AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de The_Noir


Sylvia Plath nous offre une poésie très concrète, d'une intensité presque cruelle; les mots nous compriment l'estomac, nous déchirent légèrement les peaux flasques du confort… en effet les métaphores ont qqch de tactile sinon de clinique:
"Comme une infirmière muette et sans expression, la lune
Pose une main sur mon front."

Héritière lointaine du symbolisme et pourquoi pas d'une certaine forme noble du gothique anglais, Plath nous déploie son art de la description chirurgicale d'un environnement aux accents inquiétants. Les décors froids hantés par les statues antiques et une nature qui s'immobilise renforcent une certaine torpeur dont la poétesse ne s'éveille que pour assumer l'effroi que lui procure son existence.
"Les miroirs tuent et parlent, ce sont des chambres d'épouvante"

Les poèmes dérivent souvent d'une contemplation de la nature ou une admiration toute maternelle des enfants au repos (émotion pleinement vécue par la jeune maman Sylvia) vers un désespoir quasi consenti. Ainsi cette métaphore pour l'agneau pascal nous résume bien le ressenti de Sylvia Plath mis en vers:
"Ô bel enfant d'or que le monde tue et mange."

La douleur exprimée, toute psychique a pu me rappeler certains vers de Nerval. le parallèle avec Gérard Labrunie est facile mais s'impose quand on sait que l'atrocité du mal d'être, de l'abandon, de l'implacable venue de la vieillesse… la mèneront au suicide.
"Je m'appuie sur toi, aussi engourdie qu'un fossile.
Dis-moi que je suis là."

Mais comme Nerval, difficile pour elle de naviguer entre l'émerveillement que suscite l'imaginaire qui s'incarne en une splendide versification et le gouffre d'une conscience effrayée par l'impitoyable cruauté du vécu.

"L'avenir est une mouette grise et bavarde,
Ses miaulements ne parlent que de partir, partir.
La vieillesse et l'épouvante, comme des infirmières,
veillent sur elle
Et un noyé, se plaignant du grand froid,
Sort en rampant de la mer."

Une lecture exigeante donc dont on ne peut sortir que meurtri et plein de compassion pour ceux qui ont mal à eux-mêmes.
Commenter  J’apprécie          333



Ont apprécié cette critique (32)voir plus




{* *}