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Critique de Gepeoh


Présentation de l'objet : Premier roman de Brian O'Nolan, connu sous le nom de plume de Myles na Gopaleen, Brother Barnabas ou George Knowall, c'est sous celui de Flann O'Brien que O'Nolan publiera la plupart de son oeuvre romanesque, débutée avec Swim-Two-Birds en 1939.
Induction : C'est dire l'amour que l'auteur porte à l'onomastique, aux emprunts, au mensonge, et au vol à la tire.

"Les personnages doivent être interchangeables, à l'intérieur d'une même oeuvre et d'un livre à l'autre. La somme des oeuvres existantes sera considérée comme une réserve de types possibles d'où les auteurs avisés pourront à leur gré extraire leurs personnages, n'ayant à en créer de nouveaux que lorsqu'ils ne trouvent pas la marionnette désirée." (Narrateur, Swim-Two-Birds)

Nature de tout ce qui précède : une forme d'introduction.

Tentative d'explication de la trame narrative : J'écris une critique d'un roman qui met en scène un narrateur qui passe la plupart de sa vie alité et qui écrit un livre sur un écrivain qui reste dans son lit et met en scène des personnages qui naissent à 25 ans (par la plume de l'auteur), qui tiennent de la légende et qui pleurent du cresson (type Suibhne/Sweeny), qui sont mal et bien car pairs et impairs (le lutin MacPhellimey), qui engendrent d'autres écrivains (qui tuent les précédents par l'acte de procès via l'écriture), qui parlent fort, boivent, jouent aux cartes et se racontent des légendes idiotes, qui parlent de l'augmentation des prix depuis la guerre (même la Fée, oui). L'énumération n'en finit pas.

Nom de la figure de style utilisée : anaphore.

Nature du texte pris dans son ensemble : Assemblage, Künstlerroman (roman d'artiste).
O'Brien (on va rester sur ce nom) est un voleur. Malin comme un Puck. Il pioche partout et construit ce qu'il considère être le roman moderne, qui doit être capable d'intégrer tout ce qui est pertinent ou drôle. Il doit, ce roman moderne, tout comme l'oeuvre dramatique, être pourvu des accidents externes de l'illusion qui lui faisaient défaut et le rendait inférieur (selon les dires du narrateur de Swim-Two-Birds.

Les exemples sont donnés assez tôt. le narrateur est en dérangement permanent. Son oncle qui l'apostrophe pour participer à des débats ridicules concernant un buffet et qui l'accuse de ne rien faire (ce que, tel Bartleby, le narrateur ne nie pas. Il écrit, mais il ne refuse pas d'en parler. Il préfère ne pas en parler), son Bookmaker qui le branche sur les futurs gagnants de courses de chevaux, les livres de sciences naturelles et humaines qu'il lit en permanence (comme le narrateur du Troisième Policier lira de Selby qui envisage la Terre comme saucissoïdale - qui a la forme d'une saucisse).
Mais surtout, il est dérangé par son propre roman.
Nature du roman écrit par le narrateur : Imitateur, évident.
On invoque Swift, Ossian, Joyce, Eliot, le fameux Sweeney, condamné à souffrir et à manger du cresson pour avoir osé détruire la cloche d'un mauvais lutin lors d'une bataille.
Entre temps, les personnages discutent de tout et de rien. de l'augmentation des prix suite à la guerre (les plus révoltés sont le Lutin et la Fée), de la nature-même de la poésie (les Hommes), du son du violon, de la voix, d'un bébé de 25 ans qui va naître dans la chambre d'à côté, etc.
Les personnages ont une vie en-dehors du narrateur inventé par le narrateur (qu'ils droguent pour lui échapper).

Appréciation et importance de Swim-Two-Birds, oratio recta :
Quasiment aucun lieu n'est décrit, sauf s'il représente une forme d'irlandéité : forêt, brume, pub... les classiques. Les personnages sont - et le narrateur narré fait preuve d'une mauvaise foi évidente en les distinguant sous forme de liste - interchangeables.

Appréciation et importance de Swim-Two-Birds, oratio obliqua :
Tout n'est que jeu de digressions vers la forme la plus pure souhaitée par le narrateur, (qui n'est pas l'auteur, pas O'Nolan, donc) qui est un assemblage de toutes les possibilités littéraires à accomplir pour évoquer un monde qui ne ressemble que bien trop peu au monde pour être raconté autrement qu'en digressant. Swim-Two-Birds fait par ailleurs office de mètre-étalon dans la littérature dite Postmoderne (ce mot est une torture, mais il a eu des signifiés). Il influencera Beckett et tous les auteurs du moment Postmoderne. Et bien d'autres auteurs. Il sera révéré par Borges ou Joyce, qui le lira à la loupe pour cause de cécité galopante.

Conclusion sous forme de citation du roman susmentionné :

"Un roman satisfaisant doit être une supercherie patente, si bien que le lecteur peut régler à sa convenance le degré de sa crédulité. Il n'est pas démocratique de contraindre les personnages à être bons ou mauvais, pauvres ou riches. Chacun d'eux doit pouvoir prétendre à une vie privée, à la liberté, à un mode de vie décent : ainsi pourvus, les personnages pourront manifester leur dignité et leur contentement, et fournir un meilleur service."

Conclusion plus conventionnelle : Lisez-le, vite. Relisez-le. Moins vite. En fin de compte, peut-être que tout est à propos d'une bicyclette, et peut-être la mayonnaise est-elle un instrument.
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