Alors que faire ? Se laisser mourir ? Un choix comme un autre. Gravir les cinq étages ? Une possibilité. Arracher Siegeer à son père ? Oui, mais comment pénétrer l'antre des monstres et en ressortir vivant, avec lui ?
- Et les freins ! Pardon, j'ai rien dit, trop effrayé à l'idée qu'ils m'abandonnent comme un chien.
Ah ! cette manie de barricader notre absence.
Bref, je plonge dans une sévère morosité, à mesure que les heures défilent, à espérer qu'il apparaisse enfin.
... ,délicieux garçon de mon âge, à la peau douce et laiteuse, et que je dois donc attendre, là, docile, dans le clair-obscur de notre tanière. Une ancienne chaufferie située au sous-sol de sa barre HLM. Puisqu’il nous faut nous effacer pour continuer à exister, à chérir la chair. Puisqu’il nous faut maculer de secret nos états d’âmes de petits pédés, nos baisers, nos joies, nos pleurs, nos adieux, ce sentiment confus et puissant qu’ils nomment amour.
Mais dans ce cas, peut-être aussi il aurait donné raison à ces trois brutes pour m’avoir montré, sous la douche, la voie qu’on me destine, pareil à ces chatons noyés par milliers, dans les toilettes de ces familles remplies d’amour, pour être nés sans agrément du droit de vivre.
« Mais depuis à la seconde, mon cher professeur, ou l’on a moqué mes défauts, pointé mes faiblesses ; depuis que l’on a déversé sur moi votre abjecte morale du dominant ; depuis que l’on m’a taxé de sale petit pédé (je n’ai pourtant rien avoué, je vous assure), pour avoir imploré de ne pas sauter du plongeoir. Enfin, vous voyez, depuis qu’on m’aime, quoi »
En effet, quel joli conte sur le rêve libéré de son crépuscule. Quelle démonstration magistrale pour avoir tenté de faire de ce mensonge, leur amour à eux, une vérité universelle.