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Critique de sylviedoc


Plus je lis Lionel Schriver, et plus j'apprécie son écriture si particulière. J'ai vraiment eu du mal avec ce style un peu alambiqué et assez froid au début, mais finalement je trouve qu'ici il sied parfaitement au propos : une mère qui échange par lettres avec son mari avec lequel elle ne vit plus, au sujet de leur fils Kevin. Un charmant ado de 18 ans qui a massacré deux ans auparavant neuf de ses petits camarades de classe et un employé de cafétéria passant malencontreusement dans le coin au mauvais moment. Pourquoi a-t-il commis cet acte monstrueux ? Parce que c'est un monstre justement ? Ou parce que c'est la mode à cette époque-là, en 1998 ? Effectivement au cours du roman on se souvient avec effarement de toutes ces tueries perpétrées par des adolescents, dont celle de Colombine...
Ou est-ce que sa mère est fautive, n'ayant jamais eu le fameux déclic censé se produire à la naissance de son enfant, provoquant l'amour maternel ? Tout au long du roman, elle s'interroge, se remémorant le long cheminement qui a abouti à ce fameux JEUDI 8 avril, le jour où la vie de la famille a basculé. Et pour commencer, l'avait-elle réellement désiré, cet enfant, ou n'a-t-il été qu'une concession au désir de son mari de fonder une famille ? Et ensuite, comment aurait-elle pu mieux aimer ce bébé braillard, aux apprentissages plus que laborieux (du moins en apparence), semblant se complaire dans la médiocrité mais d'une sournoiserie sans pareille ? Et osons le dire, profondément méchant et manipulateur, car oui, cela existe des gosses méchants de nature, même s'ils ne manquent de rien (à part peut-être d'un peu d'amour maternel, et encore, pas toujours) et n'ont aucune déficience visible.

Difficile d'éprouver de l'empathie envers un personnage, Eva, la mère et narratrice est extrêmement lucide sur son propre manque d'affect envers son fils, les seuls moments où elle se montre aimante c'est quand elle parle de sa relation avec Franklin, le mari auquel elle écrit. Même si elle elle semble avoir été bien plus maternelle avec sa fille Celia, j'ai été dérangée par le peu de protection qu'elle met en place après avoir vu ce dont Kevin était capable. Et ne parlons pas de Kevin, dont l'attitude est tellement abjecte, que ce soit avant ou après son crime, qu'elle en presque caricaturale. Il me semble quand même difficile à croire, après tous les signes avant-coureurs, qu'aucun proche ou médecin n'ait décelé le potentiel de nuisance de ce gosse. Mais aujourd'hui même, allumant ma radio, j'ai entendu une histoire tout aussi atroce, concernant aussi un jeune ayant déjà commis des actes criminels et soi-disant très surveillé (!)...donc plus grand-chose ne m'étonne, hélas.

J'ai été complètement fascinée par ce récit, plein de digressions (ce qui m'agace en général, mais pour le coup ça ne m'a pas gênée). Je n'avais pas du tout anticipé la fin, n'ayant pas vu le film ni lu beaucoup de critiques, j'ai abordé ce roman vierge de tout à-priori. Même si je n'ai pas du tout compati avec Eva, je n'ai pu m'empêcher de me demander comment j'aurais réagi à sa place, si par malheur j'avais eu un enfant comme Kevin. Qui sait, j'aurais peut-être eu un geste maladroit ? Ou je l'aurais vendu sur internet, entier ou en pièces détachées ? Mais non, je ne suis pas une psychopathe, moi ! Et mes enfants non plus, dieu merci !



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