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Critique de Deleatur


Il n'est jamais trop tard pour découvrir Simenon... Comme j'ai voulu faire les choses dans les règles, j'ai choisi un Maigret, et un des premiers et des plus connus. Soyons honnête, si j'ai commencé par celui-là, c'est aussi parce qu'il s'agit de l'un de ceux que l'on est à peu près certain de trouver en entrant chez un bouquiniste.
N'avoir jamais lu Maigret tout en ayant vu la plupart de ses films pose évidemment une sorte de problème. Je ne connais ni Pierre Renoir ni Michel Simon dans le rôle, et Jean Richard m'a toujours paru un peu fadasse, quoique bien sympathique. Je suis par ailleurs assez curieux de découvrir ce que Rowan Atkinson peut faire du personnage.
Mais pour moi, c'est très simple : Maigret aura toujours la gueule de Gabin.
Dans le Chien jaune, je croyais deviner sa silhouette massive à tous les coins de page, et entendre sa voix dans chaque dialogue. Simenon n'imaginait sans doute pas que son Maigret pourrait ainsi se confondre avec un acteur (et je crois d'ailleurs que Gabin n'était pas son Maigret préféré), mais en ce qui me concerne cette incarnation du personnage, au sens propre, a incontestablement rajouté à la saveur de ma lecture.
L'identification de Maigret à un visage de cinéma est d'autant plus facile que Simenon caractérise très peu son héros. Il ne faut pas s'attendre en effet à ce que l'auteur se fende d'un portrait du commissaire. Maigret, c'est d'abord un taiseux. Quelqu'un qui parle peu, parce qu'il lui suffit d'être là. Maigret, c'est une présence, un Oeil scrutateur. Et s'il ne dit rien, il fait parler tout le monde, tamisant ses indices au fil des phrases perdues.
Un second charme incontestable du livre est le côté en quelque sorte régionaliste de l'histoire : une enquête à Concarneau, ça me parle. Si on rajoute à ça, l'âge du livre étant ce qu'il est, que cette enquête se déroule au début des années Trente, voilà qui me ravit doublement. Certes, le roman est court, mais Simenon peaufine son ambiance, sans grandes phrases ni longues descriptions, mais d'une façon très efficace. On y est, tout simplement.
Presque secondaire, le crime n'est là-dedans qu'une simple pelote à dévider afin de mettre à nu un microcosme pas très reluisant. Et ce petit bijou d'atmosphère m'a renvoyé du coup à toute une autre série de références : les films de Carné et leur réalisme poétique, ou bien ceux de Duvivier, à la noirceur plus naturaliste. Des pavés mouillés par la pluie, un bistro à l'ambiance glauque, des destins malheureux et toute la chiennerie de la vie... Un vrai régal, quoi.
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