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Il s'agit ici de deux recueils de poèmes, « Arbres d'hiver », précédé de « La Traversée ». Ce qui surprend tout d'abord dans les pages de ces textes, c'est la fragilité d'un paysage, traversé par le chagrin. Cependant c'est beau, c'est beau comme un soleil un matin d'hiver. Il m'est difficile de dire que c'est triste ou désespéré. On voudrait se pencher sur ces mots, les toucher, les retenir avec nos doigts, les empêcher de partir vers l'envers du décor.
Chaque poème ressemble à une barque noire avançant comme sur un lac gelé avec l'éclat d'un ciel blanc et des oiseaux par-dessus tout.
Sylvia Plath savait-elle déjà qu'elle allait mourir au moment où elle écrivait ces poèmes ? Qu'elle allait quitter ce monde par sa seule volonté ? Mais on ne connaît jamais les mystères d'un geste, d'une main au bord du vide, celle d'une marée qui déferle sur elle, celle de la mer après qui se retire laissant le silence derrière le paysage.
Les poèmes de ce recueil disent déjà cela. La lumière n'est jamais loin des ténèbres et l'inverse aussi.
Parfois la poésie aborde nos rivages et les remue comme une vague inlassable dans le fracas des mots. Parfois ce voyage intime est violent, c'est une descente dans un puits sans fin.
La vie défigure nos illusions et la poésie convie des mots magnifiques pour reconstruire ce qui nous aura échappé. Elle nous donne souvent une seconde chance, rebondir dans une forme de résilience...
Ici ce n'est pas cela.
Connaissant pourtant le destin de Sylvia Plath, j'ai pourtant cherché dans ses vers une main tendue vers un semblant de soleil, l'idée que l'écriture pourrait la sauver. Rien, rien n'est ici dans les décombres de ces mots. Aucun espoir.
Chaque poème de Sylvia Plath m'a pourtant tiré la main vers une empathie pour l'autrice.
Elle dit la mémoire mutilée, une enfance idéalisée, plus tard bousculée par la mort de son père. Les poèmes de Sylvia Plath disent cette déflagration. Ils disent l'absence, la mort, un sentiment d'insécurité et d'abandon.
La poésie de Sylvia Plath n'est pas que belle, elle est déchirante.
La poésie de Sylvia Plath est comme un océan tumultueux. Adorant la mer, l'océan, ses mouvements inlassables, regardant ainsi la mer comme toujours comme jamais à chaque fois, mais imaginant tout ce qui a dans ce mouvement de puissant et de dérisoire, j'ai lu ces poèmes avec ce regard intime.
Chaque poème est pourtant un miroir à sa manière, en dépit du désespoir de Sylvia Plath.
Étrangère déjà à un monde où elle a perdu pied depuis sans doute longtemps. Étrangère dans ce monde où elle n'était déjà peut-être plus présente, prenant la beauté du monde, de la nature, tout en tenant à distance toute émotion, elle avance et dévoile des images qui sont déjà des trous où ses pas trébuchent sans cesse...
On voudrait croire à la résilience de la poésie. Sans doute que Sylvia Plath était déjà éloignée de cet itinéraire, faisait déjà de ce texte une sorte de testament.
Guérir par les mots des plaies ouvertes par les seuls méandres d'une vie intérieure douloureuse.

« Pas facile de formuler ce que tu as changé pour moi.
Si je suis en vie maintenant, j'étais alors morte,
Bien que, comme une pierre, sans que cela ne m'inquiète,
Et je restais là sans bouger selon mon habitude.
Tu ne m'as pas simplement un peu poussée du pied, non-
Ni même laissée régler mon petit oeil nu
A nouveau vers le ciel, sans espoir, évidemment,
De pouvoir appréhender le bleu, ou les étoiles. »

Les vers de Sylvia Plath sont fascinants, enivrants, hypnotiques. Son écriture est ainsi, elle traduit d'emblée ce sentiment mélangé de grâce, de mélancolie et d'âpreté aussi.
Ce sont des sons, des images, des respirations suspendues au bord d'un vertige abyssal.
Ce sont des joies déjà lointaines, enfantines, presque oubliées.
Le second recueil est pour moi plus noir, plus dramatique.
Je n'ai pas pu tout lire ce livre d'une traite à cause de ses coups de boutoir et de certains vers qui m'ont paru totalement hermétique à toutes émotions, comme les chassant d'un dernier geste presque dérisoire.
Son esthétique poétique dérange aussi et c'est bien.
Sylvia Plath a une puissance d'évocation saisissante, sidérante. Ses mots aux allures douces-amères deviennent alors comme des déflagrations souterraines dont elle ne s'en remit peut-être jamais.

