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Critique de viou1108_aka_voyagesaufildespages


Le Pavillon des Pivoines est un opéra composé en 1598 par le poète chinois Tang Xianzu. Il raconte l'histoire d'amour de Liniang et Mengmei, qui ne se connaissent pas mais se sont rencontrés en rêve et y sont tombés amoureux. A son réveil, Liniang comprend que ce rêve ne se réalisera jamais ; elle se laisse alors mourir, espérant retrouver son grand amour dans l'au-delà. A force de dévotion, Mengmei parviendra cependant à faire revenir sa bien-aimée dans le monde des vivants.
Or donc, le jour de ses 16 ans, la jeune Pivoine assiste à une représentation de cet opéra, cachée derrière un paravent avec les autres femmes de la maisonnée. Car c'est bien là la place des femmes dans les familles aisées de la Chine du 17ème siècle : confinées dans leurs appartements, à l'abri du regard des hommes, elles passent le temps à entretenir leur statut de femmes-objets, se limitant à broder, chanter, danser et pondre des enfants mâles.
C'est néanmoins à l'occasion de cet opéra que Pivoine rencontre furtivement un jeune et beau poète. le coup de foudre est instantané, mais tous deux savent que cet amour est impossible. Les choses auraient dû en rester là, mais Pivoine, trompant son ennui dans sa prison dorée en attendant son mariage arrangé, décide alors de se plonger dans l'étude approfondie du texte du Pavillon des Pivoines et entame la rédaction d'un commentaire. Réalisant combien sa vie et son avenir sont étriqués, comprenant qu'elle ne connaîtra jamais l'amour absolu, elle se jette dans cette tâche à corps perdu. Et l'expression est à prendre à la lettre, puisque, en proie au « mal d'amour », Pivoine ne s'alimente plus et se laisse dépérir, espérant, à l'image de Liniang, accéder ainsi à la liberté et à la félicité.
Racontées par Pivoine elle-même, la première partie du roman relate la courte vie terrestre de la jeune fille, tandis que les 2ème et 3ème parties décrivent comment, en tant que « fantôme errant », elle tentera de trouver l'amour, de comprendre les secrets familiaux et de poursuivre son commentaire du Pavillon des Pivoines à travers ses deux « soeurs-épouses ».

Ce roman est donc une fiction, mais dont les principaux personnages ont existé, de même que « le Commentaire des trois épouses », exégèse du Pavillon des Pivoines. Ces deux textes connurent un immense succès à leur époque, même si l'opéra fut censuré par les autorités en raison de son caractère lascif, et surtout parce qu'il envisageait la possibilité, pour une femme, de choisir son destin. Exaltant l'amour fou, cet opéra provoqua également le phénomène du « mal d'amour », qui toucha de nombreuses jeunes filles préférant se laisser mourir de faim et de désespoir plutôt que de vivre une vie cloîtrées dans les murs de leurs palais.

Le roman me laisse une impression mitigée. D'une part, il est très intéressant parce que bien documenté : on en apprend beaucoup sur les rites funéraires, sur l'histoire de la Chine à l'heure de la chute des Ming et de l'invasion mandchoue, et surtout sur la condition des femmes (les scènes de bandage de pieds sont particulièrement horribles). D'un autre côté, ce récit ravira les âmes romantiques prêtes à déverser des torrents de larmes à la moindre bouleversificante histoire d'amour contrariée. Parce qu'on n'est pas loin de l'eau de rose : raconté par une adolescente de 16 ans, désoeuvrée, exaltée et désespérée, c'est forcément lyrique, poétique et naïf, c'est-à-dire larmoyant, mièvre et agaçant. Les personnages sont caricaturaux et leurs destins tragico-tragiques à souhait. Ajoutez-y une bonne couche de fantastique et un happy end, et vous avez tous les ingrédients d'un best-seller. Ce qui, on le sait, ne rime pas toujours avec qualité littéraire.
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