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L'ère victorienne s'achève au tout début du vingtième siècle, avec le couronnement du roi Edouard VII en 1902 : encore très attachée aux sévères conventions de l'étiquette, l'aristocratie anglaise commence avec circonspection à sentir le souffle d'un vent nouveau, n'osant s'autoriser de libertés que soigneusement cachées derrière les apparences les plus traditionnellement respectables. le jeune Sébastien, oscillant entre ordre ancien et émancipation moderne, se retrouve au coeur de déchirements sentimentaux où l'hypocrisie et la vanité pourraient bien l'emporter sur l'amour.


L'apprentissage de Sébastien n'est que le prétexte d'une virulente critique de la société édouardienne, que Vita Sackville-West connut durant son enfance : bien loin de se douter que l'ordre établi sera bientôt balayé par la première guerre mondiale, l'aristocratie britannique de l'époque s'accroche bec et ongles à la tradition, qui lui permet sans grande contrepartie de maintenir son prestige et ses privilèges, selon un mode de vie immuable hérité « du temps des Deux Roses ». L'auteur n'est pas tendre pour ses congénères et dénonce la mesquinerie quotidienne d'une coterie qui s'observe et dénigre impitoyablement le moindre travers derrière sourires et flatteries, la tartuferie morale d'adultères appliqués, envers et contre tout, à laisser sauve la façade de mariages respectables, tout comme l'hypocrisie sociale d'un paternalisme d'abord soucieux de préserver à son avantage une hiérarchie de classes inchangées depuis des siècles.


La plume acérée et sarcastique dessine les personnages et restitue leur contexte avec une précision et un réalisme qui donnent au lecteur l'impression d'évoluer dans leur quotidien. La lecture est fluide et passionnante, et amène à s'interroger sur la personnalité de l'écrivain : tandis que l'on est tenté d'imaginer Vita jeune se profiler sous les traits de Viola, la soeur de Sébastien, seule dans cette histoire à porter un regard lucide sur son milieu et à avoir le courage de s'affranchir de son hypocrisie, l'on ne peut également que sourire en se rappelant le conformisme social dont l'auteur fit preuve en menant sa vie amoureuse, homosexuelle et mouvementée, sous les apparences d'un mariage rangé.

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Quelle joie de replonger dans l'univers de Vita Sackville-West ! Après Toute Passion abolie, j'ai dévoré cette fois-ci Au Temps du roi Edouard !

Cette histoire nous plonge à nouveau en Angleterre, au début du XXème siècle, au « temps du Roi Edouard », et plus précisément, lorsque la société commence à évoluer. Nous suivons le jeune Sébastien, duc de Chevron, qui n'est pourtant pas très intéressé par la société et les réceptions « interminables » données par sa mère, Lucie. Sébastien, à la différence de son entourage, ne cherche donc pas à s'élever au-dessus de la société, mais au contraire, cherche un refuge pour se cacher et éviter de converser avec des personnes qui ne l'amusent guère… le jeune homme se lie ainsi d'amitié avec Léonard Anquetil, un explorateur vivant en marge de la société, qui lui prédit alors un avenir tout tracé -celui d'un duc qui doit faire honneur à son rang ainsi qu'à sa famille-, tout en lui proposant de partir en exploration avec lui. Malheureusement, Sébastien est tombé amoureux d'une amie de sa mère, Lady Sylvia Roehampton, ce qui le conduit à refuser la proposition de son ami. Toutefois, en déclinant l'offre de Léonard Anquetil, Sébastien semble se condamner à ne pas échapper à ses obligations, et ainsi devenir prisonnier des us et coutumes de son époque…
Nous suivons également le destin paradoxal de la soeur de Sébastien, Viola, qui adopte une position tout à fait contraire, bien plus libre que celle de son frère. Ainsi, Viola refusera une vie imposée par son rang, et deviendra l'une des premières à se « moderniser ».

Vita Sackville-West nous dépeint avec une telle simplicité la société anglaise ! A de nombreuses reprises, j'ai eu l'impression de me retrouver en ce début de XXème siècle, contemplant les ornements des ladies, mais également, ne pouvant que constater la déchéance de ceux qui ne veulent pas répondre aux attentes des autres. J'ai été étonnée de voir à quel point l'honneur était indispensable (et même vital) à cette époque, la moindre erreur ne pouvant être pardonnée, ou bien, devant être payée par un sacrifice terrible. J'ai donc beaucoup aimé ce roman, ce qui ne peut que m'inciter à lire d'autres livres de Vita Sackville-West !

Ainsi, j'ai passé un excellent et très agréable moment de lecture, et je conseillerai à tous ce magnifique roman d'une romancière talentueuse et fascinante !

