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Critique de Ependir


Stefan Platteau est désormais bien installé dans le paysage de la fantasy francophone et à juste titre. Un univers très riche, qui se densifie tome après tome, un récit efficace, dont le déroulé repose sur l'alternance de narrateurs et donc de voix différentes et, surtout, un style à faire pâlir Robert E. Howard - et c'est tout de même heureux, parce que Robert E. Howard, même dans la nouvelle traduction de Patrice Louinet, reste assez loin de Proust. Ne boudons donc pas notre plaisir : Jaunes Yeux possède bien toutes ces qualités et sa lecture est un vrai régal.
L'une des épices que l'auteur a ajouté à ce volume est de replacer l'intrigue dans son contexte immédiat, celui de l'affrontement entre les Souranès et les Luari. A cet égard, le plat est réussi, la sauce a bien pris. Dans les trois premiers tomes, l'expédition du Capitaine Rana était avant tout aux prises avec l'histoire et ses mythes, les Antiques, inaccessibles, laissaient néanmoins des traces de leur passage, et les Nendous, ces démons du passé, surgissaient à la fin du tome III pour tailler les membres de l'expédition en pièces. Dans ce quatrième tome, les Antiques sont toujours là, voire se multiplient au gré de nouvelles rencontres, plus ou moins heureuses, mais le temps présent, celui des Souranès et des Luari en guerre, se rappelle à notre bon souvenir et redonne tout son sens à l'enjeu de l'expédition : gagner ce conflit. cerise cur le gâteau, ces différentes temporalités fonctionnent très bien. Chapeau donc, l'artiste.
En revanche se pose la question du dosage, agrémenté de quelques maladresses. Faut-il que le dit de Shakti soit aussi long ? Sans doute pas, même s'il est nécessaire au développement de l'Outre-songe et de ses protagonistes, Outre-songe, soit dit en passant, qui est fascinant et constitue un nouveau fil parfois plus intéressant à suivre que tous les autres. Enfin, côté maladresses, Stefan Platteau aurait pu éviter de surligner certains de ses engagements, qui tout respectables qu'ils soient, sentent bon l'esprit du temps : que c'est chouette d'être une prostituée sacrée pour Shakti, car, finalement, même si elle doit passer à la casserole de temps en temps, ce statut lui procure une réelle liberté ! le thème de la servante d'Aphrodite est tout de même un peu éculé. En outre, Shakti trouve dans les autres Courtisanes des Sept nuits qu'elle rejoint ce sympathique réconfort qu'est la "sororité" - le terme est employé deux ou trois fois. Trop cool...
Dommage, car l'univers médiéval-fantastique empruntant à des civilisations très différentes fonctionnait parfaitement jusqu'à présent, sans qu'il soit besoin d'y faire surgir des débats très XXIème siècle. Par ailleurs, le parcours de Shakti n'avait pas besoin d'être aussi porté aux nues pour que l'on comprenne ce que Stefan Platteau voulait : Shakti se libère de ses tendances victimaires et de Meijo et elle prend le meilleur de son statut de prostituée sacrée. le lecteur est assez intelligent pour apprécier la chose, inutile de lui écrire noir sur blanc combien c'est top et que cela constitue une revanche sur des millénaires d'exploitation des femmes... C'est au mieux naïf, au pire agaçant. En tout cas, c'est maladroit.
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