AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Musa_aka_Cthulie


Les deux textes qu'on peut entendre ici ont été publiés dans le recueil Les plaisirs et le jours, dix ans avant le premier tome du La recherche du temps perdu, et nous dévoile un Marcel Proust dont on n'a pas forcément l'habitude, avec une influence prégnante du mouvement décadent . Les deux nouvelles relèvent de la thématique de la corruption d'une jeune fille, corruption qu'on pourrait qualifier de sociale dans le cas de Violante, corruption qu'on pourrait qualifier de charnelle pour ce qui est du personnage de la confession d'une jeune fille.

Dans Violante ou la Mondanité, on a affaire à une jeune fille de famille aisée plus ou moins laissée à elle-même, qui, afin de séduire un jeune homme dont elle est amoureuse mais qui ne soucie pas d'elle, va se frotter au beau monde et ne plus jamais en sortir. Au contact de cette société à laquelle elle ne ressemble pas, elle va s'affadir et perdre ce qui fait toute sa personnalité. Ce n'est pas le texte le plus passionnant que je connaisse de Proust : on n'y trouve pas la finesse d'analyse des romans à venir, loin s'en faut. En revanche, le ton est d'un bout à l'autre empreint d'ironie, et c'est ce qui fait sans doute l'intérêt essentiel de la nouvelle.

Le texte de la confession d'une jeune fille révèle quant à lui un aspect franchement méconnu de Proust. Dans cette nouvelle, l'auteur a déjà recours à la première personne. Une jeune fille, qui restera anonyme, raconte son histoire depuis son lit d'agonie, après avoir tenté de se suicider ; sa mort ne sera que peu différée, puisque la blessure qu'elle s'est infligée s'est avérée mortelle. Elle revient alors sur son enfance, son adolescence et le début de sa vie d'adulte, sur son amour inconditionnel pour sa mère, sur la façon dont elle a été petit à petit corrompue (certainement davantage psychologiquement que physiquement) par un jeune garçon qu'elle qualifie, je crois, de vicieux. Elle réussit malgré tout à dépasser la tendance au vice qui s'est fait jour chez elle, pour mieux retomber dans la corruption charnelle (ça reste très chaste pour un lecteur du 20ème siècle, et même pour celui de la fin du XIXème qui a lu les symbolistes ou les décadents), avec des conséquences désastreuses que je ne révélerai pas ici. Après la corruption charnelle, la culpabilité ronge la jeune narratrice, d'où les premières lignes de la nouvelle, où on la trouve agonisante. Si le début rappelle beaucoup le premier chapitre du roman du côté de chez Swann, avec Marcel attendant passionnément que sa mère vienne lui dire bonsoir, la suite prend une tournure de plus en plus perverse (tout est relatif, cela dit) et ténébreuse. Pourtant, ce n'est pas un texte qui va aussi loin que, par exemple, les nouvelles du recueil Les diaboliques de Barbey d'Aurevilly, dans l'approche du morbide et de l'érotisme entremêlés, ou sur le thème du mal qui ronge l'être humain.

Le gros défaut que je trouve à cet audio-livre, c'est la lecture de Zabou Breitman, qui m'a semblé terriblement plate. Dans les deux textes, il m'a semblé qu'elle cherchait à faire sentir la tension qui monte ou l'humour qui point de façon très graduelle, ce qui donne un ton très neutre au début, qui aurait facilement tendance à donner l'impression que Proust, c'est chiant à mourir. L'actrice s'anime peu à peu. Mais, d'une part, ça ne rattrape pas, à mes oreilles, la platitude du commencement, ni le côté un peu scolaire de la diction lorqu'elle est plus enlevée. C'est dommage, car sa voix, qui donne une sensation de jeunesse et de fraîcheur, colle parfaitement aux deux personnages principaux des nouvelles. Mais c'est toujours le danger des audio-livres, j'imagine : difficile de coller aux attentes de la multitude des auditeurs.

Dernière chose : je trouve le prix (21 € pour le CD/14,90 € pour le téléchargement) un peu excessif pour 50 minutes de texte. Je pense particulièrement aux personnes qui ont recours aux audio-livres non par choix, mais par obligation. Pour le prix, on pourrait bien avoir le recueil le plaisir et les jours en entier. Mais je trouverais ça encore trop cher, malgré tout. C'est toujours le même problème de l'accès à la culture...



Masse Critique générale
Commenter  J’apprécie          190



Ont apprécié cette critique (7)voir plus




{* *}