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Critique de brigittelascombe


"Notre bonheur était un château de sable" confie François, adolescent surdoué, qui relate sa relation passionnelle avec Marthe de deux ans son ainée, mais fiancée puis mariée donc coupable d'adultère.
Oh, pas pour le mari, cocu trop crédule parti au front, qui croit dur comme fer en la chasteté de son épouse et en devient pitoyable de tant de crédulité.
Mais pour tous les autres: parents trop faibles fermant les yeux sur leurs frasques puis s'alarmant qu'un bâtard voie le jour, voisins bourgeois choqués d'ébats plus que sonores au dessus de leurs prudes têtes, amis s'éloignant pour éviter toute compromission.
Raymond Radiguet, enfant prodige lui même, dont la fulgurante intelligence n'eut d'égale que la mort précoce, dépeint avec justesse le diable au corps, cette attirance plus forte que tout qui mène à l'insouciance et à l'inconscience, sans innocence aucune; cette sensualité teintée d'érotisme mais à l'opposé du trop osé ou trop cru L'amant de Lady Chatterley.
Le lecteur retrouve ici l'écriture flamboyante et l'analyse psychologique très fine de le bal du comte d'Orgel.
Mais le couple formé dans le diable au corps puise sa force dans une relation de soumission-domination complètement différente.
Lui est manipulateur, narcissique, jaloux,lâche, cynique, pervers, susceptible, orgueilleux, veule, possessif,fanfaron, infidèle,provocateur...
Elle est femme-enfant,maternelle,douce,soumise,inquiète,rouée,capricieuse,comédienne,
bourgeoise...
Et ça marche, le lecteur se prend au jeu car c'est un jeu d'enfants qui font l'école buissonnière, faisant fi du monde d'adultes qui les entoure que Raymond Radiguet nous donne à voir de main de maître.
L'auteur évoque lui même Daphnis et Chloé, ce roman grec d'un certain Longus où deux adolescents trouvent l'amour. On peut penser également à Colette avec le blé en herbe car François sait marquer de ses morsures la blanche peau de Marthe comme un chat joue à la souris.
Mais le fait qu'elle soit mariée, infidèle et menteuse la place sur un autre registre, celui de la passion explosive qui met le feu aux poudres et balaye tout sur son passage jusqu'à la mort.
On ne peut se réjouir comme Jean Cocteau d'avoir connu l' écrivain précoce que fut Raymond Radiguet, même si l'amour prend chez lui une connotation tragique, et se demander s'il eut l'intuition de sa propre mort lorsqu'il écrivit: "un homme désordonné qui va mourir ne s'en doute pas met soudain de l'ordre autour de lui.Sa vie change...Aussi sa mort brutale semble-telle d'autant plus injuste.Il allait vivre heureux".
Son oeuvre fut courte, mais quelle oeuvre!
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