A lire !!
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« Au temps du roi Édouard » est le second roman de Vita Sackville-West que je lis. Il m'a tout autant séduite que le précédent (Toute passion abolie) et j'y ai retrouvé cet enveloppement de bonnes manières aristocratiques. A l'époque Victorienne, l'Angleterre compte de grands domaines châtelains où vivent des familles de haut rang aux titres de noblesse.
Le personnage principal est Sébastien, Duc de Chevron. Selon sa mère Lady Lucie, il a une personnalité complexe.
Sa rencontre avec Léonard Anquetil, ami de la famille à l'esprit explorateur, va bousculer Sébastien. Ce dernier a bien du mal à s'imaginer jalonner le chemin qu'il sent tout tracé devant lui. Un destin d'aristocrate où la comédie des masques bat son plein.
Sébastien, lui, désire une vie exempte de conventions qu'il n'hésite pas à braver en entretenant une liaison avec une jolie lady mariée qui pourrait de surcroit être sa mère.
L'auteure dresse un tableau ironique de cette famille et surtout de la société bourgeoise anglaise de l'époque.
Peut-on vraiment s'écarter de son rang en toute sérénité ? Pas forcément évident !
Une lecture très agréable qui m'a complètement plongée dans l'Angleterre du temps du roi Édouard.
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Une peinture haute en couleurs et sans aucune complaisance de la haute société aristocratique du tout début du 19 ème siècle, au moment où s'achève le règne du roi Edouard VII.
Vita Sackville-West, l'auteur de ce livre, est une femme de lettres étonnante: elle est fille d'un aristocrate, le troisième lord Sackville et d'une danseuse espagnole. Elle connaît donc bien ce milieu très fermé de la haute aristocratie britannique.
Le livre "Au temps du roi Edouard" est sans doute son livre le plus connu.
En 1930, ce livre a atteint, deuux mois après sa sortie, le chiffre phénoménal pour l'époque de 20 000 exemplaires vendus.
En France cet auteur est surtout connu pour avoir été très proche de la romancière britannique elle aussi Virginia Woolf.
Ce livre évoque pourtant un sujet qui n'a rien d'original dans la littérature de l'époque, à savoir l'ennui qu'éprouve un jeune lord de 19 ans, Sébastien, duc de Chevron. Il rejette ce monde d'artifices de la haute aristocratie anglaise, un monde fait de convenances, d'hypocrisie, de mensonges, d'adultères pour tromper l'ennui.
Une société très soudée qui est jalouse de ses intérêts et qui adopte volontiers une attitude désinvolte et condescendante vis-à-vis des classes laborieuses.
Sébastien rejette cela mais n'arrive pas à se détacher vraiment de son milieu, malgré son souhait de devenir un député socialiste.
Il va ainsi mener une liaison avec la meilleure amie de sa mère, la magnifique et adulée lady Roehampton. Cette liaison sera brutalement interrompue par le mari de celle-ci qui la sommera de se retirer sur les terres familiales pour éviter la fréquentation du jeune lord.
Ensuite viendront d'autres liaisons, dont deux avec des femmes issues de la classe moyenne; A chaque fois, c'est pour le jeune Sébastien le même désenchantement, puisque comme le dit l'explorateur Anquetil qu'il va rencontrer:
"Votre vie a été tracée le jour de la naissance. Vous êtes allé dans une école préparatoire, puis à Eton, puis à Oxford; maintenant vous entrez dans les Gardes...."
Tout est tracé et effectivement Sébastien va rester "collé" à son milieu.
C'est une magnifique peinture, une peinture crépusculaire qui nous montre un monde en train de vaciller, une classe au faîte de sa puissance et qui va perdre petit à petit ses prérogatives.
Les dialogues sont incisifs, la psychologie des personnages est très poussée.
Un livre passionnant que j'ai lu d'une traite.
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Nous sommes en 1905, le roi Édouard, fils de Victoria et d'Albert, est sur le trône d'Angleterre depuis quelques années. Sébastien a 19 ans, étudie à Oxford et est le cinquième duc de Chevron. Il s'ennuie parmi ses pairs durant les week-ends où sa mère invite. Sébastien est viscéralement attaché à sa terre, son domaine mais il préfèrerait s'épargner les mondanités inhérentes à son rang. Lors d'un de ces week-ends, il fait la connaissance de Léonard Anquetil, un aventurier revenant du pôle Nord. Celui-ci apprécie le jeune homme et tente de le sauver de son destin tout tracé : « (…) Vous ne vous demandez jamais pourquoi vous suivez telle ligne de conduite ; vous la suivrez parce que c'est ce qui est admis. Croyez-moi, c'est la passé qui est responsable de tout cela, l'héritage, la tradition, l'éducation, votre nurse, votre père, votre précepteur, votre école, Chevron, vos ancêtres, toute la gamme. Vous êtes condamné d'avance, mon pauvre Sébastien, vous êtes perdu. » Il lui propose alors de le suivre lors de sa prochaine expédition. Sébastien refuse pour des raisons sentimentales. Il va devenir l'amant de Sylvia, Lady Roehampton, une amie de sa mère. Son destin aristocratique commence à ce moment et la prédiction d'Anquetil semble s'accomplir.

