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Critique de Apoapo


Après cet essai, court mais extrêmement substantifique, l'on ne pourra plus affirmer que le fonctionnement de l'hypnose est inconnu. de plus, autant Il suffit d'un geste se caractérise par une prose poétique et psychanalytique, autant le présent ouvrage est ancré dans le discours de la science dont il s'élève jusqu'à des hauteurs philosophiques étonnantes, tout en conservant la rigueur logique et argumentative des deux. Je comprends pourquoi c'était le travail auquel son auteur resta le plus attaché jusqu'à sa mort. Il part d'une intuition fort simple, empirique, qui commençait à être prouvée par l'imagerie médicale cérébrale et dont les conséquences thérapeutiques et philosophiques les plus avancées sont tirées, au plus grand bénéfice du public ainsi que des praticiens : que l'hypnose soit un état de veille paradoxale, terme forgé sur le sommeil paradoxal permettant le rêve, c'est-à-dire ni un état de sommeil ni un état de conscience modifiée ; qu'il faille donc la considérer dans une dialectique avec l'état de veille restreinte qui est celui auquel nous nous référons vulgairement comme la simple veille. La veille paradoxale est aussi une veille généralisée, permettant une infinité de liens de signification avec le monde qui nous entoure, donc une infinité de possibles sur nous-mêmes, un pouvoir de modification définitif du soi, et enfin une libération par rapport aux carcans limitatifs de la logique, de la perception ordinaire notamment de soi, de la volonté et de la conscience.
La structure de l'ouvrage est plutôt complexe et peut se lire au mois à deux niveaux : le premier à m'être apparu ressemble à une gigantesque métaphore des phases (chronologiques) d'entrée et de sortie d'une séance d'hypnose ; un second niveau, plus intellectualisé, conforme au plan énoncé par l'auteur, peur ainsi se décliner :
- 1. le préalable – qui établit les bases théoriques de l'hypnose, selon une approche plutôt neurophysiologique, conçue comme l'ensemble des pouvoirs : (1) de rêver, (2) de configurer le monde, (3) d'imaginer ;
- 2. L'anticipation – qui décrit l'induction hypnotique en révélant « autant de traits caractéristiques de l'hypnose » : (1) la fixation, (2) l'indétermination, (3) la possibilité, (4) la puissance ;
- 3. La disposition – concept-clé qui définit l'attitude qui prépare et rend possible la thérapie ; il se répartit en : (1) la signification du terme, (2) une manière d'être au monde, (3) l'exercice de la disposition, (4) la disposition comme humeur, (5) sommes-nous maîtres de la disposition ?, (6) disposition et liberté, (7) l'apprentissage de la disposition ;
- 4. La modification – le « pouvoir inné et anhistorique [… qui] possède l'énergie suffisante pour imposer une nouvelle donne » ; il se compose de : (1) les niveaux d'apprentissage, (2) l'accès au troisième niveau, (3) le pouvoir de l'imagination, (4) la décision comme dédoublement, (5) la décision comme retournement, (6) la fonction du thérapeute, (7) de la psychologie à la physique ;
- 5. L'action - « les traits élémentaires auxquels l'hypnose devra être réduite pour devenir un ingrédient efficace et discret de la vie quotidienne, une sorte d'art de vivre » ; je précise que pour moi, ce chapitre constitue davantage une sorte de métaphysique de l'hypnose ; elle se répartit en : (1) exister, (2) prendre corps, (3) laisser exister.

En conclusion, on ne peut passer sous silence les références tout à fait surprenantes et stimulantes à des horizons culturels très variés, allant du taoïsme et autres sources de la culture chinoise aux classiques de la philosophie allemande, de Kant à Heidegger, à de belles métaphores musicales et picturales, sans oublier un solide aristotélisme et naturellement, parfois en veine un petit peu polémique, parfois dans une filiation assez claire, toute la réflexion psychanalytique...
[Le jargon des bibliothécaires collerait sans doute à cet ouvrage l'étiquette : « réservé à un public motivé »...]
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