Ses poèmes ont été publiés après sa mort par son mari et sa soeur. Sylvia Plath s'est donné la mort un 11 février 1963 à Londres, à l'âge de trente ans.
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« Ici, les graminées
Déposent leur chagrin sur mes chaussures »

Oh, merveilleuse Sylvia Plath … Comme elle m'a transportée avec ses poèmes, teintés de ses influences tour à tour romantiques, expressionnistes, surréalistes, … Certains d'entre eux sont carrément des rêves éveillés, des visions saisissantes.

Mais Sylvia est selon moi avant tout une immense romantique (ah, les fameuses chandelles, «ces menteuses » ), avec sa soif d'Absolu (« La bossue dans sa maisonnette Aux petits murs blancs sous les clématites. Et nul grand amour, rien que la tendresse ? »), sa sincérité et son intégrité, sa colère contre un dieu, indolent, qui sourit devant le malheur des hommes, ses obsessions du temps, sa peur de l'inertie (marbre, rocs, statues, êtres vivants pétrifiés, ... sont autant de menaces), sa conception idyllique de l'enfance, son sentiment de vacuité de l'existence (« je serai utile quand je reposerai définitivement ») …

Le ton est généralement sombre :

« La destinée courb[e] chaque chose dans une seule direction »
Ou encore
« Lac noir, barque noire, deux silhouettes de papier découpé, noires.
Jusqu'où s'étendent les arbres noirs qui s'abreuvent ici ? »

De temps en temps, de la couleur apparait, signe qu'un espoir est possible : les gâteaux sont décorés avec un glaçage de six couleurs, signe d'abondance ; les comprimés rouges, violets, bleus illuminent l'ennui du soir qui s'éternise ; les petits coquillages assemblés en colliers ne viennent pas de la Baie des Morts, mais d'un autre lieu, tropical et bleu, où nous ne sommes jamais allés, … Mais c'est un monde de couleurs qui souvent reste inaccessible ou instable.

L'écriture est aussi très visuelle, très photographique : les carpillons jonchent la vase comme des pelures d'orange ; les femmes gravides qui, souriant en elles-mêmes, méditent aussi dévotement que le bulbe de Hollande lorsqu'il prépare ses vingt pétales ; les roues de la voiture sont deux larves de caoutchouc noire qui se mordent la queue ; les chandelles versent leurs larmes troubles puis ternes perles, la mer aux moustaches d'algue étale ses soieries glauques, …

Plusieurs de ces poèmes mériteraient à eux seuls un billet entier, tant ils sont riches de sens et propices aux interprétations. Comme par exemple, « l'agneau de Marie » qui évoque la shoah et préfigure son suicide, puisqu'écrit juste avant…

Oui de la très grande poésie, où je me suis retrouvée avec beaucoup de plaisir, même si le sujet est généralement douloureux. Mais c'est tellement bien écrit qu'on ne peut s'empêcher d'éprouver une sorte de communion avec l'auteure et de l'empathie, et un vrai bonheur de lecture. Bravo et merci, Madame Plath.
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Sylvia Plath nous offre une poésie très concrète, d'une intensité presque cruelle; les mots nous compriment l'estomac, nous déchirent légèrement les peaux flasques du confort… en effet les métaphores ont qqch de tactile sinon de clinique:
"Comme une infirmière muette et sans expression, la lune
Pose une main sur mon front."

Héritière lointaine du symbolisme et pourquoi pas d'une certaine forme noble du gothique anglais, Plath nous déploie son art de la description chirurgicale d'un environnement aux accents inquiétants. Les décors froids hantés par les statues antiques et une nature qui s'immobilise renforcent une certaine torpeur dont la poétesse ne s'éveille que pour assumer l'effroi que lui procure son existence.
"Les miroirs tuent et parlent, ce sont des chambres d'épouvante"

Les poèmes dérivent souvent d'une contemplation de la nature ou une admiration toute maternelle des enfants au repos (émotion pleinement vécue par la jeune maman Sylvia) vers un désespoir quasi consenti. Ainsi cette métaphore pour l'agneau pascal nous résume bien le ressenti de Sylvia Plath mis en vers:
"Ô bel enfant d'or que le monde tue et mange."

