Elles burent leur thé chaud, réconfortant, et parlèrent non plus de tante Louise, mais d'Oxford, où Miss Catto avait passé son enfance.
- C'est un endroit merveilleux pour un enfant que cette ville de tours et de clochers, pleine de jeunesse et de savoir infini. Nous avions une vieille maison à Banbury Road, avec un jardin clos et un mûrier.
Il était bon d'être à l'abri. La cuisine était chaude et, sans la présence d'Edna et de Hilda, silencieuse. On n'entendait que le tic-tac de la vieille pendule et le poêle qui ronflait.
Molly Dunbar et Louise Forrester, sa belle-soeur, étaient assises de chaque côté de la cheminée. Une table pliante, dressée entre elles et couverte d'un napperon brodé, était garnie d'un beau service de porcelaine, avec des assiettes contenant des sandwiches, un gâteau au citron glacé, des scones chauds à la crème et à la confiture de fraises, des sablés et des biscuits au chocolat.
L'horizon se perdait dans l'obscurité, mais au-delà l'océan agité continuait de se soulever à l'infini.
Les maisons des autres étaient toujours fascinantes. Quand on franchissait une porte pour la première fois, on sentait l'atmosphère qui y régnait et l'on devinait toujours quelque chose de la personnalité de ceux qui y vivaient.
Le dimanche matin, nous devons aller à l'église à pied, deux par deux, ce qui est barbant. La messe est tout aussi barbante : on s'agenouille beaucoup.C'est très solennel. Il y a même de l'encens et une fille est tombée dans les pommes.
Au-delà il y avait les étoiles, l'univers, l'espace. Elle n'était rien, une tête d'épingle dans l'infini, et elle fut saisie d'une frayeur terrible. Qui suis-je? Où suis-je? où vais-je et que se passera-t-il quand j'y parviendrai?
Il quitta la chambre de Diana en refermant la porte derrière lui et hésita un instant : il aurait dû se mettre en quête de Mary Millyway, mais il ne savait pas où la chercher. Puis il entendit de la musique et il oublia complètement Mary Millyway. Cela venait de l'extrémité de l'aile des invités. La chambre de Judith. Elle était là. Elle était rentrée de Porthkerris. Défaisant sans doute ses bagages. Et pendant ce temps, elle avait mis un disque sur son gramophone, pour lui tenir compagnie.
- Si... si tu veux aller chez Biddy... tu le peux, tu sais. J'en parlerai à Louise. Je veux que tu sois heureuse.
- Moi aussi, mais ce n'est pas toujours aussi simple.
- Il faut que tu fasses tout pour cela.
- Toi aussi. Ne te mets pas dans un état pareil parce que tu vas à Singapour. Tu t'y plaira probablement. C'est comme quand on va à une soirée. Celles que l'on redoute le plus sont souvent les plus drôles.
Il faisait si froid qu'en s'éveillant peu à peu Judith eut l'impression que son nez était une entité séparée, qui avait gelé sur son visage.