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Après être revenu à Santa Maria – ville imaginaire du Rio de la Plata – c'est à Port-Chantier que débarque Larsen, une ville fantôme dont la prospérité semble avoir été liée à celle de la compagnie de Jérémias Pétrus, laquelle n'affiche plus, en attendant un improbable salut, qu'une activité dérisoire. Port-chantier est une ville des espoirs déçus, où la vie s'écoule, cependant, avec ses illusions et ses désirs, au milieu de mauvaises herbes et de la rouille qui ont repris le dessus. Et c'est là que Larsen, désabusé, vieillissant, marqué par l'embonpoint et les ans, sorte d'exilé sinon d'étranger, espère se refaire, en acceptant un poste de sous-directeur dans ladite compagnie, tandis que Pétrus recherche les fonds qui lui manquent. le Chantier est présenté par l'auteur lui-même comme une farce, un roman de l'absurde à l'atmosphère pourtant envoûtante, rythmée par quelques airs de tango.
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Au cours d'une carrière de 50 ans, Onetti a dépeint l'Uruguay dans des nouvelles et des romans comme un endroit marqué par la mesquinerie, l'idiotie et la misère - une province gogolienne sous les tropiques - et peuplé de personnages généralement déséquilibrés. Aussi peu flatteur soit-il, le portrait de son pays est celui dans lequel les Uruguayens se reconnaissent. Comme le disait le président Sanguinetti, résigné au refus d'Onetti de rentrer chez lui après son exil, en 1985, "Heureusement, il y a de nombreuses années, nous, les Uruguayens, sommes entrés dans ses romans, sommes devenus ses personnages et nous nous lisons en lui".
La plupart des nouvelles et romans se déroulent à Santa María, une ville fictive - vaguement imitée de Montevideo, mais incorporant des éléments d'autres endroits de la région du Río de la Plata.

Santa María est une sorte de ville fantôme hantée par tout ce qui lui manque : une histoire, de grandes familles, des rêves et des passions, une politique qui a du sens, une source viable de développement.

Cette apathie est son grand thème, et elle donne à ses histoires leur forme insolite. Plutôt que de dramatiser les événements, Onetti montre des personnes se remémorant et réfléchissant sur les non-événements de leur vie, ou, plus généralement, sur la vie des autres, en essayant de leur donner un sens et du glamour.
Comme l'observe Larsen, l'anti-héros d'Onetti , aucun des citoyens de Santa María n'a "le temps de vivre parce qu'ils regardent toujours tout le monde vivre".

Lorsque Onetti a commencé à publier dans les années 1930, la fiction en Amérique du Sud était en grande partie axée sur l'intrigue, bourrée d'actions, se déroulant dans les provinces.
Une partie de ce qui rendait ses livres si excitants pour ses contemporains était qu'il s'était détourné de ce genre de drame pour se concentrer sur la réflexion et l'humeur.
Il s'intéresse particulièrement à la psychologie des citadins aliénés, et le malaise de ses personnages frise souvent l'existentiel. "Il n'y avait plus d'expériences", raconte le narrateur à propos d'un homme âgé qui a gâché une rencontre amoureuse ratée depuis sa jeunesse.

C'est une langue foisonnante dans un monde désespérant,
tous les livres d'Onetti sont grands...

