Les gens courageux n'existent pas, il y a seulement ceux qui acceptent de marcher coude à coude avec leur peur.
Ils n’étaient plus la jeune garde. La jeunesse s’était éparpillée en cent lieux différents, partie en lambeaux sous les coups de gégène des interrogatoires, ensevelie dans les fosses secrètes qu’on découvrait peut à peu, partie en années de prison, dans des chambres étranges de pays plus étranges encore, en retours homériques vers nulle part, et il n’en restait que des chants révolutionnaires mais plus personne ne les chantait car les maîtres du présent avaient décidé qu’il n’y avait jamais eu au Chili des jeunes comme eux, qu’on avait jamais chanté « La Jeune Garde » et que les lèvres des jeunes filles communistes n’avaient jamais eu la saveur de l’avenir.
(Points, p.33)
.....jusqu'à l'arrivée de ce matin pluvieux de septembre où, à partir de midi, les horloges commencèrent à indiquer des heures inconnues, des heures de méfiance, des heures où les amitiés s'évanouissaient, disparaissaient, ne laissant que les pleurs épouvantés des veuves et des mères.
La vie s'étaient remplie de trous noirs et il y en avait partout : on entrait dans une station de métro et on n'en ressortait jamais plus, on montait dans un taxi et on n'arrivait pas chez soi, on disait lumière et les ombres vous engloutissaient.
(p60)
L’inspecteur Crespo aimait les coïncidences car la vie en est pleine. Il fallait simplement les accepter en silence, elles ne pouvaient servir d’arguments pour prendre des mesures préventives. Il fit donc la seule chose possible pour un policier troublé par une coïncidence : rien.
Les gens courageux n'existent pas, il y a seulement ceux qui acceptent de marcher coude à coude avec leur peur.
Je suis l'ombre de ce que nous avons été et nous existerons aussi longtemps qu'il y aura de la lumière.
La mémoire est toujours de notre côté ; elle enjolive l'atrocité, adoucit l'amertume, met de la lumière là où régnaient les ombres. Elle a toujours une propension à la fiction.
(En dédicace) : A mes camarades, ces hommes et ces femmes qui sont tombés, se sont relevés, ont soigné leurs blessures, conservé leurs rires, sauvé la joie et continué à marcher.
Les gens courageux n'existent pas, il y a seulement ceux qui acceptent de marcher coude à coude avec leur peur.
Le vieil inspecteur et sa jeune adjointe se regardèrent dans les yeux. Ils y virent ce que les chroniqueurs de faits divers et les distributeurs de médailles appellent la satisfaction du devoir accompli mais qui, en vérité, se nomme la fierté de se dire "je tente le coup" et de faire son devoir.