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Critique de 5Arabella


La pièce est créée en 1664 à Versailles, dans le cadre de grandes fêtes. Elle reprend un sujet utilisé depuis le moyen-âge, dont les comédiens italiens avec qui Molière partage le même théâtre avaient fait une version de commedia dell'arte. Il s'agit d'un homme dévot qui recueille chez lui un saint homme, mais ce dernier, en dépit de sa sainteté, se met à courtiser la femme de son hôte. Cette dernière, après avoir repoussé les avances de l'homme qui persiste, finit par révéler la chose à son mari, qui finit pas chasser le soi-disant saint homme.

Mais l'époque pendant laquelle Molière crée sa pièce n'est pas favorable : nous sommes pendant une grande campagne contre les jansénistes, et tout ce qui peut sembler une critique de la pratique catholique de la religion n'est pas le bienvenu. Car la pièce de Molière évoque la question du directeur de conscience, mis à l'honneur par François de Sales, censé permettre de vivre dans le monde, tout en vivant en Dieu. Et des hommes d'église et des dévots s'offusquent que l'on mette sur une scène de théâtre, qui pour certains semble déjà en elle-même condamnable, une pièce qui peut sembler se moquer d'une pratique religieuse considérées comme la plus sainte d'entre elles.

Pour défendre sa pièce et lui permettre de vivre (elle est interdite sur les scènes publiques), il précise qu'elle ne s'attaque pas à la dévotion, mais à l'hypocrisie, car dit-il « le devoir de la comédie c'est de corriger les vices des hommes ». C'est la première fois qu'il tient ce discours, qui correspond à l'objectif de la comédie, tel qu'il a été défini par les humanistes qui ont repris les modèles antiques au XVIe siècle, Molière jusqu'à cette affaire Tartuffe avait plutôt des visées de faire rire, de distraire avec le comportement des humains. Là il se réclame d'un modèle de la correction des vices, ce qui va influer sur sa production de pièces futures, car pour rester en cohérence avec cette position, il va écrire des pièces qui dénoncent explicitement les vices.

Ensuite, il modifie sa pièce, pour qu'elle soit encore plus clairement une dénonciation de l'hypocrisie. La pièce passe ainsi de 3 à 5 actes, en fait l'acte 2 et 5 sont rajoutés et le reste un peu arrangé pour que cela semble cohérent. C'est surtout l'acte 5 qui change la tonalité de la pièce, puisque Tartuffe, non seulement se révèle très cruel, voulant mettre la famille dehors de sa maison, voulant faire emprisonner son bienfaiteur, mais au final il se révèle un faux saint homme, et un escroc notable, appréhendé par la justice d'un juste souverain qui veille avec bienveillance sur ses sujets.

Poussé par les circonstances, à partir d'un sujet maint fois traité, banal pourrait-on dire, il fait quelque chose de bien plus fort, et qui l'engage sur un chemin de pièces très ambitieuses. La pièce est finalement autorisée, et a du succès.

Et malgré quelques petites incohérences dues à cette composition en plusieurs étapes, elle est toujours un grand très grand plaisir de lecture.
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