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Citations sur Depuis toujours nous aimons les dimanches (50)

Nous n'en sommes qu'à nos débuts, mais d'ores et déjà, nous pouvons avancer que :
Désormais, le travail ne nous définira plus. Hors de question ! Et à la demande banale : que faites-vous dans la vie ? (sous-entendu quel est votre job histoire de vous situer infailliblement sur l'échelle sociale et de réagir en conséquence), nous répondrons joyeusement : mille choses dont certaines d'une inutilité totale ! et aucune qui nous tient en laisse !
Désormais, nous ne regarderons plus le travail comme constituant le seul espace où se nouent les liens sociaux.
Désormais, le travail ne favorisera ni n'abaissera personne. Fini ! Fini ! Fini !
Désormais, il ne constituera nullement notre unique centre d'intérêt, ni une fin en soi, ni une triste obligation, ni une exténuante corvée, ni un enfermement dans telle ou telle discipline. Rien de tout ça ! Vous avez compris ? Rien !
Désormais, nous ne le dissocierons pas de nos existences ; nous déciderons, sans GPS, du sens à lui donner ; et nous l'organiserons librement ce que curieusement les tenants bornés de la « libre entreprise » ne peuvent concevoir, incapables d'imaginer de liberté hors celle de s'enrichir.
Désormais, nous ne permettrons à personne de nous couper les ailes. À personne !
Et l'os que vous nous lancez en croyant nous apaiser, vous pouvez vous le mettre... (ici Salvayre va trop loin).
Désormais, nous ne laisserons pas nos forces s'abîmer pour des prunes, ni nos visages s'enlaidir par le rictus de la fatigue.
Désormais, nous nous donnerons le droit de ne pas savoir ce que nous voulons.
Désormais, nous avancerons la tête haute - que le chagrin avait courbée - et le regard hardi - que la fatigue avait terni. Dehors la tristesse qui sécrétait l'amer ressentiment !
Désormais, nos lendemains ne chanteront plus comme des casseroles.
Désormais, nous resterons maîtres de nos horloges et de nos destinées, et ce que l'on désignait jusqu'ici par l'expression « art de vivre » utilisée dans les dictionnaires de cuisine ou les catalogues IKEA, retrouvera enfin toute sa raison d'être.
Désormais, la rage et la révolte qui bouillaient dans nos cœurs devant la violence et la mauvaiseté du monde, nous les convertirons en altière sérénité. Nous serons enfin ce que vous ne vouliez à aucun prix que nous fussions.
Puisque désormais, Messieurs, nous habiterons nos vies !
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Une poignée de richissimes détiennent aujourd’hui la moitié du revenu mondial, tandis que des milliards d’hommes et de femmes, vivant de trois fois rien, n’ont que leur fiel à boire et leurs poings à ronger.
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L’opium du peuple dans le monde actuel n’est peut-être pas tant la religion que l’ennemi accepté… Un tel monde est à la merci, il faut le savoir, de ceux qui fournissent un semblant d’issue à l’ennui. (Georges Bataille)
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Dans Aurore, il [Nietzsche] affirmait que le travail constituait la domestication et le contrôle social de masse, de loin les plus efficaces, ainsi que la meilleure des polices ; et que, grâce à lui, l’heure du grand contrôle universel avait sonné. Car le travail, écrivait-il, c’est-à-dire le dur labeur du matin au soir, use la force nerveuse dans des proportions extraordinaires, et la soustrait à la réflexion, à la méditation, aux rêves, aux soucis, à l’amour et à la haine, il place toujours devant les yeux un but minime et accorde des satisfactions faciles et régulières. Ainsi une société, où l’on travaille sans cesse durement, jouira d’une plus grande sécurité : et c’est la sécurité que l’on adore maintenant comme divinité suprême.
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Car c’est alors, dit-il, qu’on s’apprête à vivre que la vie nous abandonne… Or, la vie, pour qui sait l’employer, est assez longue. Mais l’un est possédé par l’insatiable avarice ; l’autre s’applique péniblement à d’inutiles labeurs ; un autre est plongé dans l’ivresse, ou croupit dans l’inaction, ou s’épuise en intrigues toujours à la merci des suffrages d’autrui, ou, poussé par l’aveugle amour du négoce, court dans l’espoir du gain sur toutes les terres, sur toutes les mers… Quel fol oubli de la condition mortelle que de remettre à cinquante ou soixante ans les projets de sagesse, écrit-il.
