AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Polomarco


Le passage de la Russie tsariste à la Russie soviétique, sur fond d'histoire d'amour.
À moins que ce ne soit l'inverse : l'histoire d'un amour fou, sur fond de révolution russe.
Peu importe, le Docteur Jivago est une histoire de tourmentes.
Celle de l'Histoire, d'abord : l'insurrection de décembre 1905 réprimée dans le sang, la première guerre mondiale, la révolution bolchevique de 1917.
Celle de la nature, aussi : les hivers qui semblent interminables et le froid sibérien, qui nous valent de magnifiques descriptions de la neige.
Celle de l'amour, surtout : si les événements terribles cités ci-dessus bouleversent les rapports sociaux, ils soumettent aussi les liens conjugaux à rude épreuve. Ah, il ne faisait pas bon être né à la toute fin du dix-neuvième siècle ! À peine marié, Pavel Antipov se porte volontaire pour intégrer l'Armée, fuyant un mariage avec Lara qui ne le rend pas heureux. Continuant à l'aimer d'un amour "pur et fort", et sans nouvelles de lui, Lara obtient son diplôme d'infirmière et se fait affecter à Méliouzéiev, dans la zone de combat d'où Pavel lui a écrit sa dernière lettre. de son côté, Iouri Jivago, jeune médecin marié à Tonia dont il est fou amoureux, et poète à ses heures perdues, est envoyé au front, au même endroit, et il retrouve Lara, qu'il avait croisée pendant ses études. Ainsi se présente l'intrigue amoureuse qui va, crescendo, tenir le lecteur en haleine : "C'est ainsi que t'ont jetée vers moi les tempêtes de la vie, ô ma fierté" déclarera plus tard Jivago à Lara (cf. Retour à Varykino - XIII).
Je ne résumerai pas ici cette oeuvre superbe, récit d'un amour à la fois fou et impossible. Je dirai seulement qu'il s'agit d'une grande fresque montrant les vicissitudes de l'amour conjugal, sa puissance et aussi sa fragilité. Jusqu'où va la fidélité ? Où commence l'infidélité ? À Iouri qui lui demande : "Tu veux savoir si dans nos bonnes relations il ne s'est pas glissé quelque chose de plus personnel ?", Lara, prise de vertige, répond : "Seigneur, comme nous sommes misérables ! Qu'allons-nous devenir ? Que devons-nous faire ?" (cf. En face de la maison aux statues - XII et XIV).
Le roman est long. Les cent premières pages sont ardues : elles présentent les très nombreux personnages ; il est donc utile de commencer la lecture de ce livre avec, en main, une feuille de papier et un crayon pour écrire leur nom et les liens qui existent entre eux. Parfois, le nom d'un personnage occupe toute la largeur d'une ligne : le prénom, la mention de la filiation (Nikolaï Nikolaïevitch : Nicolas, fils de Nicolas), puis le nom. L'usage d'un surnom est fréquent : Lara, pour Larissa, par exemple. le récit s'étire sur plus de trois décennies et permet aux protagonistes de se rencontrer, de se perdre de vue et de se croiser à nouveau, à l'image de la vie. La vie qui fait s'entremêler les destins, comme ceux des deux officiers combattant ensemble en 1917, Pavel et Galioulline, qui se retrouvent dans les camps opposés de la Révolution, l'un rouge, l'autre blanc.
Roman d'aventure et d'amour, le Docteur Jivago ne se limite pas à cela. Comme dans les grands classiques de la littérature russe, il y a ce questionnement religieux sur le bien et le mal, sur l'existence de Dieu et sur la vie éternelle : le livre est ainsi émaillé de références, non seulement à Dostoïevski, mais aussi à Tolstoï, Pouchkine, etc.
Enfin, s'il porte le nom de son héros masculin, l'ouvrage est illuminé par la grande figure de Lara, à la beauté "étourdissante" et "merveilleuse", qui a été magnifiée par la musique de Maurice Jarre (la fameuse "Chanson de Lara") composée en 1966 pour le film de David Lean.
Commenter  J’apprécie          144



Ont apprécié cette critique (13)voir plus




{* *}