Lien : http://holophernes.over-blog..
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LE CHANTIER de JUAN CARLOS ONETTI
Larsen, personnage principal de ce roman, revient à Santa Maria, la ville référence d' ONETTI dans ses oeuvres romanesques. Plus exactement, il revient à Port Chantier, société en faillite depuis plusieurs années. Il va prendre contact avec Petrus, le patron, persuadé que le tribunal va statuer pour la reprise d'activité et que des actionnaires vont injecter 30 millions de pesos dans l'affaire. Larsen rencontre les 2 survivants de l'entreprise, Gálvez et Kunz qui survivent en vendant ce qui reste de la faillite, et Larsen se fait nommer sous directeur à 5000 pesos mensuels. Salaire virtuel bien sûr, qui s'inscrit dans une colonne comptable dont chacun sait qu'aucun peso ne sortira jamais. Et puis il y a les femmes, deux femmes, Angelica, gravement débile, mais qui croit que Larsen va l'épouser et sa domestique qui rêve de coucher avec lui. Dans cet univers glauque et poisseux, désespéré où tout n'est qu'illusion et virtualité, entre une entreprise fantomatique et des personnages désabusés, ONETTI nous fait naviguer entre concret et absurde au sein d'une vie irréelle.
Un auteur à découvrir.
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Quand on parle d'armée mexicaine on évoque des régiments avec plus de généraux que de soldats, quand on parlera de chantiers argentins il faudra désormais les imaginer avec des directeurs mais sans ouvriers.
Le héros Larsen est embauché comme sous-directeur d'un chantier à l'arrêt depuis des années, il est affublé d'un directeur technique et d'un directeur administratif qui n'ont pas plus de travail que lui et qui eux non plus ne touchent pas de paie. Mais ce petit monde travaille avec ardeur ou plutôt fait semblant avec acharnement, notant consciencieusement les montants qui leur seront surement versés un jour à la reprise du chantier. En attendant comme il faut vivre les subordonnés de Larsen vendent sous le manteau ce qu'il reste de ferrailles rouillées.
Larsen cherche aussi mollement l'amour auprès de la fille du propriétaire du chantier dont la santé mentale est fragile et en tournant autour de la compagne d'un de ses employés, sa quête sera aussi efficace que son labeur au chantier.
Larsen croise du monde, les personnages parlent, ils semblent échanger mais chacun reste dans son univers fermé aux autres, ce ne sont que des monologues partagés.
On l'aura compris il s'agit d'une parabole sur la vie humaine, passer son temps à travailler même pour un salaire est ce moins absurde que de faire semblant ? Comme Larsen nous sommes tous dans l'attente de quelque chose qui ne viendra pas ou trop tard. Il ne se sépare pas d'un révolver, la tentation du suicide n'est jamais loin, c'est la porte de sortie de chacun mais il est difficile de quitter son chemin solitaire et tout tracé.

Le problème c'est que l'on s'ennuie ferme tout au long de ce roman de l'échec qui n'aurait dû être qu'une nouvelle. Une fois la métaphore éventée il ne reste plus grand-chose si ce n'est attendre la fin, après tout, la vie aussi est fastidieuse mais dans cet esprit il vaut mieux relire le désert des tartares.
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Il paraitra totalement logique de dire que Onetti a une place à part dans l'Histoire du boom latino-américain. Logique puisque chaque écrivain a une place à part. Ce qui fait le statut de quasi-miracle de l'explosion littéraire simultanée dans une demi-douzaine de pays qui partagent une langue et, parfois, une Histoire commune.

Stoppons là tout net les conneries sur le contexte, le porqué du cómo, du comment en est-on arrivés là, d'où vient ce personnage, où est-on exactement, etc.
Ce livre est un chantier. Une vaste farce absurde, où l'on aura très peu la chance de voir ce qu'on pense être la couleur locale de l'Amérique du Sud. Tout est gris, pluvieux, sombre, pessimiste.

Larsen (ça ne s'invente pas) survit dans un chantier permanent qui, s'il existe bel et bien factuellement (chantier d'une ville fantôme dont il devient sous-directeur), est surtout celui de sa vie, des personnages infâmes qui la peuplent, des sourires mensonger, des bouches difformes que l'on voit tantôt suçant jusqu'à la sécheresse le contenu d'une calebasse à mate, tantôt fixant béatement les autres sagouins qui peuplent Santa-Maria (la grossièreté de l'espoir, comme dirait Larsen).
La grande nouvelle que nous amène ce roman, c'est que si tout est absolument idiot, insane et vulgaire, c'est que le pessimiste a pour lui la révolte. Il est mouvant. A force de côtoyer la rouille, on finit par vouloir se faire équarrir ou, au mieux, dans un futur pas trop lointain, se dégourdir les jointures.
L'optimiste, lui, dans sa grande bêtise, il lui reste la surprise (mauvaise, évidemment).

