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Critique de bbintein


Proust fait dire à la duchesse de Guermantes, à propos de Zola, qu'il est le Homère de la vidange.
Proust, lui, c'est le Homère de l'introspection, le Zola des rapports de castes.
Avec son everest littéraire, il a fait beaucoup de mal à la littérature française... Tous ses suiveurs ont eu l'obligation de se trouver une place dans son sillage écumant. La sécheresse stylistique et psychologique du Nouveau Roman, c'est entre autres choses le refus de la prolifération propre à la Recherche. Les déballages des petits parisiens d'aujourd'hui, c'est la croyance que leurs "petites affaires privées" ont valeur universelle, dès lors qu'elles sont ordonnées sur le papier. Qu'est-ce qui les a autorisés à confondre nombrilisme et universalisme? Leur émoi devant les architectures proustiennes, qu'ils ont eu le mérite, autant que la malchance, de découvrir trop tôt.
Ecrire après Proust, c'est comme être un saxophoniste tenor après John Coltrane : délicat.
Marcel, génie indécent, tu as eu tant de choses à écrire et tu t'es si peu retenu. D'ailleurs tout lecteur fanatique de ta prose t'aurait su gré de lui épargner une ou deux descriptions obsessionnelles, de fleurs notamment, de couper par-ci par-là dans l'examen de tes troubles nerveux, surtout à partir du quatrième tome, parce qu'après tout, si on te suit amoureusement par delà les mille pages, c'est que tu nous as déjà un peu convaincus, qu'on a un peu compris tes états et ton propos. Pourtant on ne peut même pas t'accuser de bavardage : c'est par grande nécessité que tu chemines en circumnavigations, et à la lassitude qu'inspirent parfois tes digressions, succède toujours quelque puissante vérité vers laquelle tu ne cessais de nous conduire en tirant des bords, pendant que nous pensions à tort nous ennuyer.
Voilà pourquoi moi j'y reviens chaque printemps depuis quatre ans et quatre tomes, à cette lecture qui n'est jamais si saine qu'à l'ombre d'un jeune arbre en fleur.
Cela dit, amoureux de Proust, ne le surestimez pas. Sur le plan de l'analyse psychologique, il emprunte beaucoup à Bergson.
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