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Citations sur Komorebi (22)

Je revois les brisures de soleil filtrant à travers l'arbre et courant sur ta peau, et ton pas si léger que l'herbe ne semblait y céder qu'à regret. Trop d'attente déjà, trop d'espérances éteintes, et le désir pourtant de connaître l'étreinte. T'en souviens-tu ? Et les fruits rouges éclatant dans nos bouches, le sucre tachant nos lèvres, cette lumière végétale, ton regard qui scintille, l'envie de mordre un autre fruit, une autre chair sucrée sous sa surface luisante.
Nos paroles ne disaient rien, proximité des coeurs, pudeur des sentiments. Nos gestes parlaient-ils ? J'ai oublié, j'en ai peur, les causes et les conséquences, mais tu montas dans l'arbre, et pour t'aider, je connus la douceur de ta peau. Cela, je m'en souviens. Glissement au ralenti d'épidermes en connivence, tes jambes au-dessus de moi pour taquiner les fruits, et mes yeux qui hésitent. Cela, c'était avant, mais y eut-il un après ?

Extrait de "Lettre à l'absente"
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D'habitude, lorsqu'une femme me faisait connaître son désir, je me jetais sur elle, mais là, j'étais comme paralysé, embarrassé de respect, et je la laissai faire. Nous étions, de tous côtés, environnés par la brume d'automne. « Vos mains sont froides et rugueuses », me dit-elle, « je vais les amollir ». Et lentement, elle porta chacun de mes doigts à sa bouche, les embrassant avec un art si maîtrisé que je crus défaillir. Pour me ramener à moi, à elle, elle me mordit, de ses fines dents, le bout de l'index, jusqu'au sang. La brève douleur réveilla ma conscience, et je basculai sur elle. Elle se dégagea comme un animal souple et fauve et ôta son dernier vêtement alors que je me séparais des miens. Dans cette clarté entrecoupée de brume, de sa peau nue semblait sourdre une lumière laiteuse, quasi lunaire, et je me fondis, comme la luciole soumise à une fatale attraction, dans cette lueur vaporeuse.
Je ne saurais vous dire combien de temps dura cette union. Je sortis de mon corps, cette nuit-là, à plusieurs reprises, et il me sembla que mon esprit errait dans les brumes, courant à la surface des eaux huileuses à la recherche de mon corps uni au sien. J'entendais, je participais des mille volontés de la vie autour de nous. J'étais ce poisson à l'affût dans la vase, et ce ver qui rongeait le roseau, et ce hibou qui cherchait sa pitance, et cette souris, encore, qu'il terrorisait, blottie entre les herbes...J'étais tout cela, et tout cela était en moi. J'eus l'illusion de voir Itako, loin au-dessous de moi, cernée de lacs et de rivières, et le grand rivage qui marque l'océan. Loin, très loin au-dessous de nous. Puis, je chutais, je revenais dans ma barque, avant de reprendre de la hauteur, dans un va-et-vient qui semblait appartenir à une autre réalité. Je vis, dans ce rêve partagé, disparaître la ville sous les nuées et, vers le sud, je crus même discerner les neiges du Fuji, scintillantes sous le manteau céleste gavé d'étoiles qui m'accueillaient en leur sein. Et toujours cette odeur lourde, suave, presque sucrée, cet au-delà du désir et du plaisir qui me portait, abandonné, sans volonté, comme nous porte le temps sur les flots tempétueux de notre destinée. J'avais dépassé le stade des sensations, j'étais apaisé, libéré de toute nécessité, je tutoyais les dieux...et j'ouvris les yeux alors que ma déesse refermait, d'un mouvement fort et exquis, les pans de son dernier vêtement.
J'étais étendu, nu, faible et trempé, comme pour une seconde naissance, sur le rude plancher de ma barque. « Nous pouvons, à présent, terminer notre course ».