« Sébastien se trouvait au milieu d'un ordre de choses qui, pour un esprit de 1905, était immuable. Pourquoi changeraient-elles, puisqu'elles n'avaient jamais changé ? » L'excellent roman de Vita Sackville-West nous montre justement un monde en mutation, entre deux époques. L'époque victorienne s'est terminée, l'atmosphère peut se détendre mais la première Guerre Mondiale n'est pas loin. A beaucoup d'égards, « Au temps du roi Édouard » m'a fait penser à la série de Julian Fellowes « Downton Abbey ». L'aristocratie se complait dans ses traditions, dans son luxe, dans son snobisme. Les terres héréditaires et les domestiques aussi. Mais les habitudes changent imperceptiblement comme par exemple le fils de Wickenden, l'intendant de Chevron, qui veut devenir mécanicien au lieu de succéder à son père. Ou Viola, la soeur de Sébastien, qui veut s'émanciper et vivre seule à Londres (elle fait penser à la Sybil de « Downton Abbey »). Les moeurs deviennent décadentes derrière la façade lisse. Tout le monde connaît les amants des autres mais rien ne se dévoile au grand jour. C'est ce que ne comprend pas Sébastien, il faut sauvegarder les apparences, éviter le scandale quitte à sacrifier son amour. Après Sylvia, Sébastien se grisera à séduire d'autres femmes, rejoindra la garde royale, s'étourdira dans des réceptions et regrettera amèrement de n'avoir pas suivi Anquetil.

« Au temps du roi Edouard » est, avec « Toute passion abolie », mon roman préféré de Vita Sackville-West. Elle ressuscite ce monde d'avant la première Guerre Mondiale, avec une plume élégante et sarcastique. Ce monde aristocratique sur le point de disparaître fut admirablement peint par John Sargent dont j'admire l'oeuvre et qui est cité plusieurs fois dans le roman . C'est toujours un immense plaisir de retrouver cette grande romancière.
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Au temps du roi Edouard, un monde existait encore, presque intact, toujours splendide mais déjà à demi privé de sens et sur le point de basculer. le monde du Grand Monde, des dames en robes du soir et des jeunes filles à marier, le monde des convenances polies par des siècles d'usage, celui des grande demeures de la campagne anglaise, avec leurs fermiers, leurs invités par dizaines et leurs armées de serviteurs. Ainsi est, a toujours été, devrait toujours être Chevron.
Un week-end comme tant d'autres, la duchesse douairière reçoit. Des invités par dizaines, impeccables, tous semblables au fond et vides, vides, si vides pour qui les regarde sans se laisser prendre aux leurres du prestige mondain. Ainsi les voit Sébastien, le jeune duc, 19 ans, beau, sauvage, romanesque, partagé entre le goût des belles manières et le sentiment de leur vacuité, entre l'amour de son domaine, l'attrait des belles femmes et le désir lancinant de s'arracher à tout ça. Ainsi les voit aussi sa soeur, Viola, trop jeune encore pour qu'on songe à prendre son avis en considération mais qui n'en pense pas moins, se tient à l'écart et songe.
Ainsi encore Léonard Anquetil, le seul invité qui détone, le seul vraiment intéressant, explorateur d'origine roturière invité par snobisme et venu par curiosité. Sébastien et Viola sont les seuls à retenir son attention - le frère et la soeur ne méritent-ils pas mieux que ce ce monde qui les condamne à une implacable répétition de choses surannées, qui étouffera bientôt le meilleur en eux s'ils n'apprennent pas à conquérir leur propre vie ?