Sénèque rend compte avec talent, Messieurs-les-profiteurs, de ce dont nous ne voulons plus d’aucune façon : remettre à demain, à plus tard, à plus loin, à jamais, le temps de vivre qui nous est compté, car les jours s’en vont et… nous aussi.
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La paresse, nous l’affirmons, est le berceau de la pensée.
Et penser – nous aimons quelquefois faire les professeurs –, et penser c’est créer, c’est inventer d’autres configurations, c’est percer des fenêtres au sein de murs aveugles, c’est enfreindre les règles qui colonisent nos consciences et domestiquent nos émois, c’est n’obéir à rien ni à personne mais seulement au vrai, pour l’occasion soyons lyriques !
Et penser, nous insistons aussi sur ce point, penser n’est en rien la prérogative de certains, mais une faculté constamment présente en chacun de nous, quelles que soient sa classe, son éducation ou sa culture, pour peu qu’elle ne soit empêchée.
Raison pour laquelle les pouvoirs, qui ont compris que toute pensée portait en elle un germe affreux d’insoumission, la regardent comme ce qu’il y a de plus à craindre.
Que le peuple, à la faveur d’un break, se pique de penser, et les voilà tout épouvantés !
Ce qui nous amène à affirmer sans contredit que la paresse est politique.
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Encouragés par notre propre audace, nous avons affirmé que nous allions dorénavant nous limiter au strict nécessaire, nous avons répété : au strict nécessaire, c’est-à-dire à ce qu’on appelle le travail-patience pour bien le distinguer du travail-corvée.
Selon les experts les plus avertis, avons-nous développé : quinze heures par semaine de ce travail-patience seraient tout à fait suffisantes, en attendant que les usines fonctionnent seules grâce à l’IA, et qu’il n’y ait plus sur terre qu’une communauté sans chef, sans police, sans psychiatres et sans critiques littéraires, contemplant dans la paix les vérités éternelles, Ainsi soit-il.
Mais ne rêvons pas ! Et consacrons-nous lucidement à l’essentiel : la défense et l’illustration de la paresse qui, dans notre pays, s’interrompt violemment, cruellement, sauvagement, chaque lundi, jour odieux, jour honni, jour maudit entre tous.
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Car, vous l’avez compris, la paresse est un art.
La paresse n’est pas mollasserie poisseuse, n’est pas intoxication cannabique, n’est pas délectation morose, n’est pas léthargie postprandiale, n’est pas neurasthénie chronique, n’est pas détachement veule, n’est pas dédain romantique, n’est pas morne prostration, n’est pas je-m’en-foutisme mufle, n’est pas indolence blasée, n’est pas dandysme las, n’est pas ce que communément on appelle glande, ou glandouille, ou flemme, ou flemmingite, ou feignardise, ou feignasserie, avec lesquelles souvent on feint de la confondre.
La paresse est un art subtil, discret et bienfaisant.
Une manière heureuse et chérie des poètes de résister aux mandements que le monde marchand nous inflige avec son ventre énorme et ses dents carnassières.
Un instrument de charme et de volupté calme.
Une musique douce.
Une façon légère, gourmande et infiniment libre d’habiter le monde et d’y « cueillir le jour », comme nous y exhortait un certain Horace.
(Carpe diem, quam minimum credula postero : « Cueille le jour présent sans te soucier du lendemain », Odes, I, 11, à Leuconoé.)

 
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Vert, que je t'aime, vert.
Vert du vent et vert des branches.
La barque sur la mer et le cheval dans la montagne.
Avec l'ombre à la ceinture,
elle rêve à sa balustrade,
vert visage, verts cheveux,
et des yeux de métal froid.
Vert, que je t'aime, vert.
Sous la lune gitane,
les choses la regardent,
et elle ne peut les voir...
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Car vous l’avez compris, dans la situation actuelle, paresser c’est désobéir, c’est ne plus s’évertuer à donner adroitement le change, c’est trahir le modèle conforme auquel on se croit tenu, c’est jeter les pantoufles usées de l’habitude, c’est faire craquer les coutures du costume bien taillé, c’est traverser le mur qui fout l’infini à la porte, c’est fausser compagnie aux mensonges mielleux, c’est rompre l’enchaînement implacable des jours qui situe le dimanche tout au bout du tunnel de la semaine, bref, c’est quitter les rails d’une vie focussée sur le cravail, comme disent les enfants.
Puisque le cravail ça crève.
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