Les gens débrouillards savent faire contre mauvaise fortune bon cœur – ne naissons-nous pas tous nus et égaux? Tout ce qui s’ensuit dans la vie est une question de choix et de bonne volonté, crois-en les animateurs d’émissions de radio privées.
Peut-être pourras-tu t’appuyer sur les statistiques de consultation : si ton texte a été téléchargé plus de deux cents fois, même gratuitement, cela se traduit en somme par le fait que « des centaines de lecteurs se sont déjà familiarisés avec sa pensée ».
Avec diplomatie, fais savoir à tes invités que le poids d’une seconde, tierce, quarte ou quinte opinion sur la qualité de leur prose pèse bien peu dans la balance face à un refus catégorique auparavant exprimé. « Néanmoins, continueras-tu, un autre nom sur la page frontispice pourrait, à terme, valoir au document d’être retiré des tablettes où il accumule actuellement la poussière. » Joue en même temps de ton influence auprès des acteurs appropriés pour forcer la reconsidération d’une publication.
Ce n’est pas en écrivant que l’on exhibe son talent. Il existe tant d’autres aspects à ton travail qu’il est dangereux de laisser au hasard.
Un pseudonyme masculin t’ouvrira des portes et offrira à tes livres un accès auquel il ne t’aurait jadis nullement été permis de rêver. La seule exigence de cette approche sera de laisser ton travail, une fois accompli, vivre par lui-même, sans autre intervention d’une femme qui, on le sait, n’aurait jamais pu accoucher d’un tel chef-d’oeuvre.
Entendons-nous bien : des best-sellers se sont écrits et se sont vendus avant ta naissance, et avant la mienne aussi, même s’il me peine de l’admettre.
Tu as pris la décision active de mettre la main sur le groupe démographique le plus nombreux et le plus constamment renouvelé d’entre tous, c’est-à-dire les créateurs en manque de débouchés, et de leur faire miroiter la possibilité d’une vie meilleure grâce à des conseils lumineux.