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Critique de Jolap


Les prémices du conflit entre la Chine et le Tibet visant l'annexion ont commencé en 1966. le 14 ème Dalaï Lama est exilé en Inde depuis 1959. Nous sommes en 2020. Rien n'est réglé pour les tibétains.
Daï Sijie choisit ce contexte de dominant-dominé pour son nouveau roman.

En 1968 le Palais du Potala, résidence et lieu d'étude et de recherche des Dalaï-lamas successifs, est occupé par des gardes rouges. "Le loup" chef de ces jeunes révolutionnaires fanatiques chinois enferme Bstan Pa, le peintre officiel du Dalaï lama dans les anciennes écuries du palais. Il veut lui faire avouer un crime contre révolutionnaire imaginé de toute pièce. Qui gagnera? le prisonnier ou le bourreau?

Dai Sijie pose une plume extrêmement fine sur cet épisode terrifiant de 1968. Il me semble qu'il n'a pas choisi certains détails par hasard. Les gardes rouges sont étudiants aux beaux-arts. Ils détruisent avec acharnement, avec délectation des pièces d'une grande valeur artistique. Ils étudient l'art et couvrent les stupas d'immondices. Cependant, leur attirance pour l'art ne les empêche pas de profaner les reliquaires des dalaï-lamas, de brûler des piles d'ouvrages calligraphiés à l'encre d'or, de renverser les statues, de détériorer les portraits. Décidément, le fanatisme est un rouleau compresseur destructeur irréfléchi et barbare que rien ne peut arrêter, même pas la passion.

Bstan Pa le sait et pour tenir, pour faire face à la souffrance physique et morale, il va dérouler sa vie comme on déroule un tanka, avec précision et délicatesse. Les souvenirs sublimes affluent nous donnant à nous lecteurs atterrés l'occasion de lire une histoire exceptionnelle, lui donnant à lui la force de tenir.

Ce texte alterne en permanence l'harmonie, la méditation, la sensualité le raffinement et la cruauté, l'horreur, l'acharnement, la destruction.


Le loup et ses sbires cognent de la façon la plus ignoble qui soit et la beauté, sorte d'anesthésiant trouve encore et encore un espace où il se faufile et s'impose.
Qui pliera le premier? Qui sera vainqueur?

Ce texte relativement court peut être le symbole du bouddhisme et de l'esprit des dalaï-lamas, apôtres de la non violence. Il fait partie intégrante du conflit Chine-Tibet. Enfin, à titre individuel, il donne une place de choix à l'harmonie vitale que chacun a en soi et peut développer pour contrer les agressions extérieures.

Je remercie vivement l'auteur, les éditions Gallimard et l'opération Masse critique privilégiée pour m'avoir fait vivre ce moment unique où beauté et laideur s'affrontent. Un livre marquant à plus d'un titre.


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