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Critique de Sachenka


Vitangelo Moscarda (Gengé, pour sa femme Dida) est un individu assez bien nanti mais plutôt ordinaire, peut-être même un peu insignifiant (en tous cas, rien à voir avec son illustre père) jusqu'au jour où sa femme lui lance une remarque innocente sur son nez. Il n'y avait jamais porté attention, à son nez, il le jugeait dans la norme. Ce fait anodin change la perception qu'il a de lui-même. Et si les autres trouvent son nez ridicule, ils risquent de trouver aussi ridicules lui-même et ses idées. le grand auteur italien Luigi Pirandello jette les bases d'une prémisse terrifiante mais très vraie, dont l'exploration est fort intéressante : à savoir que la réalité n'est jamais telle qu'on la croit, qu'elle change selon les perceptions des individus.

Cette révélation change complètement de Moscardo. Et si les Autres avaient tout faux depuis si longtemps ? Et Sebastian Quantorzo et Stefano Firbo, les amis et fidèles conseillers de son défunt père, qui administrent son empire commercial en son nom, pensent-ils la même chose ? le jeune homme commence à prendre conscience que la réalité n'est pas objective. Et, quand on y pense, ça a du sens.

Donc, Moscarda tient à tout prix à montrer à tous son vrai « moi ». Pour y arriver, il commet des actes qui paraissent étranges à ses proches pour les forcer à le voir tel qu'il est vraiment et non pas comme ils le perçoivent. Par exemple, il expulse un de ses locataires, Marco di Dio, d'un de ses logis minables pour ensuite lui offrir une belle maison. Un tel don étonne Quantorzo et Firbo qui, au lieu de chercher à comprendre, supposent que le narrateur perd la raison et dilapide la fortune dont ils ont la responsabilité…

Conséquemment, ses proches organisent une rencontre d'urgence pour tirer tout ça au clair, seulement Vitangelo, Dida et Quantorzo. Mais était-ce tout ?

« Car ils avaient la conviction que dans ce salon nous étions trois, et non neuf. Ou plutôt huit, étant donné que moi, - pour moi-même – je ne comptais plus désormais. À savoir :
1. Dida, telle qu'elle était pour elle-même.
2. Dida, telle qu'elle était pour moi.
3. Dida, telle qu'elle était pour Quantorzo.
4. Quantorzo, tel qu'il était pour lui-même.
5. Quantorzo, tel qu'il était pour Dida.
6. Quantorzo, tel qu'il était pour moi.
7. le Gengé chéri de ma femme Dida.
8. le cher Vitangelo de Quantorzo. »

Cette multiplication des êtres devient un concept intérssant sous la plume de Luigi Pirandello. Et effectivement, nous sommes autant d'individus différents selon les gens qui croisent notre chemin. Et ce qu'il est pour un individu ne sera plus pareil s'il rencontre le même individu ultérieurement. La réalité est changeante et, conséquemment, multiple. En d'autres mots, l'homme n'est pas un, il est multiple. D'où la signification du titre : « Un, personne, cent mille »

Malheureusement, les autres ne semblent pas en avoir conscience (et ils ne le désirent pas), ils concoivent le monde uniquement de leur perspective. Et cette tentative du narrateur d'essayer de le leur faire avaler ne mène nulle part. En fait, il se rend compte que, pour eux, il n'est personne.

Bref, la première moitié est intéressante. La pensée de Pirandello va plus loin mais, hélas, plus il a développé son idée, plus il m'a perdu.

Incidemment, tout s'étire en longueur dans la seconde. le narrateur fait ses expériences, essaie de contrecarrer les manigances de ses proches, avec plus ou moins de succès. Je commençais à me lasser un peu et le dénouement est arrivé juste à point. Il n'est pas mauvais mais j'avais espéré quelque chose de plus enlevant. D'un autre côté, pouvait-il être différent ? Pas vraiment. Dans tous les cas, rendu à ce point j'avais seulement hâte que le roman se termine.
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