Il y a une différence capitale entre la capacité à dire de grands mots et le fait d'être grand. Et peu d'occasions nous sont offertes d'en apporter la preuve. Je me dis parfois que nous sommes commandés par de grands mots que de petits hommes profèrent.
La vie n'est pas incompréhensible, mais simplement inexplicable.
Le paradis, est-ce ce lieu où l'on n'a plus besoin de comprendre, à moins que cette description ne s'applique à l'enfer ?
Les jours des uns et des autres diffèrent évidemment, certains ne sont que banalité, d’autres ne sont qu’aventures, mais chaque conscience forme un monde qui part de la terre et monte jusqu’au ciel ; alors, comment se peut-il qu’une chose aussi grande disparaisse aussi facilement pour ne plus devenir que néant, sans laisser derrière elle ne serait-ce que quelques traces d’écume, ne fut-ce qu’un écho ?
On retrouve toujours cette atmosphère dans laquelle on a du mal à faire la différence entre le réel et l'irréel. La puissance des éléments : brume, brouillard, pluie, vent, tempête y contribue, la dureté de la vie qui en découle aussi. Tout est perçu par les yeux du "gamin" : les difficultés à communiquer , la misère humaine, l'alcool mais aussi l'amour et la générosité de certains individus qui permettent d'affronter les aléas de cette rude vie.
page 183 "Nous devons nous garder d'admirer ceux qui s'élèvent au plus haut, tant que nous ignorons ce sur quoi ils tiennent , sur leurs propres jambes, ou sur la vie des autres".
page 20 : "Skuli possède des parts sur un navire ponté,(..) il a les moyens de l'ouvrir haut et fort, il n'a pas grand chose à perdre, contrairement à nous, qui dépendons entièrement des commerçants et de leur bon vouloir".
Page 217 : " le contremaître sait crier sur les hommes () et si les hommes renâclent, veulent rentrer chez eux, alors d'accord qu'ils y aillent, mais qu'il ne reviennent pas".
Sur le tiraillement amoureux : celui par exemple de Jon Andersen, capitaine de la Sainte Lovista :
" "Alors je mets fin à cette histoire, se dit-il parfois lorsqu'au printemps il part ver le nord pour voguer vers le froid et la lumière, mais dès qu'il voit les pays qui s'élève, sortant de ses goudres abyssaux, son désir est si fort qu'il pourrait tuer, la douleur de l'absence est si intense qu'il pourrait en pleurer" .
Sur le désir de la femme à s'émanciper : Andrea :" J'ai passé ma vie, obéissante comme une brebis, j'ai passé ma vie à faire ce qu'lon attendait de moi"..."Sauf une fois, lui dit le Gamin, (le jour où elle a décidé de quitter Petur, "dont le coeur est aussi sec qu'un morceau de morue salée". p 306
"Geirbrudur pourra plus déposer ses prises dans l'enceinte à poissons du village, à moins qu'elle ne vende l'Espoir, quelle se rende à la messe avec régularité, er qu'elle se marie sans délai, ses manières de vivre menacent l'ensemble de la société " .
Un navire qui vogue sous le vent est comme une musique.Les cordages et le bois gorgé de sel craquent, les voiles sont gonflées par la brise, cet air en mouvement sous les étoiles et le soleil, et la pluie a cessé. L'Espoir cingle et s'éloigne de Slétueyri...
« As-tu décidé si tu voulais vivre ou mourir ? s’enquiert cette femme ou plutôt cette jeune fille. Elle est rousse, les cheveux des défunts sont roux. Je ne sais, répond-il, je ne suis pas sûr de connaître la différence, et je ne suis pas non plus sûr qu’elle soit si grande ».
Pétur a légèrement secoué la tête, comme afin de se débarrasser de ce bruit qui l’assourdissait, un brouhaha de langues étrangères, tout à fait incompréhensible, du reste, depuis quand peut-on comprendre une autre personne, y compris si elle s’exprime dans notre propre langue.
Ils ont traversé ensemble l’enfer et le bout du monde, ils ont vu des vies, ont été confrontés à la mort, le lien qui les unit ne se rompra jamais, c’est le destin qui les a liés l’un à l’autre et nul ne saurait se défaire d’un tel nœud, qu’il soit homme ou démon.