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Critique de Eve-Yeshe


Magique, brillantissime, machiavélique…

L'auteur nous montre de façon magistrale comment la révolte contre l'injustice et les inégalités entraine l'anarchisme, en nous expliquant la notion de fiction sociale., que constitue la société dans laquelle on vie.

« de ce que vous avez dit, je conclus que vous entendez par anarchisme (et ce serait là une bonne définition) la révolte contre toutes les conventions, toutes les formules sociales, en même temps que le désir et la volonté de les abolir totalement. » P 19

Au passage Fernando Pessoa règle ses comptes avec la notion de Dieu, religion, devoir altruisme car ce ne sont que des tentatives d'explications pour contenir les gens. Il est également féroce avec la révolution russe, toute récente, qu'il accuse de remplacer une dictature par une autre.

« Et vous verrez ce qui sortira de la révolution russe… Quelque chose qui va retarder de plusieurs dizaines d'années la naissance de la société libre… D'ailleurs que peut-on attendre d'un peuple d'analphabètes et de mystiques ? » P 27

Notre banquier explique son cheminement sur la nécessité de devenir soi-même, donc forcément égoïste pour arriver à la véritable anarchie qui ne peut être qu'individuelle, car sitôt que les hommes forment un groupe, certains veulent accaparer le pouvoir. A une tyrannie succèdera forcément une autre.

Il ne s'agit pas de détruire ce qui existe. L'anarchie ne peut donc être qu'une démarche individuelle, en tentant de changer la société, chacun dans son domaine, fût-il la bourgeoisie ou l'argent.

« Si la société anarchique, pour une raison quelconque, n'est pas réalisable, alors il faut bien qu'existe la société la plus naturelle après celle-là, c'est-à-dire la société bourgeoise. » P 48

Notre banquier s'en donne à coeur joie, étripant au passage la propagande et son inefficacité ainsi que les anarchistes qui s'en prennent aux biens matériels et vont ainsi à l'encontre de leur objectif initial, car peuvent être arrêtés, jugés…

Il n'hésite pas à être provocateur, poussant le raisonnement à l'extrême, décortiquant chaque idée, pour la pousser dans ses moindres retranchements, ne reculant devant aucune affirmation péremptoire, prenant le risque de choquer le lecteur, tout en l'entraînant dans sa logique.

Il ne faut jamais perdre de vue, au cours de cette lecture, que Fernando Pessoa a publié ce texte retouché à maintes reprises, en 1922, ce qui était sacrément culotté à l'époque ! il est brillant, manie l'ironie avec dextérité et dénonce l'hypocrisie de la société de façon magistrale.

Ce livre mérite amplement le qualificatif de brûlot explosif, détonant et jubilatoire, que lui attribue Françoise Laye dans sa préface. J'ai dévoré ce livre, alors qu'il ne me semblait pas si simple d'accès au départ car je voulais absolument savoir où il allait m'entraîner et si j'allais le suivre dans son raisonnement ; c'est un véritable uppercut, il est difficile d'enchaîner tout de suite sur un autre roman ou essai.

Bravo Mr Pessoa, vous m'avez convaincue ! jusqu'à présent, je n'avais lu que quelques-uns de poèmes, par ci par là, mais il est temps que j'explore davantage votre oeuvre avec, pour commencer, « le Livre de l'Intranquillité «
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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