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Critique de Arimbo


En ces temps où nous assistons impuissants aux monstruosités d'une guerre déclenchée de façon insensée par un dictateur russe et menée par une armée russe inhumaine, je relis ce texte court, mais formidable de Saint-Exupéry, texte plein « d'espérance en l'Homme » comme le chantait si bien Nougaro dans son dernier album.

Ce texte était initialement destiné à servir de préface au livre « 33 jours » de son grand ami écrivain juif, et gaulliste, Léon Woerth (vous savez, celui à qui est dédié le Petit Prince!), livre qui raconte la débâcle de l'armée française en 1940.
L'armistice et l'avènement du « gouvernement de Vichy » empêcha la publication de ce livre et Saint-Exupéry va remanier et amplifier son texte, en l'écrivant pour son ami, qu'il ne nomme plus, mais aussi pour tous les français, « otages » des Nazis.

En six petits chapitres pleins de poésie et d'humanité, Saint-Exupéry décrit les ambiances inquiètes et troublées qu'il rencontre en ces jours de 1940, d'abord à Lisbonne, puis dans un transatlantique à destination des USA, et y mêle ses souvenirs de fraternité avec son ami, et avec des anarchistes lors de la guerre d'Espagne, et ceux de la vie au Sahara.

Et tous ces souvenirs servent en fait d'arguments pour introduire deux derniers chapitres extraordinaires et émouvants où l'auteur milite avec force pour le respect de l'Homme avec des phrases qui résonnent si fortement en ces jours sombres pour le peuple ukrainien, aussi en ces temps où les nationalismes prospèrent dans notre pays et en Europe dans un climat de rejet de l'autre.
Je vous en livre quelques unes:
« Respect de l'homme ! Respect de l'homme !... Là est la pierre de touche ! Quand le Naziste respecte exclusivement qui lui ressemble, il ne respecte rien que soi-même ; il refuse les contradictions créatrices, ruine tout espoir d'ascension, et fonde pour mille ans, en place d'un homme, le robot d'une termitière »
Ou encore:
« Nous reconnaissons comme nôtres ceux mêmes qui diffèrent de nous »
« Si je diffère de toi, loin de te léser, je t'augmente. »
« Aucun d'entre nous ne détient le monopole de la pureté d'intention. Je puis combattre, au nom de ma route, telle route qu'un autre a choisie. Je puis critiquer les démarches de sa raison. Les démarches de la raison sont incertaines. Mais je dois respecter cet homme, sur le plan de l'Esprit, s'il peine vers la même étoile. »
« Pour nous, Français du dehors, il s'agit, dans cette guerre, de débloquer la provision de semences gelées par la neige de la présence allemande. Il s'agit de vous secourir, vous de là-bas. Il s'agit de vous faire libres dans la terre où vous avez le droit fondamental de développer vos racines. Vous êtes quarante millions d'otages. »

Je retrouve dans Lettre à un otage, exprimée de façon différente, la même foi en l'être humain que l'on lit dans Lettres à un ami allemand d'Albert Camus.
Des textes d'actualité, puissants, indispensables, je trouve, aux jeunes et moins jeunes de notre France et de notre Europe
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