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Citations sur La Messe de Saint Venceslas, Conte de Mala Strana (24)

Pris d’un terrible doute, je battis l’air de mes bras pour m’arracher à ma torpeur. Je me levai et titubant je gagnai la balustrade pour voir. Qui vois-je ? M. le curé qui allait lire l’Évangile. À gauche de l’autel, à sa place habituelle, ma mère qui, une vraie image de la douleur, levait les yeux vers saint Venceslas, Elle n’était pas seule dans le banc. Il y avait à côté d’elle une autre forme noire en laquelle je reconnus ; ma tante Marthe. Je compris. Honteux de n’avoir pas mieux résisté au sommeil, bourrelé d’avoir causé de grands soucis à mes parents, je me sentais fort malheureux. Ma première pensée fut de me jeter aux pieds de ma mère. Quand l’office toucha à sa fin, je descendis et me glissai dehors. Il faisait encore sombre, une pluie fine tombait glaciale. Grelottant, la tête basse, je guettai ma mère à la sortie, et quand j’aperçus sa figure dans l’embrasure de la porte, je m’empressai de couvrir sa main ridée de chauds baisers.
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Je voulus compter les coups qui roulaient lugubres dans le silence, mais je ressentis alors une violente douleur à la tête. La douleur augmenta quand j’essayai d’ouvrir les yeux. C’était comme une vive brûlure. J’étais couché, le bras replié sur la poitrine, mais le moineau que je croyais tenir était parti. Comment avait-il pu s’échapper sans que je m’en fusse aperçu ? Énigme. Je réussis enfin à rouvrir les yeux. La verrière en face était éclairée. Il en venait des sons d’un chant doux et pieux. J’écoutais. Mais je connais cette mélodie ! Il n’y a pas de doute, c’est le chant de l’office du matin, le Rorate Cœli.
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En dorlotant l’oiseau toujours un peu rebelle, je m’étendis au bas du buffet d’orgues. J’étais bien comme ça, tenant l’oiseau contre la poitrine. Content, j’étais très content. J’attendrais et compterais les coups quand l’horloge sonnerait. Étant juste en face de la verrière qui donne jour à la chapelle de saint Venceslas, je ne pouvais en aucune façon manquer la messe de minuit. Je ne sais combien de temps je demeurai dans cette attente, mais lorsque, à un moment donné, je regardai devant moi, je remarquai que la nuit était moins épaisse et qu’une lueur pâle s’élevait au fond. Précisément l’horloge sonnait.
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J’escaladai le buffet, et, arrivé au gradin supérieur, j’étendis la main. Là, je le tiens. Plus de peur, je suis sauvé. Le pauvre pierrot se débattait furieusement, criait, me piquait au doigt, mais je ne lâchais pas ma proie. Je caressais le petit prisonnier qui me tenait la main délicieusement chaude. Mais, dis donc, tu ne voudras pas te démener toujours comme ça, hein ! Pourquoi avoir peur de moi ? Je ne te ferai pas de mal, va ! D’ailleurs, ce n’est pas pour longtemps que tu seras privé de la liberté. Minuit venu, je te relâcherai. Sois donc plus raisonnable ! Calme-toi, là !
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Je ne pus poursuivre cette vision plus loin, car, repris de froid, je tombai du marchepied où j’étais accroupi. J’étais transi à tel point que je ne sentais ni bras ni jambes. J’avais la tête lourde et la gorge sèche. Je me mis à pleurer. Dans les vastes espaces ténébreux et silencieux mes sanglots résonnaient lugubrement. J’eus peur d’être seul, loin de toute manifestation de vie. À ce moment de désespoir un bruit à peine perceptible parvint à mon oreille. Ce fut à l’étage supérieur. Étonné, je retins mon souffle pour mieux écouter. Je saisis encore le même bruit léger au-dessus de moi, un pépiement d’oiseau. Vrai, je ne suis pas tout seul, comme je pensais tout à l’heure. Un être vivant est là qui partage ma solitude. Un passereau dont le nid était peut-être à ma portée, en haut, sous le faîtage. Je ne pus résister au désir de monter pour voir.
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Derrière eux prendraient rang les anciens chanoines de Saint-Guy. À ce propos, un doute affreux me tourmentait. Les chanoines du chapitre actuel y seraient-ils compris, eux aussi ? Seraient-ils dignes de ce grand honneur ? Et s’il en était ainsi, Mgr Pessina serait-il du nombre ? Je ne pouvais oublier la taloche dont il m’avait gratifié l’autre jour quand j’avais porté un peu de travers la lanterne suspendue à la hampe. J’avais de même en fraîche mémoire « l’âne bâté » qu’il me donna lorsque, sonnant pour la première fois au Salut et me trompant de corde, je mis en branle le tocsin. Non, je ne voyais pas la place de Mgr Pessina dans le cortège. Par contre, j’étais certain que la cérémonie ne se passerait pas sans l’assistance des grands et nobles seigneurs dont les effigies tapissent les murs des chapelles absidiales. Puis après viendraient les archevêques avec saint Jean Népomucène, entouré de ses anges d’argent, et la phalange de vaillants chevaliers, capitaines et woiewodes qui dorment sous les dalles de la cathédrale. Enfin, seul, grave, majestueux, saint Venceslas portant un calice d’or. Du dessous de son casque d’airain ébréché d’un côté s’échappent de magnifiques boucles blondes tombant sur ses épaules. Il a sa légendaire cotte de mailles couverte d’un surplis de soie blanche. Son port, sa figure, son regard respirent une sérénité divine.
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La question que je ne parvenais pas à résoudre était de savoir si l’on entendrait les cloches sonner quand le cortège se mettrait en marche. Un autre point qui ne cessait de me préoccuper était de deviner dans quel ordre le cortège se développerait. À la tête, il y aurait probablement deux porte-lampes, comme au salut. Ils avaient dans mon imagination les formes des deux anges aux ailes éployées comme ceux que l’on voit au-dessus du sarcophage de saint Jean. Immédiatement après suivraient les chantres, tous très vieux et courbés. Puis viendraient peut-être les rois et les reines de la famille de Luxembourg dont on voit les bustes dans les niches du triforium.
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Il me semblait que la messe de minuit ne devait plus tarder et que j’allais voir bientôt les ombres des saints bohêmes avec celle du saint Venceslas.
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Je voulus me lever, mais j’étais transi de froid et ne pus bouger. La grande nef, immense, semblait barrée d’une douce lueur argentée que la lune y projetait. Ayant réussi à vaincre la rigidité où j’étais plongé, je m’avançai vers la balustrade. L’air qui venait d’en bas, saturé de relents, acheva de m’étourdir. Je suffoquais. Ma tête était comme entre deux branches d’étau. Je ne voyais plus rien. Là-bas seulement, je distinguai au loin, très loin, une faible lueur rose. C’était la lampe devant le maître-autel.
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Le silence est si parfait que l’on entendrait voler une mouche. Une seconde après, des accords suaves, pleins de douceur, emplissent les voûtes montant vers les cieux. Mon émotion était si vive que je ne sentais ni faim ni froid. Extasié, je poursuivis la douce illusion jusqu’au bout. Ce ne fut qu’aux derniers accords du gracieux Dona nobis pacem que je repris mes sens. Je ne saurais dire combien de temps avait pu durer cet enchantement, mais je croyais avoir entendu l’horloge plusieurs fois sonner.
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