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Critique de nilebeh


Deuxième livre, après « L'enfant fossile », dans la série « récits d'objets » initiée par le Musée des Confluences de Lyon.

Cette fois, l'«  objet » est un châle, doux et mordoré, frangé sur les quatre côtés et venu d'Italie, probablement fin XIX ème. Sa particularité est d'être fait de « soie de mer  tricotée », une matière si rare qu'il n'existe qu'une soixantaine d'articles (gants, bonnets, étoles) qui en soient constitués dans le monde entier. Destinés à des gens riches, ecclésiastiques ou nobles, il figurent aujourd'hui dans les musées comme celui de Lyon, sagement rangés dans des tubes cylindriques quand il s'agit de ce châle, à l'abri de la lumière, des regards et du moindre contact avec les mains.

C'est la narratrice qui a donné le châle au musée et qui raconte aujourd'hui tout une vie dont il a été témoin. Et d'abord elle raconte avec tous les détails la fabrication de ce tissu si rare et étonnant à partir de fils de Pinna nobilis, ce mollusque bivalve qu'on trouve dans la Méditerranée.

« Il faut pêcher mille grands nacres, les sortir de l'ombre, pour obtenir deux cent cinquante grammes de fil de soie de mer, deux cent cinquante grammes seulement de lumière avec un millier de gros coquillages .»

Ce châle fait partie de l'héritage de la famille, caché dans des malles avec tous les objets de valeur, retourné à l'ombre par la volonté du père de la narratrice dans la maison où il « autorise » ses deux soeurs à vivre dans la gêne avec pour tout moyen de survivre de vendre les objets à des antiquaires. Tous, sauf le châle, ornement féminin qui pour cette raison doit rester entre les mains des femmes, les deux soeurs, la douce Bice et la rebelle Nella. Deux portraits de femmes, l'une soumise au moins en apparence, l'autre qui se coupe les cheveux, refuse le mariage et porte des pantalons pour résister à son machiste de frère, politicien fasciste aux grandes heures mussoliniennes.

Le châle, doux et résistant, précieux et en apparence malléable, représente assez bien la condition féminine en ces temps où une femme n'avait à peu près aucun droit personnel, placées sous le contrôle des pères, des frères, des maris.

Un livre bien écrit, avec délicatesse et poésie, sans concession toutefois ni féminisme exacerbé. Une lecture agréable et intéressante.

On attend avec intérêt les prochains »objets »du musée qui donneront lieu à de nouveaux textes.
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