Attention. Une forme de lyrisme confinant au beau se dégage de l'oeuvre. Ce n'est pas un hymne avilissant. Pas Drieu la Rochelle, pas les Canti de Leopardi. On retrouve avec Onetti ce qui fera le sel du projet de Roberto Bolaño quelques décennies plus tard. Ou dans ses poèmes. quelques années plus tard, je n'en sais rien. Ils sont hors de prix.
A savoir qu'à force d'accumuler, touche après touche, des aplats de gris foncé et de de noir un peu partout, à force de se faire Soulages et non pas Gustavo Ortiz (je sais pas, là. J'aime bien ce qu'il fait), quand arrive du gris clair, on a tout le spectre lumineux qui apparait fugacement. C'est ce qui fait la force de la chose que vous aurez entre les mains si je vends bien la chose.
On parle de boue, de pluie, de gris, de rouille, de paperasse a n'en plus finir, de collection idiote de timbres, d'amour de façade, de paraitre, de demeurer, de décadence, et pourtant, pas de malaise, pas de vertige. Une envie d'être du côté du moins con. de celui qui sait ce qu'il ne sait pas, qui ose pleurer quand il est perdu, comme dans un Pynchon, mais qui réagit. Qui différencie la malchance du malheur.

En agissant, il conjure le mensonge. Car c'est celui-là qui confine au néant. Au désespoir total. A la déliquescence physique, mentale et morale.
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Fantôme à soi-même, étranger à un monde d'une onirique dilapidation, comme flottant entre deux sentiments, trois adjectifs inaptes à saisir un état d'âme oscillant entre haine, incompréhension et dégoût, Juan Carlos Onetti plonge le lecteur dans un univers irrésolu, irritant, inquiétant. le chantier, à travers les déambulations de Larsen dans la ville imaginaire de Santa-Maria, dépeint des êtres en quête d'un visage d'eux-mêmes, d'une certaine sincérité dans la complexité de la dissimulation qui nous tient lieu, tous, de rapport au monde.
Lien : https://viduite.wordpress.co..
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Il fait chaud et moite dans le chantier. Santa Maria, en Amérique du Sud. Dans le port, dominé par le chantier, les activités se meurent. Seuls Galvez et Kunz y demeurent quand les rejoint Larsen, qui devient sous-directeur du chantier. Les trois hommes continuent de travailler, maintenant l'illusion de la réalité de cet endroit, plein de boue et d'eau, où ils s'embourbent pourtant. Larsen se permet même de courtiser la fille de Jeremiah Petrus, patron du chantier. La fille, Angelica, est débile, mais le père est riche. Larsen peut aussi maintenir ses habitudes héritées d'une bonne éducation mais, là aussi, c'est une illusion.
Galvez, lui, détient un papier prouvant les agissements délictueux de Petrus. Ce papier est comme une vengeance de la vie gâchée que Galvez, pourtant, n'utilise jamais.
Ce lieu sans vie emprisonne ceux qui y posent le pied. L'avenir s'y résume au lendemain, ou à la soirée, souvent passée chez Galvez. Dans ce désespoir constant, les hommes finissent par détruire ce qu'ils veulent sauver et, par là-même, se sabotent eux-mêmes.
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Un chantier qui n'en finira jamais, c'est le triste constat d'une société sans but, sans objectif précis, sans axe de réussite. le détournement du chantier se veut l'allégorie du silence porté par la dictature et la répression. Des vies enchaînées à leur sort politique sans issue possible, sans procédés pour mettre fin à cet infini chantier.
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