AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de amarauggg


Le premier élément qui saute aux yeux lorsqu'on lit la courte conférence « Qu'est-ce qu'une nation ? » d'Ernest Renan, c'est sa clarté didactique et son efficacité rhétorique. Une écriture puissante et accrocheuse confirme l'excellence de la forme du discours.
Le fond n'est pas sans intérêt non plus. L'exposition des différents facteurs d'unification de la France à l'époque des invasions barbares, la négation de la race comme critère d'une nation et la magnifique définition proposée dans la dernière partie de l'ouvrage sont splendides. le ton grandiloquent et fédérateur est à mon sens une des grandes qualités de la conférence.
Il faut cependant prendre du recul et contextualiser, pour replacer les propos convenablement dans l'histoire des idées. En réalité, Renan n'est pas un mondialiste qui ignore le facteur de la « race » : comme tous les européens du XIXe, il établit une hiérarchie des races et croit en l'infériorité des peuples colonisés. Toute la réflexion autour de la race, de la langue et de la religion est à resituer dans le contexte de la perte française de l'Alsace-Moselle au profit des Allemands, à la suite de la guerre fratricide de 1870. Les Allemands justifiaient leur annexion par le caractère germain des peuples locaux et de leur langue. Mais Renan défend le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes : il nie donc cette justification raciale et linguistique. Même si l'on peut décider de réadapter ces principes à notre époque, il faut recontextualiser, toujours.
Il y a ensuite quelques idées de Renan auxquelles je ne souscris pas, comme celle-ci, par laquelle Renan semble nié l'importance de l'uniformisation de la langue sur le territoire national : « Ne peut-on pas avoir les mêmes sentiments et les mêmes pensées, aimer les mêmes choses en des langages différents ? ». Je pense que contrairement à l'uniformité de la race ou de la religion, l'homogénéité de la langue est un facteur déterminant dans l'union nationale française.
Ou encore celle-ci, avec laquelle il prône l'existence d'une morale universelle et d'une culture « humaine » : « Avant la culture française, la culture allemande, la culture italienne, il y a la culture humaine. ».
Je l'ai soupçonné plusieurs fois d'user de quelques arguments fallacieux et de sophismes dans le but politique qu'il vise, à savoir la reconnaissance du statut français de l'Alsace.
Malgré ces quelques désaccords, la troisième partie de l'ouvrage, dans laquelle Renan définit le concept de nation, m'a beaucoup plu. Cette idée de lien séculaire au passé et de l'importance fondamentale de la volonté de transmettre ensemble du présent me semble juste et exacte.
Commenter  J’apprécie          30



Ont apprécié cette critique (1)voir plus




{* *}