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Critique de Nastie92


Deux femmes. La vieille Aliide et la jeune Zara.
Deux destins douloureux.
Deux victimes de l'Histoire. L'une du communisme, l'autre de la mafia russe.
Une rencontre fortuite... ou pas ?

Aussi méfiantes l'une que l'autre au début, nos deux héroïnes vont s'apprivoiser, vont parler, vont se confier l'une à l'autre.
Deux histoires terribles vont émerger, qui montrent que bien souvent, les femmes sont les plus grandes victimes des soubresauts de l'Histoire.
Sofi Oksanen a créé deux personnages forts à qui elle fait subir bien des tourments. À travers elles, c'est un pan de l'histoire de l'Estonie qu'elle nous raconte.
Pauvre Estonie, qui subit en 1940 une première occupation soviétique et se retrouve annexée de force à l'URSS. Puis l'occupation allemande pendant la guerre, avec l'extermination de la communauté juive, suivie d'une seconde occupation soviétique à partir de 1944.
Pauvre Estonie qui ne recouvrira son indépendance qu'en 1991, après d'innombrables victimes, des morts et des déportés. Après bien des souffrances.

Subir ? Résister ? Collaborer pour survivre ?
Chacun fait ses choix selon sa conscience et ses possibilités.
Nous qui sommes extérieurs n'avons en aucun cas le droit de juger.

Sofi Oksanen nous promène en différents lieux (Vladivostok, Berlin, Tallinn, l'Estonie occidentale) et nous fait faire des allers-retours entre différentes époques, de la fin des années trente jusqu'en 1992.
Malgré cette forme très fragmentée, le récit est limpide ; le puzzle se met en place et tout s'imbrique petit à petit, nous donnant une compréhension des personnages de plus en plus fine.
Le fond, lui, est plus que sombre. Il est rude, violent, âpre, souvent cru ; il nous bouscule. La lecture demande d'avoir le coeur bien accroché.
Le style enfin est simple, sans fioritures ; l'écriture est sèche, pour mieux mettre en valeur le contenu.

Écrit en finnois, Purge a reçu lors de sa parution de nombreux prix en Finlande, dont l'équivalent de notre Goncourt. En France, il a reçu le prix Fémina en 2010.
Le roman nous offre deux magnifiques portraits de femmes, deux écorchées vives, meurtries et attachantes, et nous emmène dans un pays peu connu en France.
Purge mérite d'être lu, mais attention, il ne faut pas être rebuté par la noirceur des personnages et de l'histoire.

La vieille Aliide fait ce constat désabusé : lorsque des temps troubles arrivent, il n'y a rien à faire, "sinon préparer ses bagages et s'attendre au pire".
Aliide et Zara, comme tant d'autres estoniens, ont dû se battre pour leur liberté.
Cette liberté pour laquelle il faut toujours lutter.
Cette liberté à laquelle il est impensable de renoncer.
Cette liberté qu'il faut placer par-dessus tout.
Cette liberté qui n'est jamais définitivement acquise et sur laquelle il faut toujours veiller jalousement.
Il ne faut pas l'oublier. Jamais. Nulle part.
En France en 2020 non plus.
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