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Critique de Bartzella


Ce roman se lit par bouchée, un morceau à la fois. Il m'est difficile d'en parler, je ne sais trop qu'en dire, il m'a laissée bouche bée. Dès que l'on commence l'histoire, on se doute que l'issue ne peut être heureuse. Que cela va se terminer dans un mur. Bien que pas si long à lire, c'est une histoire dure, crue, empreinte de violence. de violence gratuite, surtout. Son titre lui colle bien. Piranhas, un monde où le plus fort gagne. Un monde dans lequel celui-ci bouffe les plus petits sans aucuns scrupules.

De nos jours. Nous sommes dans le quartier de Forcella, à Naples. Une bande de onze jeunes garçons se mettent en tête de devenir les prochains « parrains » de la place. Les « anciens » sont tous soit vieux, soit déchus, soit morts ou en prison. Nicolas Fiorillo (dit Maharaja), le chef de la bande et le plus âgé, est la tête pensante du groupe, celui qui est le mieux organisé. C'est lui qui embarque tous les autres dans sa paranza. Tous sont d'âge mineur. Ceci ne les empêchera nullement de commettre tous les délits possibles; vols, règlements de comptes, harcèlement, trafic de drogue, possession d'armes d'assauts, trahisons, meurtres. Ces jeunes n'ont d'autre but que de devenir les meilleurs, les plus puissants, les plus dangereux, les plus craints. Ils ne veulent travailler pour personne, n'être la main de personne. Ce qu'ils veulent, c'est régner. Il n'y a point de morale, en dehors de la leur. Ils n'ont de respect pour rien ni personne en dehors de leur groupe, la paranza.

« Désormais, tous les gars dans l'appartement étaient devenus frères de sang. Et quand on est frères de sang, impossible de revenir en arrière. Les destins s'unissent aux règles. On vit et on meurt suivant sa capacité à rester dans le cadre de ces règles. »

« Il avait besoin de se donner cette dimension criminelle; même quand il était seul il la recherchait. Une leçon qu'il avait apprise sans l'aide de personne, sa version de la maxime des super-héros américains qui dit : ‘Vis dès maintenant la vie que tu voudrais vivre', alors qu'il ne l'avait lue nulle part. Au fond, il espérait être placé sur écoute, c'était mieux que le dernier rang de n'importe quelle organisation camorriste au bout du rouleau. Autour de lui, Nicolas ne voyait que des territoires à conquérir, des possibilités à exploiter. Il l'avait compris tout de suite et ne voulait pas attendre d'être plus grand. Il se fichait d'avancer étape par étape, se fichait des hiérarchies. »

Hors de question pour eux de vivre une vie « normale », une vie de leur âge. Ils puisent leurs idées sur le Net, s'inspirent de leurs héros de jeux vidéos, de leurs films et séries télés préférées et bien sûr, des réseaux sociaux, la crème de la crème. C'est en jouant à des jeux et en regardant YouTube qu'ils apprennent à tirer…

J'ai été effrayée et choquée de voir à quel point ce phénomène de gang pouvait aller loin. Comment ça débute et insidieusement, les emmène sur des routes de plus en plus sombres et tortueuses. Comment ils se piègent eux-mêmes. Ça m'a fait un effet que je ne peux décrire d'imaginer un enfant de 10 ans avec un AK-47 en mains prêt à tirer froidement sur n'importe qui alentour juste parce que quelqu'un de plus fort et en plus haute position le lui demande…juste pour impressionner et surtout, montrer qu'il a des couilles. Dans mes yeux d'adulte, je suis incapable de concevoir cela et pourtant, ces situations arrivent pour de vrai. Les gangs de rue, les motards, la mafia, etc. Un milieu où il n'en ressort rien de bon.

« - Pour devenir un enfant j'ai mis dix ans. Pour te mettre une balle dans la tronche je mettrai pas plus d'une seconde.' le déclic du Desert Eagle a été comme un cliché instantané dans la pièce. »

« Piranhas » aborde donc le sujet des « baby-gangs », un thème que je ne connaissais pas beaucoup autrement qu'en surface. Ce roman va bien en profondeur, brasser des émotions peu agréables et fait planer un grand sentiment de malaise.

En gros, c'est un roman bien rédigé, que je ne relirais sans doute pas car ce n'est pas un univers plaisant où nager mais je suis bien heureuse de l'avoir lu une fois pour savoir comment cela fonctionne dans ces gangs. Les personnages principaux et secondaires (très nombreux) sont fictifs mais fort crédibles (je les ai tous haïs) et le milieu social qui les a engendrés est réel. Toutefois, il y a tellement de personnages (noms et surnoms) qu'on y perd son latin.

Bref, un roman à lire qui a plus la fonction d'instruire que de divertir. Je pense que je vais m'en rappeler longtemps. Ça débute fort et cru tout de suite en partant et il n'y a pas de temps morts. Roberto Saviano est un auteur à retenir ! Je compte bien lire ses autres romans.
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