AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de ladesiderienne


Mon année littéraire se termine plutôt bien avec ce titre de Véronique Mougin qui vient bousculer mon top 6 sur la dernière ligne droite. En effet, impossible de ne pas le faire figurer parmi mes coups de coeur ! J'ai découvert cette auteure avec "Un fils à maman" que j'avais beaucoup aimé, un récit plein d'humour caustique et de tendresse autour de l'amour maternel. Elle officie ici dans un tout autre genre en s'inspirant de l'histoire vraie d'un de ses cousins pour construire une biographie romancée qui va emmener le lecteur dans deux univers bien différents.

Avril 1944, Tomi Kiss, jeune juif hongrois de 14 ans et sa famille sont déportés au camp de Dora-Mittelbau, en Allemagne. Là, reléguant ses soucis d'adolescent au second plan, il comprend très vite qu'il va devoir mettre toute sa débrouillardise, dont il ne manque pas heureusement, au service de sa survie. C'est un coup de bluff magistral qui va l'y aider. Alors qu'il a toujours refusé d'apprendre la couture dans une famille de tailleurs pour homme depuis des générations car il veut être plombier, à l'appel d'un kapo qui cherche expressément des tailleurs, il se désigne pourtant et se retrouve dans un atelier, au chaud, à réparer les tenues des prisonniers, plutôt que dehors, par grand froid, à casser des cailloux. Une veste ou un pantalon, dérobé par ci, par là, permet de changer ses propres guenilles et sert de monnaie d'échange contre de la nourriture. Et voilà comment, de fil en aiguille (jamais l'expression n'a été si justement employée), Tomi et son père, seuls rescapés de la famille, vont survivre, fuyant la Hongrie à la libération pour se retrouver à Paris. Après la guerre, la ville est en effet le paradis pour tous ceux qui ont des mains en or et le jeune homme va rapidement prendre des responsabilités au sein d'une maison de haute couture.

de la noirceur des camps aux paillettes de la haute couture, Véronique Mougin nous entraîne dans une histoire construite autour de la résilience. le récit est original et formidablement bien écrit, le narrateur en est le jeune Tomi. Il use de tout son franc parlé pour décrire le monde des adultes tel qu'il le perçoit mais également celui des camps. Régulièrement il confie quelques pages à ceux qu'il côtoie apportant ainsi un autre point de vue. le contraste est saisissant entre les deux parties du roman : d'un côté, il y a le récit d'un jeune garçon qui veut croquer la vie à pleine dents, qui use de culot et ne manque pas d'humour dans un univers totalement déshumanisé. de l'autre, il y a celui de l'adulte qu'il est devenu évoluant dans un monde de luxe mais hanté par les souvenirs qu'il préfère taire et la culpabilité de ne pas avoir pu sauver son petit frère. J'ai trouvé Tomi profondément attachant et émouvant son parcours ainsi que son discours, notamment l'importance qu'il accorde désormais au vêtement, après avoir vu partir les siens nus pour les crématoires : "Le vêtement te sauve du froid et de la honte, il est ce qui reste quand tu n'as plus rien, ce qui te transforme, ce qui t'élève."
Sans hésitation, un 20/20 pour ce coup de coeur qui vient clore de belle manière l'année 2023.
Commenter  J’apprécie          195



Ont apprécié cette critique (19)voir plus




{* *}