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Critique de Pecosa


Je l'aime bien, Aline Beaucaire. Fille d'un couple de concierges alsaciens, mère célibataire mariée sans amour à un peintre en bâtiment prisonnier dans un Stalag, elle est femme de ménage dans des hôtels. Partie travailler en Allemagne, elle s'éprend d'un Français, sergent pilote pro-nazi, qui fraye avec une drôle de clique.
Femme au physique avantageux- on dit qu'elle ressemble à l'actrice Mireille Balin- Aline s'ennuie, rêve d'amour et d'aventure, aimerait sortir de sa condition. Les fréquentations de son amant la préoccupent un peu, elle fouille mais ce n'est pas le plus important. Aline en a sa claque de jouer les bonniches à Stuttgart, elle veut regagner la France, franchir la ligne de démarcation avec son fiancé, gagner Marseille puis l'Algérie et son soleil. C'est un rêve orientaliste à quat'sous, ambiance Annabella dans La Bandera ou Mireille Balin dans Pépé le Moko, « Je rêvais aux hauteurs de la Casbah d'Alger, et que là-haut, dans le pêle-mêle lointain d'habitations blanches et de terrasses, m'attendait Jean Gabin, mon amoureux (… )»
Même si les truands corses, les voyous de la Collaboration, les agents nazis qui magouillent avec son pilote bien aimé font désormais partie de sa nouvelle vie, Aline veut profiter du soleil marseillais. de temps en temps, les rafles, les exécutions, les arrestations arbitraires se rappellent à son bon souvenir, mais ce n'est pas suffisant pour troubler ses rêves de midinette qui veut sa part du gâteau.
Dans un long mémorandum adressé au Commissaire, on apprend très vite qu'Aline a purgé deux ans aux Présentines, à Marseille, elle raconte sa vie et se défend d'être une Collabo. Car pour son malheur on la confond avec une presque homonyme mais vraie nazie, Aline Bockert, surnommée La Panthère rouge.
Alors, innocente ou coupable, Aline Beaucaire? Amoureuse inconsciente ou espionne retorse habile à brouiller les pistes?



Encore un roman de Slocombe dévoré à belles dents, c'est du nanan. le témoignage d'Aline (qui rappelle la longue lettre de Jean-Paul Husson dans Monsieur le Commandant), entrecoupé de pièces d'Archives, lui permet de dresser un tableau saisissant du ventre mou de la France où les vrais héros -qui n'ont pas conscience d'en être- sont une denrée rare, les lignes de la vertu et de la morale étant plus fluctuantes que celles de la ligne de Démarcation. La France est grise, les desseins des individus assez difficiles à déchiffrer, un peu à l'image du personnage de Robert Blémant (que l'on croise régulièrement dans les polars sur l'Occupation), commissaire à la ST puis aux services secrets militaires, résistant traquant les agents allemands, et membre du Milieu …
J'ai apprécié que la modeste Aline Beaucaire, citoyenne ordinaire dans une époque peu ordinaire, soit au coeur du récit, et non son presque homonyme, Aline Bockert, la Panthère Rouge, alias Alice Mackert, Suisse naturalisée Allemande en 1942, secrétaire générale de la section niçoise de la Gestapo , qui comparut en 1948 sous les chefs d'inculpation de dénonciation d'un maquis à Clermont-Ferrand, de rafles d'enfants Juifs dans des écoles de la région de Nice, d'arrestation, détention et séquestration, de participation à des meurtre et des tortures…On se doute que la destinée d'Aline Beaucaire, comme celle de Mireille Balin, une « sale actrice », tirera davantage vers le noir que vers le blanc inondé de soleil de la ville d'Alger. Et qu'importe si elle n'a jamais existé que dans l'imagination de Romain Slocombe, ce n'est pas parce que c'est inventé, que ce n'est pas vrai.
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