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Critique de MarionBookology


Le pitch : Sortez vos Teppaz, vos cols roulés en polyester et…vos boutons d'acné ! Avec Crans-Montana, vous allez faire un voyage dans le temps au sein d'une station touristique huppée où la jeunesse dorée cosmopolite se retrouvait été comme hiver tout au long des trente glorieuses. Charlotte, Chris et Claudia, trois jeunes filles en fleur aussi belles qu'inséparables, alimentent les fantasmes d'une bande d'adolescents en phase aigue de cristallisation. Mais si pour Stendhal « la beauté est une promesse de bonheur », il semble que cela ne soit vrai que pour ceux qui restent plongés dans l'illusion du fantasme.
En lisant Crans-Montana, vous n'allez pas prendre un grand bol d'air frais, mais plutôt traverser doucement le miroir des apparences pour découvrir le versant caché de la montagne.
La spécificité de ce roman tient au décalage des points de vue qui s'expriment au fur et à mesure. le lecteur découvre dans un premier temps ceux de la bande de jeunes garçons, devenus des hommes mûrs et amers, qui se penchent rétrospectivement sur leurs tendres années de puberté. Paralysés par l'amour aveugle qu'ils vouent aux trois jeunes déesses, les garçons épient leurs faits et gestes, recoupent les informations, accumulent les indices pour nourrir, saison après saison, leur culte amoureux…sans jamais oser franchir le mur qui sépare les fantasmes de la réalité.
Au terme de l'adolescence, la glace fond peu à peu, sous le givre qui les rendait merveilleux, les êtres sont révélés dans leur authentique vulnérabilité. Comme si le regard bienveillant dont les garçons enveloppaient les trois jeunes filles était le seul rempart qui les protégeait de la cruauté de ce monde.
Au fil des pages, le sortilège qui semblait protéger les nymphettes de toute turpitude existentielle s'efface pour laisser place à une noirceur inattendue.
A partir du moment où les voix des trois jeunes femmes – hormis celle de Claudia – s'incarnent, le lecteur découvre une réalité faite de déceptions amoureuses, de traumatismes indicibles, et d'amère tristesse. Derrière la pellicule glacée qui les sépare des autres, il y a trois jeunes filles un peu paumées qui prennent de face la cruauté d'un monde superficiel bâti sur les apparences et un silence coupable. « Tant qu'on n'en parlait pas, les choses n'existaient pas. On aurait dit que l'équilibre du monde, ou même sa survie, en dépendait. »
Avec sa plume imagée et délicate, Monica Sabolo capture l'air du temps d'une époque où l'insouciance était plus souvent simulée qu'il n'y paraît dans une bourgeoisie française compassée et figée dans le temps. L'auteure compose aussi une fable plus universelle sur une forme de mollesse et de conformisme existentiel qui menace chacun d'entre nous de passer à côté de sa vie. Enfin, Crans-Montana c'est également le récit d'un aveuglement partagé par l'ensemble des personnages, filles comme garçons, qui ont cru naïvement que du sommet de la montagne, on ne pouvait chuter.
Lien : http://bookology.fr/crans-mo..
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