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Critique de Gepeoh


Il paraitra totalement logique de dire que Onetti a une place à part dans l'Histoire du boom latino-américain. Logique puisque chaque écrivain a une place à part. Ce qui fait le statut de quasi-miracle de l'explosion littéraire simultanée dans une demi-douzaine de pays qui partagent une langue et, parfois, une Histoire commune.

Stoppons là tout net les conneries sur le contexte, le porqué du cómo, du comment en est-on arrivés là, d'où vient ce personnage, où est-on exactement, etc.
Ce livre est un chantier. Une vaste farce absurde, où l'on aura très peu la chance de voir ce qu'on pense être la couleur locale de l'Amérique du Sud. Tout est gris, pluvieux, sombre, pessimiste.

Larsen (ça ne s'invente pas) survit dans un chantier permanent qui, s'il existe bel et bien factuellement (chantier d'une ville fantôme dont il devient sous-directeur), est surtout celui de sa vie, des personnages infâmes qui la peuplent, des sourires mensonger, des bouches difformes que l'on voit tantôt suçant jusqu'à la sécheresse le contenu d'une calebasse à mate, tantôt fixant béatement les autres sagouins qui peuplent Santa-Maria (la grossièreté de l'espoir, comme dirait Larsen).
La grande nouvelle que nous amène ce roman, c'est que si tout est absolument idiot, insane et vulgaire, c'est que le pessimiste a pour lui la révolte. Il est mouvant. A force de côtoyer la rouille, on finit par vouloir se faire équarrir ou, au mieux, dans un futur pas trop lointain, se dégourdir les jointures.
L'optimiste, lui, dans sa grande bêtise, il lui reste la surprise (mauvaise, évidemment).

Attention. Une forme de lyrisme confinant au beau se dégage de l'oeuvre. Ce n'est pas un hymne avilissant. Pas Drieu la Rochelle, pas les Canti de Leopardi. On retrouve avec Onetti ce qui fera le sel du projet de Roberto Bolaño quelques décennies plus tard. Ou dans ses poèmes. quelques années plus tard, je n'en sais rien. Ils sont hors de prix.
A savoir qu'à force d'accumuler, touche après touche, des aplats de gris foncé et de de noir un peu partout, à force de se faire Soulages et non pas Gustavo Ortiz (je sais pas, là. J'aime bien ce qu'il fait), quand arrive du gris clair, on a tout le spectre lumineux qui apparait fugacement. C'est ce qui fait la force de la chose que vous aurez entre les mains si je vends bien la chose.
On parle de boue, de pluie, de gris, de rouille, de paperasse a n'en plus finir, de collection idiote de timbres, d'amour de façade, de paraitre, de demeurer, de décadence, et pourtant, pas de malaise, pas de vertige. Une envie d'être du côté du moins con. de celui qui sait ce qu'il ne sait pas, qui ose pleurer quand il est perdu, comme dans un Pynchon, mais qui réagit. Qui différencie la malchance du malheur.

En agissant, il conjure le mensonge. Car c'est celui-là qui confine au néant. Au désespoir total. A la déliquescence physique, mentale et morale.
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