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Critique de christinebeausson


Quelques recherches sur internet pour se souvenir d'un poète oublié par l'histoire, José Maria Heredia (1) … un bref résumé de sa vie, de ses convictions et de son oeuvre avant de se lancer dans ce roman dédié au père de l'auteur « maître maçon, grade 33 » et à tous les francs-maçons cubain (2) … le grade 33 étant le plus haut grade de la hiérarchie maçonnique.

Leonardo Padura nous plonge dans l'Histoire de Cuba …
Encore dépendante de la couronne espagnole, où règne le pouvoir de dignitaires, maîtres esclavagistes, avec José Maria Heredia, le poète qui se réclamait cubain …
Puis avec son fils Jose de Jesus Heredia, qui espérait négocier contre espèces sonnantes et trébuchantes de quoi survivre dans une société gangrenée où la fièvre du pouvoir, les désirs de gloire et la soif de transcendance ont engendré la trahison des idéaux et des causes les plus justes …
Et le Cuba d'aujourd'hui avec Fernando Terry, un étudiant poète à ces heures, écrivant une thèse sur le poète.

Leonardo Padura nous décrit la franc-maçonnerie cubaine au cours des derniers siècles …
Les trois intervenants nous permettent de côtoyer ce monde parallèle avec son cérémonial, ses rites et ses règles et ainsi de satisfaire notre curiosité sur cette institution qui cultive le mystère.

Nous faisons le tour de nos anciennes aspirations avec … le rêve des « Merles Moqueurs » qui est passé sous « le rouleau compresseur qui s'appelle la vie réelle ».
Nous n'oublions pas la fâcheuse tendance qu'a le pouvoir de transformer les meneurs de noble cause en des dictateurs attachés aux rôles qu'ils se sont attribués … et s'accrochant au piédestal sur lequel ils se sont hissés.
Nous frôlons l'histoire de la création de l'identité d'un peuple colonisé qui cherche à se construire sa propre identité.

C'est passionnant mais la lecture du roman est ardue, le mélange des trois narrations s'amuse à nous perdre dans le cours de l'Histoire, les espaces séparant les différents épisodes sont rétrécis.
C'est une vraie leçon d'Histoire mais les informations reçues nécessitent une grande concentration … on en sort un peu plus instruit … on a pris beaucoup de plaisir de traîner dans l'atmosphère de la Havane … ses odeurs, ses bruits, sa décrépitude et son éternelle joie de vivre.

(1)
José María Heredia est un poète cubain, né à Santiago de Cuba en 1803 et décédé à Toluca (Mexique) en 1839.
C'était le cousin germain de José Maria de Heredia lequel naîtra quelques années après sa mort dans une plantation de café près de Santiago...
José María Heredia y Campuzano était aussi poète, mais alors que son cousin vivant en France fut connu pour un unique recueil :"Les trophées", il ecrivit une oeuvre poetique et patriotique plus diverse..
La branche familiale des Heredia provient de Saint Domingue (Haïti actuelle), à cette époque l'île était espagnole donc tout naturellement José Maria Heredia y Campuzano l'était aussi, mais il le refusa, s'estimant Cubain et le revendiquant dans ses actes politiques jusqu'à devenir un porte drapeau de l'Indépendantisme. Ce qui lui valut l'exil.

(2)
Créée officiellement en 1859, la Grande loge cubaine a vécu une cohabitation délicate avec le colonisateur espagnol avant d'entrer dans une période faste après l'indépendance, au tournant du XXe siècle. Elle a compté jusqu'à plus de 30.000 adeptes dans les années 1950.
Mais peu après sa prise du pouvoir, le régime castriste s'est attaqué à toutes les croyances et, en 1961, a nationalisé la plupart de les propriétés de la Grande loge, dont une partie de son siège central, un bâtiment de 11 étages sis en plein centre de la Havane.
Etre franc-maçon dans les années 1960 "était un péché", se remémore Juan Antonio Velez, un métis de 90 ans, dont 55 passés au sein de la loge havanaise.
L'historien Eduardo Torres-Cuevas, directeur de la Bibliothèque nationale et auteur d'un ouvrage sur la maçonnerie cubaine, explique que contrairement à d'autres pays Cuba n'a pas interdit les pratiques des croyants, francs-maçons ou "abakuas" (confrérie secrète afro-cubaine).
Mais les francs-maçons étaient considérés comme suspects et donc exclus des arcanes de l'Etat, alors employeur quasi-exclusif des Cubains, explique-t-il.
"Beaucoup de frères ont dû abandonner la franc-maçonnerie, ils étaient angoissés car ils ne pouvaient pas travailler", confirme M. Velez en faisant pivoter sa chevalière franc-maçonnique en or sur son doigt.
Refusé de toutes parts, M. Velez raconte avoir été obligé de travailler dans une plantation de café avant de pouvoir, grâce à la médiation d'un ami franc-maçon, se reconvertir comme menuisier dans un petit hôtel au début des années 1970.
De nombreux intellectuels et membres de la hiérarchie franc-maçonne quittent alors le pays ou l'obédience, faisant passer les effectifs de la loge de 34.000 membres avant la révolution à 19.500 à la fin des années 1980.
En 1991, la tempête s'apaise finalement et l'Etat normalise sa relation avec les francs-maçons, les catholiques et les protestants, ainsi qu'avec les adeptes des rites afro-cubains, majoritaires à Cuba.
Une détente qui provoque un nouveau boom des adhésions à la Grande loge. M. Cuesta raconte même avoir assisté à l'adhésion de militaires et militants "durs" du Parti communiste cubain (PCC).
Aujourd'hui, sont recensés 27.800 "frères", généralement des hommes ayant dépassé les 40 ans, dans 321 loges à travers le pays.
Toujours tenues à l'écart, les femmes se consolent depuis 1936 avec une loge "para-maçonnique" dénommée "Les filles de l'Acacia".
Aux antipodes du culte du secret souvent constaté dans les obédiences occidentales, l'appartenance à la franc-maçonnerie s'assume au grand jour sur l'île caribéenne.
Accordée comme ailleurs par cooptation, elle confère une certaine valeur éthique et morale à ses membres, mais ne garantit aucunement la réussite sociale.
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