'époque, on les appelait les Nègres, et je me rendis rapidement compte que ce que les Parisiens venaient voir, ce n’était pas la beauté des cultures africaines mais, bien au contraire, la bizarrerie du genre humain. Tous s’étaient rassemblés dans leurs plus beaux vêtements pour voir des hommes et des femmes à moitié dénudés, à la couleur de peau sombre et salie et aux traits physiques très différents des leurs. J’étais choqué par cet étalage humain, qui faisait de l'exposition un véritable zoo et qui n’était pas sans me rappeler la Sinistre Maison, en plus politiquement correct.
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L'aventure commença par un train qui m'emmenait à Paris, la seule ville qui, à mon sens, pouvait m'offrir ce que je désirais le plus au monde. C’était aussi simple que cela. Juste un train, Paris et un projet.
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N'importe quel enfant trouve que sa mère est belle. C’était mon cas. Je regardais ma mère comme la huitième merveille du monde et, au fur et a mesure que je vieillissais, comme l'incarnation de la sensualité.
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Elle s'assit à son pied, à la fois fascinée et terrifiée par l'énormité de cet arbre dont elle n'avait jamais jusqu'alors remarqué l'existence. Il était effrayant et majestueux à la fois, mais étrangement, elle s'y sentait bien. à l'ombre des noeuds verts de ses branches, recroquevillée contre la monstruosité de son tronc, Edith se mit à pleurer. Elle pleura de plus en plus fort, de tout son corps, pour vider ce qui restait encore en elle. Elle pleura encore et encore, sans pouvoir s'arrêter inondant de ses larmes l'écorce sèche du hêtre qui semblait lui aussi couler ses pleurs le long de ses branches.
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