Extrait de "Le doigt"
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J'entrevois la fin,et déjà je suis dans l'après ,dans la prochaine expédition. Je ne sais pas où j'irai,mais je repartirai, maintenant que le dénouement est proche.Voici la traversée touche à sa fin,et pourtant j'hésite ,je m'arrête, et j'ose me retourner pour contempler le chemin parcouru .Je le puis à présent, avec ce goût étrange d'inachevé en bouche,et je ralentir la course de mes mains tout en me demandant si le lecteur m'a compris,cheminant en ma compagnie au travers du pays blanc des pages......( Page 125).
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Des nuages venus du Nord crevèrent,et,à l'abri de la véranda, je regardai toutes choses au travers du voile de la pluie,du fin rideau de l'existence.Mon ami félin était assis près de moi,et ma main caressait son échine douce et souple.Il suivait d'un œil curieux les gouttes qui se détachaient une à une du toit.Une goutte reflète le monde qui l'entoure.J'étais la goutte,et le monde se reflétait en moi.J'entrevoyais chacun de ses points,chacune de ses lumières. J'étais envahi d'une grande paix,une sérénité liquide.Sous mes caresses prenait naissance la douce et féline mélopée marquant le bonheur d'un instant,et je ressentais presque physiquement peser sur moi le regard de mon petit compagnon,ce regard doré qui renfermant dans son orbe le reflet chatoyant de notre monde sensible.( Page 73).
Extrait du récit : La joueuse de Shamisen.
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Des nuages venus du nord crevèrent, et, à l'abri de la véranda, je regardai toutes choses au travers du voile de la pluie, du fin rideau de l'existence. Mon ami félin était assis près de moi, et ma main caressait son échine douce et souple. Il suivait d'un oeil curieux les gouttes qui se détachaient une à une du toit. Une goutte reflète le monde qui l'entoure. J'étais la goutte, et le monde se reflétait en moi. J'entrevoyais chacun de ses points, chacune de ses lumières. J'étais envahi d'une grande paix, une sérénité liquide. Sous mes caresses prenait naissance la douce et féline mélopée marquant le bonheur d'un instant, et je ressentais presque physiquement peser sur moi le regard de mon petit compagnon, ce regard doré qui refermait dans son orbe le reflet chatoyant de notre monde sensible.

Extrait de "La joueuse de shamisen"
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Sous la caresse, affadie par les nuages épais, de la clarté lunaire, l'eau prenait une allure spectrale, légèrement terreuse, comme une prairie sur laquelle nous aurions glissé sans effort. Cette étendue n'avait plus de bords, et son épaisseur presque palpable répondait à la bassesse d'un ciel qui tamisait tout éclat, fondant les choses et les gens dans un long crépuscule. Tout était mouillé, l'air lui-même avait une odeur de champignon, comme au commencement d'un monde.
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LETTRE À L'ABSENTE

Morsure du gel
Derrière la vitre
Long hiver sans toi
T'en souviens - tu ? Cet été, si lointain,vivait ses premiers jours ,et nous allions tous deux pour cueillir des cerises dans ce pré que,déjà, je couvais du regard .Jeunes ,inquiets et maladroits ,échangeant des paroles ,nous enivrant sans conséquence du nectar de mots qui n'étaient pas les nôtres pendant que commercaient nos regards.Celui qui désirait et celui qui doutait,confondus en un seul sentiment,en une douce alternance.Deux étoiles tourbillonnantes se rapprochant lentement ,en une danse de vie,vers des noces de lumière.Du moins le voulais-tu.( Page 9).
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Ce n'est pas ma première expédition dans le pays blanc. Cela commence toujours par de brèves incursions, de fausses aventures en terrain balisé, sur de courtes distances. Une exploration sous conditions et sous surveillance, d'où le risque est absent. On peut à la rigueur se perdre, mais pas s'y perdre, et encore moins s'y abîmer. Pourtant, ce pays est dangereux. Certains de ses plus grands explorateurs y ont laissé la vie ; dévorés, abattus, parfois si marqués par ce qu'ils y ont découvert qu'après leur périple ils ont mis, d'eux-mêmes, un terme à leur existence. Il y a de la folie dans cette vision de la vie qui nous pousse à accomplir, malgré les risques, ce voyage. Le plus grand de ces risques, le plus contagieux aussi, c'est l'ennui. Il peut vous saisir à n'importe quel moment, vous stopper dans votre élan, vous pétrifier pour longtemps, statue de sel soudain indiscernable dans ce pays blanc, coupable d'avoir voulu se retourner sur ses traces plutôt que d'avancer. Il faut continuer, malgré tout. Je n'ai d'autres repères que mes propres traces, mais si elles peuvent me dire d'où je viens, elles ne me sont d'aucun secours pour m'indiquer la direction à prendre. Je dois me fier à mon inconstante boussole intérieure. A chaque pas je construis mon histoire, c'est la seule chose que j'apporte dans cette immensité.

Extrait de "Le pays blanc"
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Le ciel s'assombrissait vraiment, à présent. Allongé, Shinjiro avait l'impression que les hautes herbes se refermaient sur lui. Il étendit la main, saisissant celle d'Etsuko, déjà froide et raidie à son côté. "Je te rejoins", songea-t-il en fermant les yeux.
Sur les collines enténébrées, les hautes herbes s'agitaient sous les caresses du vent, linceul d'émeraude sur les corps des amants.

Extrait de "Sous les hautes herbes"
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Ses grands yeux noirs se confondaient avec la nuit, et la pâleur de sa peau, sous l'éclat indistinct d'une lune primesautière, allant et venant derrière les nuages, semblait provenir d'une lumière intérieure, presque liquide, qui se serait échappée, goutte à goutte, de son corps.
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