Beaucoup de choses, dans ce petit roman. La mise en scène d'un monde en train de basculer, partagé entre prise de conscience et aveuglement, entre désir de changement et attachement au passé. Un portrait sans complaisance de la haute société édouardienne, engoncée dans sa propre importance sans comprendre qu'elle est déjà révolue, sans grandeur véritable et sans autre but que l'éternelle remise en scène d'une vieille pièce éculée. L'apprentissage - par les femmes, par l'amour, par l'amitié - d'un jeune homme déchiré entre des tentations contraires, pris aux pièges séduisants de son propre monde sans cesser de rêver d'absolu. le dernier amour d'une beauté bientôt vieillissante, qui découvre trop tard les vertiges de la passion.
Beaucoup de choses... et assez peu de pages, ce qui est un brin frustrant. Il faut reconnaitre à l'auteur un talent particuler pour poser l'essentiel en peu de lignes - un décor, une atmosphère, des idées, des désirs, des tensions, des personnages surtout, une mer de fantoches désolants dont émergent quelques caractères intéressants, attachants, accrocheurs, dont l'évolution et les rapports deviennent vite assez passionnants.
Dommage, tout de même, que tout cela n'ait pas été plus amplement développé - il y a beaucoup de choses, de personnages, que j'aurais aimé mieux découvrir, approfondir, qui auraient mérité une approche un peu moins superficielle - à commencer par Viola, qui est merveilleuse et que l'on voit beaucoup trop peu à mon goût !

Quoi qu'il en soit, je suis ravie d'avoir enfin découvert cet auteur qui m'intriguait depuis longtemps, et à qui je reviendrai certainement avec plaisir.
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Angleterre, début du siècle. Édouard VII remplace la sévère Victoria. Petit à petit, la noblesse et les classes s'affranchissent de son influence : une ère de liberté et de modernité souffle sur le pays. Pourtant deux jeunes gens, Sebastien et Viola, enfants de l'aristocratie dorée, souffrent de l'immobilisme de leur classe : ils se rendent compte que l'intérêt des leurs se limite aux potins et aux histoires de mariage. Leur vie est toute tracée.

"Mon cher enfant, votre vie a été tracée le jour de votre naissance. Vous êtes allé dans une école préparatoire, puis à Eton, puis à Oxford; maintenant, vous entrerez dans les Gardes. Vous aurez beaucoup d'histoires d'amour, la plupart avec des femmes du monde mariées; vous fréquenterez les maisons dont on parle; vous aurez un rôle à la cour; vous porterez un uniforme blanc et rouge, qui vous ira très bien; vous serez courtisé et persécuté par toutes les mères de Londres"

Nous observons ce monde à travers les yeux de Sebastien, curieux mais blasé, se détachant peu à peu de ce monde faux, hypocrite, inutile, et oisif.

"Rien n'arrive, dit Sébastien avec violence, les jours se suivent et se ressemblent tous."

De son côté, sa soeur Viola se rebelle contre l'autorité d'une mère étouffante, qui refuse de voir que sa fille a grandi, pour la simple raison que cela signifierait la fin de sa jeunesse à elle. Pour éviter cela, elle se concentre sur le mariage de cette dernière, sans la consulter le moins du monde.

"À propos des mariages : on savait malheureusement que toutes les jeunes filles ne pouvaient faire de brillants mariages et que certaines devaient se contenter de gentlemen fort honorables dont l'Angleterre est pourvue en quantité très satisfaisante. Les soeurs de Lord Roehampton s'étant rendu compte, vingt ans plus tôt, que les couronnes et les plus haut titres ne leur étaient pas destinés, avaient suivi l'exemple de beaucoup d'autres soeurs bien nées, mais trop nombreuses, et, l'une après l'autre, avaient accordé leur main à des gentlemen terriens qui n'étaient pas fâchés d'épouser une fille titrée, et qui, en retour, les faisaient maîtresses d'un agréable château construit sous le roi George, et d'une maison à Londres avec, si possible, un porche dorique "

Un porche dorique. Voilà ce dont rêve le Londres bourgeois. Un rêve auquel on peut accéder par le mariage, d'où les milliers de petites combines qui prennent forme dans l'ombre des boudoirs.

Comme dans Haute société et dans les nouvelles d'Infidélités, Vita Sackville-West excelle dans l'analyse fine et la dénonciation mordante des travers de la société de début de siècle, au coeur de laquelle elle a grandi. Sans crise ni larmes, elle décrit une société qui est prête à s'effondrer de l'intérieur, une société presque mûre pour la Première guerre mondiale et le bouleversement des rapports sociaux. Dans ce fracas, il n'est pas facile de concilier l'ordre (symbolisée par la mère) et la liberté (symbolisée par un personnage atypique, une sorte de Sebastien devenu vieux, qui a choisi l'aventure et porte un regard insolent et drôle sur ce monde dont il fait pourtant encore partie.

