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Critique de Ys


Ys
27 janvier 2017
Au temps du roi Edouard, un monde existait encore, presque intact, toujours splendide mais déjà à demi privé de sens et sur le point de basculer. le monde du Grand Monde, des dames en robes du soir et des jeunes filles à marier, le monde des convenances polies par des siècles d'usage, celui des grande demeures de la campagne anglaise, avec leurs fermiers, leurs invités par dizaines et leurs armées de serviteurs. Ainsi est, a toujours été, devrait toujours être Chevron.
Un week-end comme tant d'autres, la duchesse douairière reçoit. Des invités par dizaines, impeccables, tous semblables au fond et vides, vides, si vides pour qui les regarde sans se laisser prendre aux leurres du prestige mondain. Ainsi les voit Sébastien, le jeune duc, 19 ans, beau, sauvage, romanesque, partagé entre le goût des belles manières et le sentiment de leur vacuité, entre l'amour de son domaine, l'attrait des belles femmes et le désir lancinant de s'arracher à tout ça. Ainsi les voit aussi sa soeur, Viola, trop jeune encore pour qu'on songe à prendre son avis en considération mais qui n'en pense pas moins, se tient à l'écart et songe.
Ainsi encore Léonard Anquetil, le seul invité qui détone, le seul vraiment intéressant, explorateur d'origine roturière invité par snobisme et venu par curiosité. Sébastien et Viola sont les seuls à retenir son attention - le frère et la soeur ne méritent-ils pas mieux que ce ce monde qui les condamne à une implacable répétition de choses surannées, qui étouffera bientôt le meilleur en eux s'ils n'apprennent pas à conquérir leur propre vie ?

Beaucoup de choses, dans ce petit roman. La mise en scène d'un monde en train de basculer, partagé entre prise de conscience et aveuglement, entre désir de changement et attachement au passé. Un portrait sans complaisance de la haute société édouardienne, engoncée dans sa propre importance sans comprendre qu'elle est déjà révolue, sans grandeur véritable et sans autre but que l'éternelle remise en scène d'une vieille pièce éculée. L'apprentissage - par les femmes, par l'amour, par l'amitié - d'un jeune homme déchiré entre des tentations contraires, pris aux pièges séduisants de son propre monde sans cesser de rêver d'absolu. le dernier amour d'une beauté bientôt vieillissante, qui découvre trop tard les vertiges de la passion.
Beaucoup de choses... et assez peu de pages, ce qui est un brin frustrant. Il faut reconnaitre à l'auteur un talent particuler pour poser l'essentiel en peu de lignes - un décor, une atmosphère, des idées, des désirs, des tensions, des personnages surtout, une mer de fantoches désolants dont émergent quelques caractères intéressants, attachants, accrocheurs, dont l'évolution et les rapports deviennent vite assez passionnants.
Dommage, tout de même, que tout cela n'ait pas été plus amplement développé - il y a beaucoup de choses, de personnages, que j'aurais aimé mieux découvrir, approfondir, qui auraient mérité une approche un peu moins superficielle - à commencer par Viola, qui est merveilleuse et que l'on voit beaucoup trop peu à mon goût !

Quoi qu'il en soit, je suis ravie d'avoir enfin découvert cet auteur qui m'intriguait depuis longtemps, et à qui je reviendrai certainement avec plaisir.
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