Livre interdit en Iran et on le comprend après sa lecture qui n'épargne pas le régime.
Après avoir lu "La librairie de Téhéran" qui se passe en partie en Iran peu avant la chute du Shah et de la destitution de Mossadegh, cela m'intéressait de lire ce livre-ci. Une toute autre approche puisque ici cela se passe de nos jours. Mais avec le poids du passé, après la révolution de 1979.
Mère a loué une belle villa en bord de mer en Turquie afin de réunir ses 5 enfants et leur famille. Une partie a quitté l'Iran pour s'installer à l'étranger, fuyant le pays qui devient trop policier et offrant peu d'avenir.
S'étant quittés depuis 30 ans ils ne se connaissent plus et leurs enfants ne se sont jamais rencontrés.
Ce séjour est tendu, les caractères, les manières de vivre sont parfois tellement opposées. On s'envoie à la figure les quatre vérités, qui font mal. C'est secouant. Mère intervient très peu dans ces échanges mais quand elle prend la parole elle est très mesurée, essaie de calmer le jeu. Elle est malgré tout très secouée d'entendre tout ce qui s'échange, les reproches, l'incompréhension des uns et des autres. Chacun pense qu'il a davantage souffert que les autres, que ce soit ceux qui se sont exilés ou ceux qui n'ont pas quitté le pays. Au milieu des 5 frères et soeurs il y a Dokhi, une jeune nièce dont les parents sont morts mais dont on ne lui a jamais rien dit. Elle a été élevée par Mère, sa grand-mère à qui elle est toute dévouée. C'est Dokhi qui raconte ce séjour de 10 jours entre tous ces membres d'une même famille et leur conjoint. C'est ici que Dokhi apprendra enfin qui sont ses parents. Habib son père a été exécuté, sa mère qui n'a jamais été acceptée par les parents d'Habib a été emprisonnée et fusillée.
Tous ces échanges nous font connaître ce qu'ont vécu les membres de la famille, les uns exilés à Paris, en Suède, aux Etats-Unis, et d'autres qui sont restés en Iran. Une incompréhension inouïe règne entre eux.
Une fois que chacun a vide son sac, que chacun a pu mesurer les difficultés de la vie des autres, la tension a baissé, les rapprochements sont enfin envisageables et possibles. Chacun se sent plus proche des autres.
Arrivés très tendus et même hostiles les uns par rapport aux autres, après toutes ces confidences ils se retrouvent finalement en famille détendue, éprouvant de la sympathie, de l'affection pour l'autre et le besoin de se revoir, de se retrouver. Etant apaisés ils ne souhaitent plus attendre 30 ans pour se revoir. Ils ont besoin les uns des autres.
Mère a réussi miraculeusement ce rapprochement qui était très loin de réussir car tout avait très mal commencé.
Une belle analyse de caractères et d'évolution des sentiments dans l'acceptation et la compréhension de l'autre. Intéressante explication de la vie des iraniens qui sont restés au pays et des difficultés à s'adapter ailleurs pour les exilés.
Très beau livre à recommander.
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Dans chaque roman rédigé par un auteur iranien se cache une certaine poésie. Quelque soit le sujet abordé.
Ici, l'auteure nous entraîne à une réunion de famille trigenerationnelle.
L'histoire de cette famille est fracassée par la guerre.
La tension entre les personnages grimpe rapidement jusqu'à ce que la vérité éclate.
Chaque personnage va alors raconter sa vision de sa propre existence face à cette guerre.
Le texte est beau et puissant.
Il m'a invité à parcourir d'autres ouvrages iranien et à me pencher sur cette histoire si riche.
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