A la manière d'Edith Wharton de l'autre côté de l'Atlantique, ce genre de roman fait revivre pour nous un monde oublié mais fascinant, celui de l'avant-guerre, de l'avant-cataclysme.
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Un roman très " british " avec les ingrédients habituels qui ont fait le succès de ce genre d'ouvrages : une pincée d'humour, un zest de snobisme, une bonne dose d'élitisme, une grande mesure d'acuité psychologique , reste à saupoudrer le tout d'un nuage de tristesse et de solitude, mâtiné d'un optimisme raisonné.
N.B : Vita Sackville-West manie élégamment et efficacement le shaker.
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Je dois en effet vous avouer d'emblée que je suis totalement sous le charme de cette chronique grinçante de l'aristocratie anglaise du début du 20è siècle. La plume de Vita Sackville-West est brillante, élégante, virevoltante et ce récit s'avère tout simplement passionnant. Si vous aimez l'ambiance de Dowtown Abbey, de Gosford Park et de Parade's end, ce court roman ne pourra que vous séduire, comme j'ai été séduite et emportée dans le sillage de ces aristocrates d'avant la première guerre mondiale. le règne moral de Victoria a pris fin avec l'avènement de son fils Edouard VII. Ce roi mécène des arts et des sciences, épicurien, dandy et libertin, mène une vie qui tranche singulièrement avec celle qu'a vécu sa mère pendant les quarante dernières années de son règne. Veuve inconsolable du prince consort Albert de Saxe-Cobourg-Gotha, elle s'est murée dans le noir et l'austérité, s'éloignant inexorablement de son peuple, de l'aristocratie et de ses enfants.
Vita Sackville-West connaît bien l'aristocratie britannique, ses codes et ses coutumes même si, née en 1892, elle n'était qu'une enfant lors de l'accession au trône du roi Edouard en 1901. Fille unique du troisième Lord Sackville et d'une danseuse espagnole (un scandale et une mésalliance à l'époque), elle va vivre de sa plume avant de s'adonner à la passion du jardinage et des roses sur la fin de sa vie. Au temps du roi Edouard parait en 1930 et c'est un succès immédiat.
Le récit démarre en 1906, pile au milieu du règne d'Edouard VII et s'achèvera cinq ans plus tard avec la cérémonie d'intronisation de son fils, George V. le roman s'ouvre sur un week-end dont la gentry raffolait. le duc Sébastien et sa mère Lucie reçoivent dans leur domaine de Chevron. Âgé de seulement 19 ans, Sébastien est étudiant à Oxford et a une vie déjà toute tracée faites de devoirs et d'obligations, de bals et d'obligations mondaines, entre la garde royale et la gestion de son domaine, digne d'un petit village à lui tout seul. Véritable gentleman-farmer dans l'âme, il aime arpenter Chevron et prendre soin de ses domestiques, tout comme l'ont fait ses ancêtres avant lui. Lors de ce week-end, il fait la connaissance de Léonard Anquetil, un aventurier revenant du pôle Nord et coqueluche éphémère du tout Londres. L'homme n'est d'ailleurs pas dupe, conscient d'avoir été invité pour épater les invités de la duchesse. Les deux hommes s'apprécient et l'aventurier tente de convaincre Sébastien de partir avec lui en expédition afin d'échapper pour un temps à ce destin tout tracé, en vain, car ce dernier vient de succomber à la très belle Lady Sylvia Roehampton, la meilleure amie de sa mère.
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Au travers du personnage de Sébastien, duc héritier du domaine de Chevron, jeune homme désabusé au destin tout tracé, Sackville-West va nous tendre un miroir critique de la société aristocratique britannique, aux moeurs policées parce qu'il faut maintenir intactes les apparences, où la superficialité est reine et où la liberté de choisir sa vie n'existe pas. On pourrait se croire dans un poème de Baudelaire, vous savez, celui qui dit "pour ne point sentir le fardeau du Temps, enivrez-vous sans cesse". Sébastien s'enivre : il a choisi la compagnie des femmes, pour ne point sentir le lourd fardeau du temps et de l'irrémédiable.
C'est mordant, caustique, désabusé. Il a tout du personnage désagréable, imbu de lui, sûr de sa beauté et de sa valeur (n'est pas duc qui veut !), mais dont les convictions sont ébranlées par deux personnes : sa soeur, Viola, qui a un arc narratif intéressant (quoique trop souvent secondaire) et qui n'aspire qu'à vivre sa vie, et la rencontre avec Anquetil, un explorateur, qui lui expose crûment ses 4 vérités.
J'avais trouvé ce roman par hasard en fouillant les bacs de Boulinier, et je ne regrette pas mon choix ! Je vais me mettre à la recherche d'autres romans de Sackville-West, dont le destin est tout aussi intéressant que l'oeuvre.
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