AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Isidoreinthedark


« Les gens des collines » est le nouveau roman de Chris Offut, auteur notamment des très beaux romans appalachiens « Nuits Appalaches » et « Le bon frère », adoubé par ses illustres aînés, aujourd'hui disparus, Jim Harrison, James Salter et Larry Brown.

Le héros de ce nouvel opus, Mick Hardin, revient en permission dans ses collines natales du Kentucky, sur le flanc Est des Appalaches, et y constate la fin de son mariage. le choc est rude pour cet enquêteur chevronné de l'armée américaine, qui a passé de longues années sur les fronts irakiens, afghans et syriens. Sa soeur Linda, récemment nommée shérif du comté, va interrompre l'interminable cuite au bourbon que Mick semble avoir décidé de s'infliger.

Le cadavre d'une veuve quadragénaire vient d'être découvert dans les bois, et Linda craint que les gens des collines ne décident de rendre la justice par eux-mêmes. Un édile local, magnat du charbon, a en outre commencé à exercer une pression insidieuse sur l'enquête qu'elle mène en compagnie d'un adjoint brut de décoffrage. Les talents d'enquêteur et l'expérience de l'enfant prodigue pourraient lui permettre de découvrir la vérité et d'éviter un terrible déferlement de violence sur les collines.

Mick va accepter d'aider sa soeur, et mener sa propre enquête informelle, tout en tentant de reprendre contact avec son épouse. Il va pour cela dépasser le temps imparti de sa permission et cesser de répondre à ses supérieurs qui tentent en vain de le contacter. Même si l'enfant du pays en a vu d'autres, il va devoir faire face à une faune locale aussi peu amène que taiseuse, tout en affrontant les déboires liés à la fin de son mariage.

« Les gens des collines » est un roman noir, à la structure narrative classique, dont le héros tenace et désenchanté rappelle ses illustres prédécesseurs, Philip Marlow et Lew Archer, les enquêteurs fétiches respectifs de Raymond Chandler et John Ross MacDonald. La forme de compassion dont Mick Hardin fait preuve à l'égard des gens des collines évoque le regard lucide mais jamais indifférent que porte Lew Archer sur la faune de la Cité des Anges des années cinquante.

Toute l'originalité du roman tient évidemment à son environnement appalachien, cher à David Joy, à la beauté sauvage d'une nature encore préservée, à ces gens de peu qui n'ouvrent jamais leur porte sans avoir sorti leur fusil, et semblent tout droit sortis du dix-neuvième siècle. le cadre à la fois enchanteur et désespérant de l'intrigue, permet à son auteur de créer une ambiance atemporelle, dans une bourgade qui ressemble à une immense famille dysfonctionnelle de cousins éloignés, qui se connaissent depuis des décennies, pour le meilleur et pour le pire.

« - Partout ailleurs, les gens vivent un peu plus longtemps chaque année. Nous, nos vies raccourcissent. Ça arrive nulle part ailleurs dans le pays. Il y a vingt ans de ça, l'espérance de vie était plus élevée ici.
- Les collines nous tuent à petit feu. »

Les gens des collines sont au fond le véritable sujet du roman, des gens qui parlent peu mais jamais pour ne rien dire, qui n'obéissent qu'à leur propre code, et ont un rapport à la violence que nous avons depuis longtemps oublié. En situant son roman dans sa région natale, Chris Offut nous offre tout à la fois un voyage dans l'Est des Appalaches et un voyage dans le temps, et nous transporte dans une époque que l'on pensait révolue, l'époque de ces hommes durs à la tâche, qui ont construit un monde qui continue sa route sans eux.
Commenter  J’apprécie          564



Ont apprécié cette critique (47)voir plus




{* *}