L'inconscient n'a pas pour but de devenir conscient.
L'abondance de couches et de surcouches posées sur les personnalités ne nous éloigne pas de notre authenticité, elle révèle notre appétence proprement humaine à la fausseté.
La jouissance se vêt de toutes nos tentatives de la dompter.
On m'y autorise, alors je m'y sens forcée. Cette néo-morale m'intime de jouir ainsi, elle me laisse le champ libre, elle me dit que je peux tout avoir et je m'en veux de mon impuissance, je me déteste de ne pas savoir en profiter. C'est là, devant moi, et je suis paralysée. Cela devient normal et cela m'ennuie. En revanche, subvertir ma place m'attire. Mais est-il heureux d'employer un tel verbe ? Existe-t-il encore à l'ère de tous les possibles ?
Devant la foultitude de plaidoyers et réquisitoires pour tel ou tel nouveau monde, il est fort délicat de conjuguer avec sérénité nos propres contradictions sans se culpabiliser.
"Le concept de normal n'est pas un concept d'existence, susceptible en soi de mesure objective. Le pathologique doit être compris comme une espèce de normal, l'anormal n'étant pas ce qui n'est pas normal, mais ce qui est un autre normal."
Georges Canguilhem, Le Normal et le Pathologique, Paris, Puf, 1966
Ce langage est essentiel, sauf qu'il n'est pas un grand tout, il est incomplet, lacunaire. Il oriente autant qu'il perd. C'est ce que Lacan nomme "le grand Autre". Parler permet d'appréhender le manque tout en le révélant. Quand j'appelle "maman", c'est déjà qu'elle n'est plus à mes côtés. Mettre des mots sur une absence pour empêcher le sens de déserter.
Je marchais dans les rues de Paris sans penser à rien. Puis me venait l'idée que je n'existais peut-être pas, que j'évoluais dans un décor, les autres que je croisais ressemblaient à des acteurs dans le meilleur des cas, à des zombis ou des ombres dans les pires. J'étais effrayée de devenir folle, mon coeur se mettait à battre si vite que je m'essoufflais en un rien de temps, obligée de me tenir au mur le plus proche. Comme si la scène se mettait à bouger, à vaciller. Mon corps réclamait un appui ferme, une surface dure pour qu'il ne se sente pas désintégré. Certains chassent cette sensation pour retourner à la douceur chimérique d'un "moi" sans aspérité, d'autres écoutent ce fourmillement éphémère, pensant qu'il recèle une vérité. L'angoisse rappelle la présence du désir, du manque, de la perte, elle est la partie visible d'un ensemble bien plus complexe, qu'on appelle le sujet de l'inconscient.
Les chemins parfois se séparent sans avoir pu véritablement se relier, comme des sinusoïdales qui finissent par se rejeter l'une l'autre. Chaque rapprochement pour lui était synonyme d'entrave.
Quand une conviction est balayée par l'histoire des idées, le langage et la philosophie, c'est une place vacante pour le vertige. Néanmoins, cela peut devenir délicieux. Le tournis que procure la possibilité d'un autre paradigme est proche de l'orgasme.