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Critique de TheFunkyFreshLibrary


Eli McCullough vit avec ses parents, son frère et sa soeur dans une petite maison au milieu de l'ouest sauvage. En 1849, un soir que son père est parti à la poursuite de voleurs de chevaux, la maison est assaillie par une bande d'indiens Comanches, qui enlèvent Eli et son frère. Adopté par un des braves de la tribu, comme c'est la coutume chez ce peuple, Eli est initié à leurs pratiques et se considère rapidement comme un des leurs. Quelques années plus tard, Eli doit, bien malgré lui, retourner vivre chez ceux qu'il considèrent maintenant comme « les Blancs »...
Ainsi commence cette grande saga qui, à travers trois voix de la famille McCullough, nous raconte l'histoire du Texas, de sa création en 1836 aux empires pétroliers en passant par la guerre de sécession et les élevages intensifs. On suit donc Eli, le patriarche, son fils Peter, considéré comme un traître car il désapprouve les méthodes barbares de son père, et enfin Jeannie, l'arrière-petite-fille, qui tente d'être digne de son héritage et de se faire une place dans un monde d'hommes.

Cela faisait déjà deux ans que je voulais lire ce roman, puisque j'en avais entendu parler en septembre 2012, avais acheté la version américaine en septembre 2013 puis la version Française Grand Format en septembre 2014, quand l'auteur était venu le présenter au Festival America. Finalement, j'ai attendu sa sortie en poche en avril 2016 pour m'y mettre (je n'aime décidément pas lire en GF!).

C'est un livre foisonnant et incroyablement documenté, et les thèmes ne manquent pas.

La partie sur la vie d'Eli dans le camp Comanche est passionnante. Loin de tout cliché, est racontée de façon quasi documentaire la chasse au bison, la fabrication des flèches, le tannage des peaux par les femmes, l'utilisation de toutes les parties de l'animal, les règles de vie dans le camp (et notamment la sexualité), les guerres entre tribus... Comme dans le dernier roman de Joseph Boyden, Dans le Grand Cercle du Monde, ce récit change des visions manichéennes de l'indien sanguinaire des western des années 1970 ou du gentil indien massacré par les méchants blancs qu'on a pu entendre ces dernières années. Ici, dans le wild wild west, chacun se bat pour des terres et pour sa peau, et que le meilleur gagne.
« Les Mexicains avaient volé la terre des Indiens, mais ça ils n'y pensaient jamais : ils ne pensaient qu'aux Texans qui avaient volé la terre des Mexicains. Et les Indiens qui s'étaient fait voler leur terre par les Mexicains l'avaient eux-mêmes volée à d'autres Indiens. »

Le reste du livre nous apprend beaucoup sur l'histoire violente du Texas, à travers les conflits entre pionniers anglo-saxons et amérindiens, entre américains du sud et du nord, entre mexicains et américains. Mais aussi sur l'économie de l'état, où les enfants des pionniers sont devenus grands éleveurs et les enfants de ceux-ci exploitants pétroliers. Sur la destruction du paysage, jadis couvert de plaines fertiles et de forêts luxuriantes, transformé en désert par l'agriculture et son irrigation. Sur la famille et la transmission du patrimoine, dans un milieu machiste où la loi du plus fort triomphe.

Chaque personnage nous apporte sa vision de l'histoire familiale et de la vie. Eli est dur, violent, et prend ce dont il a envie même s'il doit tuer pour cela ; mais après ce qu'il a vécu, comment ne pas comprendre son comportement ? Peter est en conflit avec son père et avec lui-même car il s'en veut de ne pas empêcher ce qu'il considère comme des injustices profondes ; mais cela ne va-t-il pas dans le sens de l'histoire ? Jeanne-Anne se bat pour être reconnue comme digne de reprendre l'empire familial, même si elle est une femme ; mais ses enfants lui reprochent de ne pas avoir été présente et de désintéressent de ses affaires. Trois personnages pas forcément sympathiques, mais très humains, qu'on suit avec intérêt et plaisir.

En conclusion, c'est un livre passionnant et très bien écrit (mention spéciale pour la traduction qui respecte parfaitement le style de l'auteur), un vibrant hymne au Texas qui parle de façon juste de tous les protagonistes de son Histoire.

Le seul bémol que j'ajouterais est que j'ai trouvé que l'histoire (ou les personnages) manquait du supplément d'âme qui m'avait emportée dans le premier roman de Philip Meyer, Un arrière-goût de rouille, qui reste un des plus beaux romans que j'ai lus. Peut-être la documentation pointue a-t-elle un peu trop pris le pas sur le reste ?
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