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Critique de Fleitour


Le dernier livre d'Ernest Pépin," l'Homme-au-Bâton", revendique sa créolité et puise dans la culture de la Guadeloupe ce qui compose le créole, sa verve, ses couleurs, ses impertinences, avec des accents emprunts de jean Giono, "L'eau buvait les reflets sans pour autant révéler le dessous de ses profondeurs page 85.


"l'Homme-au-Bâton" a obtenu le prix des Caraïbes en 1994 pour ses qualités littéraires et sa respiration créole.
Pour pénétrer l'univers d'Ernest Pépin il faut éviter d'utiliser un maître étalon enseigné à l'École normale supérieure, le meilleur étalon pour lire l'homme-au-bâton est sans doute d'aller à l'école de la rue.
Ce livre est insolite et déstabilisant pour un préfet venu de la métropole appelé à affronter "l'Homme-au-Bâton" , dans une constellation si complexe et si délicate que ce brave Jean Paul finira par trouver non le bonheur mais le bord de l'abîme.
Page 176 Ernest souligne, "une terreur sans nom, sans papa ni maman s'abattit sur l'île".
Habité par Marie-Ange, et tutoyant même parfois la paradis, le Préfet tel un parachutiste, touche terre souvent et violemment et plus encore englué dans une commission où les revenants sont mieux représentés que ses concitoyens.


Mais qui est-il, mais où est -il "l'Homme-au-Bâton" ? semble clamer le seul fonctionnaire actif à le débusquer, Rigobert, qui fait de ces questions un problème vital, pour lui et pour son amour propre.

Ce livre par certains côtés apparaît aussi comme une description pointue documentée fouillée de ce qui fait la géographie si particulière de la Guadeloupe. Car sur cette île on y trouve une telle diversité de paysages, de couleurs que chacun peut y trouver son carré de paradis, peut ou pas se laisser griser par les idées obscures, et repousser des conseils porteurs de bons présages.


"Dans ce pays où le soleil fond le bitume ou la pluie arrive à grand galop sans crier gare, où les arbres allaitent des esprits, où les hommes revêtent des peaux de chien où les chiens ont peur de la nuit où les frères et soeurs ont des couleurs d'arc-en-ciel, où les quatre chemins donnent à manger au diable où Dieu oublie les nègres ou le Rhum saoule les mares, où tout peut arriver. Et il arriva que les gendarmes du lamantin emprisonnent un arbre un goyavier."page 180.


En Guadeloupe tout est démesuré. Cette démesure se perçoit à la façon dont les rumeurs se propagent à une vitesse inimaginable et les contres rumeurs filent à des vitesses encore plus démentes. Alors quand l'idée que des culottes invisibles pouvaient protéger les femmes de l'ardeur des hommes, et de "l'Homme-au-Bâton" , le prix de cette chose invisible pris des dimensions ubuesques. Mais au moment où une contre vérité est venue comme un zombie faire éclater la supercherie, alors "une vieille couleur de cendre colora les visages des plus fanfarons".


Lorsqu'une énigme devient le sujet incontournable entre la petite Lisa et ses parents, l'Homme-au-Bâtonl'homme-au-Baton vient aux lèvres de Lisa pour expliquer la grossesse, l'alibi va devenir le meilleur argument de bien des choses extraordinaires qui vont alors éclater sur la Guadeloupe.

Ce live est un patchwork d'aventures qui se nouent et se dénouent selon la magie d'Ernest, qui nous offre le sésame pour découvrir l'étrange diversité de ces îliens façonnés par le passé si tourmenté et qui déstabilise ceux qui arrivent de métropole.


Pour cet auteur peu connu du grand public, c'est l'occasion de nous écrire en créole, et dans une langue riche soyeuse, charnelle, les joies de l'amour et de la fraternité.
Souvent très drôle, aux rumeurs déjantées, il vous restera au terme de ce récit un goût étrange de plats épicés, un sillage de paroles, où l'ironie est un remède à la peur.
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