AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Lamifranz


« le Temps des amours » (1977) est le quatrième tome des souvenirs d'enfance de Marcel Pagnol (après « La Gloire de mon père », « le Château de ma mère » et « le Temps des secrets ») Ce livre, paru après la mort de l'auteur (1974) fut composé par l'éditeur à partir des notes laissées par Marcel Pagnol et de ce fait ne présente pas le même « liant » que les tomes précédents. Mais, si la composition de l'ouvrage peut paraître un peu bancale, il n'en est rien concernant l'esprit qui l'anime, ni la nostalgie et la douceur dans lesquelles baignaient les trois premiers tomes, ni le ton familier plein de bonhomie, d'humour, de complicité avec le lecteur et de profonde tendresse qui est la marque de Marcel Pagnol.
Les dix textes proposés concernent pour la plupart des souvenirs de lycée, ainsi que des épisodes de vacances aux Bellons. Inséré dans l'ensemble, un long texte consacré à la Peste à Marseille en 1720, rappelle l'intérêt de l'auteur pour l'Histoire (on lui doit également une étude sur le Masque de fer ; parue en 1965). On retrouve l'humour et la truculence des volumes précédents, surtout à travers le personnage de Lagneau, son ineffable condisciple. Une belle ode à l'amitié, à l'attention de son ami Yves, et toujours la belle poésie « virgilienne » de ses balades dans les collines (Marcel Pagnol, rappelons-le, avait présenté en 1958 une traduction remarquée des « Bucoliques » dudit Virgile)
Le titre ne correspond guère au contenu du livre. D'amour, il n'en est question qu'une fois, dans le dernier chapitre, et il ne concerne pas Marcel, mais Lagneau. A la façon de Cyrano, il écrit pour son ami des lettres enflammées que celui-ci fera passer pour siennes. Un chapitre à la fois drôle et émouvant, où se manifestent les contrastes de l'adolescence : innocence et maturité, amour et amitié difficilement contrôlables, apprentissage de la sagesse…
Un autre thème parcourt en filigrane ce recueil : la vocation littéraire de Marcel. Elle ne fait pas de doute. Et lui, le premier n'en a jamais douté. Dans le chapitre « Je suis poète », il nous explique avec gourmandise cet amour de la langue et des mots qu'il a toujours eu (il y fait une première allusion dans « La Gloire de mon père » : « Ce que j'écoutais, ce que je guettais, c'était les mots ; car j'avais la passion des mots ; en secret, sur un petit carnet, j'en faisais une collection, comme d'autres font pour les timbres »). Petit clin d'oeil de Marcel Pagnol à lui-même : après avoir lu et expliqué à ses camarades son premier poème (« le grillon ») un de ceux-ci conclut gravement : « Moi, je te le dis sincèrement, si tu ne l'as pas copié, je suis sûr que tu seras de l'Académie Française ! » Ce que le jeune Marcel n'eut aucune difficulté à prendre pour argent comptant : « Je fus persuadé qu'il ne se trompait pas : la modestie ne vient qu'avec l'âge, quand elle vient ».
Ah ! Monsieur Pagnol, vous avez gagné le droit de n'être pas modeste. Oui, sans aucun doute, vous étiez poète, sans aucun doute vous étiez un grand auteur de théâtre et un grand écrivain. Et sans aucun doute vous étiez un grand metteur en scène de cinéma. Pour tous ces dons vous avez acquis l'admiration de millions de lecteurs et de spectateurs. Mais ce qui est plus important, c'est que pour beaucoup d'entre eux, je dirais même la quasi-totalité, vous avez acquis la reconnaissance et l'amour. Beaucoup d'écrivains sont des écrivains qu'on lit. Vous, monsieur Pagnol, vous êtes un écrivain qu'on lit et qu'on relit, mais surtout vous êtes un écrivain qu'on aime. Et pour l'éternité. Bien peu de vos confrères peuvent mériter ce titre.
Commenter  J’apprécie          120



Ont apprécié cette critique (10)voir plus




{* *}