On découvre souvent
Justine Niogret avec son diptyque chez les éditions Mnémos,
Chien du heaume et
Mordre le bouclier, mais elle a aussi écrit un roman post-apocalyptique chez les éditions Critic :
Gueule de Truie. Encore un titre difficile à oublier !
Ses lecteurs y sont habitués et les nouveaux apprécieront : le style de
Justine Niogret est rude, vif et tranché. Ambiance post-apocalyptique oblige, l'autrice se fait plaisir pour laisser parler son langage haché menu. En somme, lire du
Justine Niogret, ça se reconnaît vite. Ici, elle utilise toutefois un ressort habituel de certains romans post-apo, les termes inventés après la déliquescence consécutive à ladite apocalypse. Rien de très compliqué, mais la tentative est là. Pour le reste, si son onirisme médiéval vous avait plu, son mysticisme post-apocalyptique devrait passer relativement bien, tant qu'on reste dans son trip très personnel autour de la religion.
À l'image de ce style âpre, l'histoire de
Gueule de Truie est brève et sèche. Après une catastrophe, la vie sur Terre tient plus du cauchemar que du rêve éveillé, tout comme la quête du héros tiendra plus du chemin de croix que de la balade tranquille au milieu des pâquerettes.
Gueule de Truie est le nom que le héros a reçu quand il est devenu une Cavale, un inquisiteur chargé de traquer les derniers humains restants par les Pères qui considèrent que l'Apocalypse est divine mais que, pour atteindre le Jugement dernier, il faut finir le travail à demi-réalisé jusqu'ici. Dans sa traque,
Gueule de Truie est obligé de porter un masque terrifiant, très bien illustré en couverture par
Ronan Toulhoat, dessinateur de Block dans le même ton. Il fait rapidement la connaissance d'une jeune fille esseulée et tenant une boîte au contenu mystérieux (qui a dit MacGuffin ?). Dilemme moral et humain pour le héros : où le mènera sa quête dans ce monde à l'abandon ?
Le récit est un poil étiré, donnant l'impression que nous avons affaire à une nouvelle étendue dans l'optique d'un court roman. À mon humble avis, nous partons aussi beaucoup trop dans le mystique à outrance, en surinterprétant les événements et leur « destin ». Bien sûr, nous sommes dans un contexte volontairement intégriste, mais vu les questionnements du héros dès le départ, il n'y avait peut-être pas besoin d'en faire tant, surtout que la toute fin nous laisse un peu sur notre faim.
Premier roman un peu dispensable de Justin Niogret (il en fallait bien un),
Gueule de Truie parlera surtout aux acharnés (pas de décharnés ici) du post-apo.