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Critique de isabellelemest


Dans ce polar, le troisième de la "Trilogie de la crise", Markaris poursuit sa radioscopie de la société grecque minée par le marasme économique qui plonge les couches ordinaires de la population dans la misère.
Cela commence par de la politique-fiction, nous sommes le 1er janvier 2014 et la
Grèce vient de revenir à la drachme, après avoir abandonné l'euro. Les salaires sont suspendus, les caisses sont vides, les retraités manifestent sous les huées des jeunes qui les accusent d'avoir profité du système, les familles se resserrent et retrouvent les réflexes de la pauvreté d'antan, soupe de haricots et légumes pour tout le monde, et encore en puisant dans leur bas de laine. Pas de travail pour les jeunes diplômés, qui organisent donc pour s'occuper des services solidaires et gratuits, cabinet d'aide juridique, asile dans un hôtel squatté pour les retraités sans abri, écoles de langues et de maths pour les enfants des quartiers pauvres.
Mais entre temps des crimes sont perpétrés contre des anciens de la "génération de Polytechnique", celle qui s'était insurgée en 1973 contre la junte des colonels, dans un soulèvement héroïque et magnifié par les régimes démocratiques ultérieurs. Chaque cadavre est retrouvé dans un lieu emblématique des magouilles auquel la victime s'était livrée de son vivant pour exploiter jusqu'à la corde le prestige, les relations et l'influence gagnées lors de ses années étudiantes. Un message téléphonique destiné aux enquêteurs reprend le fameux slogan des insurgés "Pain, éducation, liberté". L'entrepreneur enrichi par les travaux des Jeux Olympiques, adjudication obtenue par des combines, le professeur d'université dans la thèse est un plagiat et les relations syndicales déterminantes pour sa réussite, le syndicaliste professionnel qui fait et défait les carrières, ces trois victimes hautement symboliques d'une génération qui a réussi par les compromissions et l'affairisme sont également détestées de leurs enfants et brouillées avec leur famille.
Alors à qui profite le crime ? A l'extrême-droite et aux neonazis qui menacent immigrants et jeunes engagés dans la solidarité ?
Chez Markaris, les victimes sont bien plus antipathiques que les coupables, car ces crimes sont comme une catharsis par laquelle la société grecque, sa jeunesse et ses forces vives, voudraient punir une génération de profiteurs responsables de la ruine du pays. Markaris poursuit ici sa dénonciation des maux de la Grèce, mais laisse la porte ouverte à l'espoir fondé sur la générosité, l'humour et la solidarité.
Lu en V.O.
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