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Critique de Eowyn85


J'ai adoré ce roman de Stéphane Servant de par le genre auquel appartient ce récit: le fantastique mais aussi la thématique traitée habilement par l'écrivain.
En effet, le décor est tout de suite planté : une ville fantôme au Mississipi bordée par les bayous et les alligators comme animaux de compagnie. Un mobil-home et un père cul-de-jatte en guise de famille. le tout baignant dans une atmosphère moite et le grésillement des insectes au-dessus des marécages avec à la clé un ouragan qui s'annonce. Tous les ingrédients sont bien présents pour plonger le lecteur dans une histoire noire et attiser sa curiosité. le cadre correspond parfaitement et sans excès. L'atmosphère est de plus en plus inquiétante à chaque page et est en grande partie la clé du succès de ce roman.
D'autre part, l'écriture est bien le thème principal de cette oeuvre qui décortique les méandres de l'âme humaine. A travers la Chose c'est la métamorphose du subconscient humain, c'est l'essence même de l'être, ce qui fait ce que nous sommes, ce qui nous pousse à agir. C'est surtout le côté obscur de notre âme, celui qu'il n'est pas bon de réveiller.
« La Chose, c'est ton envie d'ailleurs, ton désir de liberté, ton rêve d'adulte. La Chose, c'est tes peurs d'enfant, tes frustrations du quotidien, tes craintes du lendemain. La Chose, c'est ce qui fait de toi un être unique. Et c'est aussi ton visage perdu au milieu de la foule, anodin, semblable à tous les autres. La Chose n'a pas de formes, pas de frontières. Toujours elle te parlera dans la langue que tu parles. Et elle prendra l'apparence de tes fantasmes. Chez certains, elle sommeillera toute leur vie. Elle en guidera d'autres vers la liberté, la passion, le génie ou la folie. Comme mon père. Comme toi. Et maintenant tu as un choix à faire. David, la Chose, c'est toi. Uniquement toi. »
Il s'agit donc d'une part d'ombre de nous même qu'il faut maîtriser car sans cela la folie ou la mort nous attendent au bout du chemin. Serait-ce à dire que l'écriture est une catharsis dangereuse autant pour l'écrivain que pour le lecteur ? Y aurait-il des limites à ne pas franchir lorsque les mots s'emparent de notre esprit et nous guident vers un ailleurs ? L'écriture serait-elle pernicieuse et révélatrice de tous les dangers ? L'imagination emprisonne comme elle libère et emmène sur des terres inconnues et infinies. Elle fini par s'emparer de nous à défaut de la maîtriser et nous rend fou. La Chose c'est l'excès, le trop plein de créativité, de gloire, de reconnaissance. L'écriture permet l'évasion ; de qui ? de quoi ? Et jusqu'à quel point ?
« Jason avait le pouvoir de rendre sa peinture vivante : ses tableaux étaient comme des portes, il avait le don de faire naître la plus belle des images. Et aussi celui de donner vie aux plus horribles des cauchemars. (…) Jason ne savait plus où il en était. Il prenait beaucoup de came pour calmer sa « Chose ».
Stéphane Servant use de l'intertextualité en évoquant Kafka et le Horla de Guy de Maupassant. En effet, tout au long du roman David se pose la question : et si j'étais fou ? Cette évocation rappelle la fin tragique du célèbre écrivain, persuadé que le Horla était un être à part, alors qu'il n'était peut-être que sa Chose ?
Ces deux oeuvres magistrales et représentatives du genre fantastique sont l'écho d'une âme tourmentée, et révélatrices des frontières de l'inconscient.
Une lecture que je recommande vivement et sans attendre !
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