La douleur exprimée, toute psychique a pu me rappeler certains vers de Nerval. le parallèle avec Gérard Labrunie est facile mais s'impose quand on sait que l'atrocité du mal d'être, de l'abandon, de l'implacable venue de la vieillesse… la mèneront au suicide.
"Je m'appuie sur toi, aussi engourdie qu'un fossile.
Dis-moi que je suis là."

Mais comme Nerval, difficile pour elle de naviguer entre l'émerveillement que suscite l'imaginaire qui s'incarne en une splendide versification et le gouffre d'une conscience effrayée par l'impitoyable cruauté du vécu.

"L'avenir est une mouette grise et bavarde,
Ses miaulements ne parlent que de partir, partir.
La vieillesse et l'épouvante, comme des infirmières,
veillent sur elle
Et un noyé, se plaignant du grand froid,
Sort en rampant de la mer."

Une lecture exigeante donc dont on ne peut sortir que meurtri et plein de compassion pour ceux qui ont mal à eux-mêmes.
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Je n'ai pas pu apprécier la lecture de ce recueil de poèmes de Sylvia Plath.
Je reconnais à la poétesse son talent, à travers son imagination foisonnante, l'âpreté de son écriture, son amour de la nature et le riche choix des images qu'elle emploie tout au long de ses poèmes.
Mais, pour moi, la littérature, même de qualité, doit être un minimum porteuse de vie pour m'être respirable. Ici, après la lecture de cinq lignes, j'avais envie d'enjamber mon balcon et de sauter du troisième étage. Alors, bien sûr, si l'on prend connaissance de la biographie de l'auteur, on sait son mal être, ses troubles bipolaires, son suicide... mais je regrette pour elle que l'écriture n'ait pas été un moyen d'apercevoir un petit rayon de soleil dans une vie sombre et désespéree. Et, malheureusement, pour la lectrice que je suis, cette morbidité, cette absence de la moindre parcelle d'humour ou d'autodérision, sont insupportables. On ne ressent même pas un certain plaisir à l'écriture.
Je ne suis donc pas allée au bout de ce recueil, lassée par ce désespoir contagieux.
Je tiens à souligner par ailleurs la bonne idée de l'éditeur d'avoir publié les poèmes dans leur langue originelle à côte de leur version française.
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C'est toujours délicat de parler d'une icône, et manifestement, Sylvia Plath est une icône, une déesse morte et ressuscitée dans ses mots. L'abandon volontaire de son enveloppe terrestre rajoute du drame là où l'oeuvre porte déjà tant de force.

Dépressive, féministe, génie, on peut dire beaucoup de choses à propos de Sylvia Plath, toutes choses qui la réduisent certes, et pourtant qui projettent en ce monde dix mille, cent mille facettes d'une même femme : chacun de nos regards subjectifs sur elle, sur ses écrits, la ressuscite d'une différente manière.

Je suppose que j'ai moi aussi un regard subjectif, j'oublie souvent combien sa vie intérieure a pu être sombre, quand je relis certains poèmes, où tout n'est qu'ode à la vie et à la nature. Et puis soudain, le lecteur sombre avec Sylvia, dans les brumes du Thalidomide. Complexité de l'âme. Merveille des mots : à chaque lecture on se rend compte que l'univers d'un poète ne peut se réduire à une case.
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Avec Arbres D'hiver, Sylvia Plath livre une poésie intime, une poésie très contrôlée, qui ne se laisse pas apprivoiser si facilement. Découpé en deux recueils, La Traversée et Arbres d'hiver, la poésie de Plath n'est pas emprunte de cette légère folie, ce petit grain qui permet le lâcher prise et qui donne au poème une touche de liberté. Sylvia Plath à travers sa poésie délivre un message intime et très personnel. Elle laisse très peu de place à l'interprétation. Une poésie complexe et bétonnée de toutes parts.

Pourtant, quelques poèmes semblent s'affranchir des règles et déposent un vrai souffle, on découvre une toute autre poésie, La Traversée ou encore Veuve, laissent entrevoir une poésie moins contrôlée, plus aérienne, comme si l'espace d'un moment Sylvia Plath laissait place à l'insouciance, que l'emprise qu'elle a décidé d'exercer sur sa poésie avait trouvé une sortie, un instant d'égarement, une épiphanie. Un moment de grâce.

