ce bébé elle l'avait voulu pour mettre la dernière touche au tableau inachevé de sa réussite, avant de s'apercevoir que le contenu des langes souillés n’était pas aussi grisant que celui des inconscients.
si l'égorgeur avait su tenir un crayon, le dessin aurait légitimé son crime, mais les assassins sont des artistes sans technique ni souffle.
un bébé ça se remplace mais un tableau ou un livre disparaît, c'est irrémédiable
la complaisance s'applique sur nos fêlures telle la pâte apposée par le restaurateur pour colmater les brèches d'un vase?
sur mon lopin je cultive la théorie que l'art touche à la vérité quand il évite la ressemblance, dédaigne l'exactitude.
les sujets mythologiques et bibliques exaltent le massacre, le viol, le rapt, le martyre, la violence. Sur les tableaux les coupables ne cessent de tuer es innocents, sans qu'aucun commissaire Campana ne surgisse pour les arrêter.
les pieds sont nos pneus. On les chausse de caoutchoucs et on avance, corps emmitouflés, tête couvertes.
Rien ne presse, quand on fait confiance au lendemain.
Les Vénitiens des beaux quartiers, Dorsoduro, San Marco ou San Polo, ne sillonnent Cannaregio que pour aller à la gare, par la longue Strada Nuova bordée de boutiques modestes, de supermarchés, de mangeoires pour voyageurs impécunieux.
L’orgueilleuse Venise qui n’a plus les moyens de son orgueil. Les fondations pullulent en ville. Les palais vides se succèdent sur les rives des canaux, et la chasse aux mécènes est notre sport local. L’acheteur de palais est aux Vénitiens ce que le phoque est aux Lapons, un gagne-pain rare et protégé