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Critique de jaimelire21


Quelle découverte, cette écrivaine !
Dans le contexte de la situation geo-politique actuelle en 2022 dans l'est de l'Europe, j'ai trouvé ce livre « par hasard ».

J'ai lu uniquement la première partie, Tempête en Juin. Jamais je n'ai « lu » une fresque historique relativement récente sous forme de roman, peinte quasiment en direct avec autant de précision, de finesse et de lucidité, d'ironie et même d'humour!
Les mots d'Irène Némirovsky sont de véritables coups de peinture ! Un pinceau très fin, des couleurs à l'infini ; ce roman réaliste composé de 4 tableaux autour de quatre personnes et familles parties sur les routes en quittant Paris, en juin 1940, est une galerie d'art…

Une galerie d'art dans le décor réel d'un monde tragique, celui du début de la 2ème guerre mondiale.
Comment cette écrivaine, d'origine juive née à St Petersbourg dans une riche famille bourgeoise mais ayant vécu et étudié en France dans un grand confort matériel et spirituel, a appris à avoir un regard aussi acéré, juste, tendre, lucide, sans pitié, ironique mais aussi poétique sur les êtres humains et leur environnement ? Son intelligence, son sens de l'observation ?

Grande bourgeoise elle-même, dans ce premier volet l'auteure observe et brosse les portraits très riches en couleur et en psychologie des gens qui se lancent sur les routes pour fuir Paris :
Les Péricand, une famille bourgeoise avec un grand-père en fauteuil roulant et 2 fils -dont l'un est prêtre et l'autre, Hubert, qui veut se battre dans l'armée en quittant la famille pendant leur fuite. Leurs domestiques ; le riche écrivain Gabriel Corte, imbu de lui-même, et sa maîtresse Florence ; les Michaud, couple d'honnêtes employés de banque de situation un peu modeste. Leur fils est déjà enrôlé dans l'armée; Charles Langelet, célibataire égoïste raffiné et pédant qui aime les belles collections, vivant hors du temps.

Oui, ces personnes ont des caractères, des pensées, des réactions, des peurs, des ressentis, des espoirs, tous rendus d'une façon magique. Dans les épreuves, on sent que certaines changent, deviennent moins égoïstes, plus humaines. D'autres font semblant de rien, ne voient rien et espèrent que tout ira bien pour eux pour toujours. Oui, on a de la sympathie pour certain-e-s d'entre eux !

Ces récits se joignent ici et là, il y a des rebondissements inattendus et réussis. Parmi les pépites…Deux pages consacrées uniquement à l'observation d'un chat dans un jardin dévasté, un régal de poésie. La description de ce mois de juin si doux, si fleuri et printanier. Et le jeune garçon Hubert, dans sa naïveté et sa jeunesse, on ne peut que l'aimer. Et puis, les derniers instants du vieux Péricand entouré d'un notaire et de 2 nonnes …épique ! La fin surprise de ce Langelet. le retour inattendu du jeune Hubert présumé mort. de grands moments de lecture !

La mosaïque humaine que peint Némirovsky est d'une grande finesse et justesse. Sans jamais juger, l'auteure témoigne d'une très grande maturité personnelle. Némirovsky a senti arriver l'horreur avec lucidité et ne s'est pas trompée. Elle a eu 100 fois raison d'écrire ce printemps 1940 sous forme de roman. Mais voulait-elle absolument témoigner ? Pas si sûr…
Ecrire passionnément, telle était sa mission…

Un très grand talent qui malheureusement s'est éteint à l'âge de 39 ans dans les camps nazi.
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