Le recueil semble être à l'image de la vie de Sylvia Plath, une vie courte mais Intense, émotionnellement très remplie et très dure. On retiendra aussi certaines thématiques presque avant gardistes comme le post parthum ou les contractions, thématiques qui, dans la poésie d'aujourd'hui ne sont pas les plus présentes. La poésie de Plath se fait l'écho de sa vie, elle oscille entre contrôle démesuré et lâcher prise, l'équilibre n'est jamais respecté et entre en résonnance directe avec la vie tumultueuse qu'a connu l'autrice de la Cloche de détresse.

Plath livre avec ce recueil une partie d'elle-même les poèmes sont diversifiés et les thématiques surprenantes. Malgré une poésie contrôlée je me suis laissé bercer par l'immobilité créative et lors des moments de grâce, l'émotion s'est emparée de moi. Ce recueil montre à quel point cette femme était bourrée de talent, certainement avant-gardiste, elle aurait pu bouleverser les codes de la poésie. Elle laisse derrière elle une poésie complexe, sans concession, bridée par un style monolithique, laissant parfois s'échapper quelques moments de grâce, ces moments qu'il faut savoir attraper au vol.
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Fort comme un coup de poing dans le ventre même à am seconde lecture l'écriture de Plath est toujours aussi émotionnelle, intense, touchante.
Dur , intense l 'expérience se mérite mais au moins on ne peut pas reprocher à Plath de faire semblant.
Cette douleur c'est aussi sa vie et sa manière de l'exprimer est belle, intense, multiple.
L'édition est bilingue et la musicalité des poèmes, la traduction, les notes sont de très grande qualité à mon sens.
Un chef d'oeuvre pour une des plus grandes écrivains et écrivaines.
Mrs Plath now you are more than a poetress you have become a master and a muse. Eternal respect .
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la meuf est totalement crazy ouu
normal

''i watch their spilt tears cloud ans dull to pearls.
how shall i tell anything at all
to this infant still in a birth-drowse?
tonight, like a shawl, the mild light enfolds her,
the shadows stoop over like guests at a christening.''
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J'ai aimé ce recueil dans lequel Sylvia Plath décrit certains malheurs de la vie et notamment de sa vie à elle.
Cependant il peut être difficile pour certaines personnes qui se reconnaissent dans ses récits , de le lire.
Elle évoque plusieurs thèmes qui peuvent être communs pour certaines personnes comme l'absence paternelle, la stérilité ou encore la santé mentale ce qui rend les récits touchants .
Cependant la complexité de certains mots et certains poèmes peuvent freiner la lecture.

J'ai choisi le poème «  à un enfant sans père » parce qu'il décrit une situation dans laquelle malheureusement beaucoup de personnes se reconnaissent.
On ressent d'une part l'émotion de la mère qui pense au moment où son enfant se rendra compte de l'absence de son père.
Mais on y voit aussi l'innocence des enfants ainsi que leurs regards sur le monde dans les vers :
« Son miroir aveugle où je plonge mon regard,
Pour n'y voir que moi, et ça te fait rire. » ( page 227)

Le second poème que j'ai choisi est « Le courage de se taire  ». Elle explique ici l'importance de la parole mais aussi du regard.
Effectivement , ici la parole est une arme dangereuse, cependant le regard transmet lui aussi énormément de choses puisqu'il renvoie nos sentiments, émotions et pensées. Les yeux sont comme des miroirs. Et elle le dit dans ce vers : « Les miroirs tuent et parlent, ce sont des chambres d'épouvante ». ( page 195)

Les autres vers que j'ai aimé sont :

« Tu seras bientôt conscient d'une absence
Qui grandira près de toi comme un arbre, » (page 227)

« Des oiseaux gris hantent mon coeur » ( page 243)

En conclusion il s'agit d'un recueil qui traite de sujets universels et qui doivent être racontés malgré le fait qu'ils soient parfois difficiles à exprimer.
Je ne regrette absolument pas ma lecture malgré les quelques difficultés que j'ai pu rencontré.
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Dans ce monde rétrécit par la douleur et par le repli sur soi, Sylvia Plath, d'une lucidité sincère et profonde nous livre ses pensées les plus intimes. Sa solitude, sa nudité, son amertume exsudent dans chaque mot composant ses poèmes. Elle transforme sa pensée en émotion dans un cauchemar inspiré dans un passé agressif (la mort de son père lorsqu'elle était enfant, puis l'infidélité de son mari).
Un dernier acte de foi avant son suicide. Un cri déchirant.

Sa poésie décousue n'est pas parvenue à me séduire. Pas de sortilège dans ces poèmes. Dommage.
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