Paternoster est un roman que je voulais absolument lire après en avoir beaucoup entendu parler au festival Ouest Hurlant (par l'autrice elle-même notamment) et j'avais tout fait pour en savoir le moins possible sur son contenu.
Julia Richard propose un texte très original qui m'a beaucoup surprise. Véritable page-turner, j'ai dévoré ce roman hautement perturbant.
On suit Dana, une jeune femme un peu stressée car elle va rencontrer la famille de son copain, Basil
Paternoster, qui a tout de l'homme idéal. Dana et Basil filent le parfait amour depuis plusieurs mois mais n'appartiennent pas au même milieu social donc la jeune femme espère bien s'intégrer à sa belle-famille. L'intrigue se déroule donc tout au long de ces deux semaines de vacances dans la résidence familiale et est entrecoupée de flash-backs où le lecteur assiste à la rencontre de Basil et Dana et aux prémices de leur relation amoureuse.
La famille de Basil, les
Paternoster, est entourée de beaucoup de mystères. Au fur et à mesure qu'on les découvre, et qu'on découvre les secrets de cette famille très particulière, on ne peut qu'être curieux mais aussi troublé. La tension monte crescendo car certaines scènes provoquent le malaise et certains dialogues sont tellement lunaires qu'on en vient à se poser des questions sur l'ancrage à la réalité des personnages et sur leur potentielle folie. L'ambiance est pesante et très bien travaillée, l'immersion est parfaite car on a l'impression d'être coincé avec Dana aux côtés de cette famille pour le moins énigmatique, coupé du monde entre les murs de cette grande villa.
J'ai été d'autant plus perturbée que le personnage principal de Dana a fait résonner en moi des choses : je me suis parfois identifiée à elle et retrouvée dans ce qu'elle vit, dans certaines de ses réflexions, de ses questionnements et états d'âme. Mais si la jeune femme est touchante et génère par moments de l'empathie, elle est parfois agaçante et aveuglée par son amour et on a envie de la secouer. Mais comme elle, je n'ai fait que douter : exagère-t-elle ce qu'elle vit, se braque –t-elle trop facilement, ou les
Paternoster cherchent-ils à la mener à bout, à la pousser dans ses retranchements sans cesse ?
Le roman a une forte dimension sociale et politique. Il aborde la charge mentale, la place de la femme au sein de la société mais aussi de la famille et du couple. Il y est notamment question des différences de classes sociales et d'origines et l'autrice souligne les difficultés à en faire tomber les barrières, même au sein d'un couple. Elle dénonce également les différentes pressions qui amènent des personnes à ne plus être elles-mêmes, à se taire et à se plier aux règles racistes et patriarcales imposées par la société et la tradition familiale. le message final est un véritable coup de poing, bien qu'un peu trop explicité dans un long paragraphe qui prend la main au lecteur et ne le laisse pas se faire sa propre interprétation, sa propre réflexion.
Pasternoster est une lecture déstabilisante qui délivre un message fort. C'est un roman inclassable qui marque l'esprit avec son inquiétante étrangeté et qui ne fait que brouiller les frontières des genres littéraires. C'est une lecture qui fait parfois froid dans le dos, suscite le malaise et génère de l'émotion car elle propose un miroir de la réalité. J'ai été tout à tour en colère, choquée, attristée, révoltée, effrayée, agacée, émue. J'ai été embarquée dans cette histoire hautement addictive qui se dévore et où l'on ne sait jamais où l'autrice va nous emmener à la page suivante.
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